9 : Songe

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Je roulais depuis deux bonnes heures déjà. Il faisait noir et je me sentais traquée, indéfiniment.
Je me tournais de tous les côtés, animée par la peur, chaque petit animal dans les arbres me faisait frissonner. Chaque son, aussi infime qu'il soit, me faisait trembler de la tête au pied.
Soudain, mon fauteuil s'arrêta violemment. Je tentai de le bouger, en vain. Je commençai sérieusement à paniquer. Je voulais crier mais aucun son ne sortait de ma bouche.
C'est à ce moment que je l'aperçus.
La "chose"
Une ombre noire parmi les feuillages des arbres.
Aussi noire que soit la nuit, l'ombre restait aussi visible que si elle était blanche.
Du noir sur du noir aussi visible que du blanc sur du noir.
C'était inexplicable.
Une sueur froide commençait à descendre lentement dans mon dos lorsque l'ombre bougea.
Elle semblait me regarder.

"- Samantha ...

Je ne répondai pas, pétrifiée.
- L'acte de trop ... Tu l'as commis ... L'acte de trop.
- Qui est là ?! hurlai-je
- Samantha désormais je ne te quitterai plus ...
- Laissez moi !
- Toujours
- Ma tête !
- À jamais ..
- Aïe !
- Je suis TOUJOURS là !!
- AAAAAHH !!!!"

Je me réveillai sur le rire tonitruant de l'Ombre.
- AAAAAHH !!!!

La sueur perlait sur mon front et tous les membres de mon corps tremblaient.

Je me redressais sur mon fauteuil et jetai un œil au paysage qui m'entourait.

Je fus frappée de voir que j'étais à l'endroit précis où j'étais dans mon rêve.

Mes yeux se balladèrent à l'horizon, cherchant à dissuader mon être des pensée noires et je remarquai que le ciel était rose clair : c'était beau. Très beau. Si beau que je ne pus en détacher les yeux.

Un sourire était figé sur mes lèvres, et là, dans la forêt, une criminelle sévèrement recherchée était, pour la premiere fois depuis longtemps, heureuse.

Un craquement se fit entendre dans les branchages.

Je sortis brusquement de mon intense contemplation et tournai la tête.

Je poussai un soupir de soulagement lorsque je découvris une biche, grande et méfiante accompagnée d'un petit faon.

Je fis une grimace de dégoût : les animaux m'avaient toujours répugné.

Je tentai de chasser ces monstres mais me rendit à l'évidence : j'étais toujours invisible.

Mais était-ce théoriquement possible ? Non évidemment !

Mais alors pourquoi personne ne me voyait ?

Alors que j'imaginais les pires théories, je me rappelai de ma mission première : trouver mon "amie", ma dernière chance.

Je poussai une inspiration et me mis à pousser mon fauteuil d'une manière assez régulière.

Je trouvais un grand nombre d'animaux sur mon chemin.

Je fus même traversée par un sanglier et je poussai un hurlement de dégoût.

Au bout d'un moment, j'arrêtai de faire attention et traversai de mon plein gré tout ce qui se trouvait sur mon chemin.

Au loin, j'aperçus les lumières de l'hôpital. Je n'en revenais pas : parmi tous les dédales de la forêt, j'avais réussi à retrouver le chemin.

C'est alors qu'un frisson d'horreur me courut dans le dos : l'Ombre avait dit qu'elle serait toujours là, et si c'était elle qui me guidait depuis le début ?

Je jetai un regard à mes jambes et me rendis compte qu'elles tremblaient comme des feuilles.

Un ricanement retentit au loin dans la forêt. Je me mis à pousser mon fauteuil de toutes mes forces et, essoufflée, je ne remarquai pas l'humain que je venais de traverser.

Je m'arrêtai brusquement et regardai l'environnement. Je m'aperçus que j'étais dans la rue, que j'avais dépassé l'hôpital.

Étonnée, je me tournai et découvrai, là, horrifiée, au beau milieu de la route, la marque de sang que j'avais laissé en goûtant le sang de la petite fille.
J'étais revenue à mon point de départ.

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