Chapitre 3: Xiaoren en herbe

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Quatre saisons plus tard, la nuit et le brouillard étaient tombés sur la colline du petit village de Yufu, encore animé par le chahut des marins provenant d'une maison close et de quelques marchands de victuailles ou de breloques dans la rue. Quelques uns étaient occupés à ranger leurs étals pour rentrer. D'autres ayant encore affaire à des clients de dernière minute marchandaient chaque centime.

Une mystérieuse silhouette traversait le village sans que nul ne la remarque, sautant de toit en toit pour rester autant que possible dans le tapis de brouillard. Ses pas laissant des trous dans le voile de brume diaphane, Yuan Sunjie s'avançait en silence. Il se dirigeait vers la résidence d'un haut officier, car il nourrissait d'étranges ambitions qui lui auraient valu un châtiment inoubliable auprès de ses frères supérieurs, s'ils savaient ce qu'il était sur le point de commettre.

Yuan Sunjie imagina ce que lui vaudrait une telle punition pour cet acte, "Mille coups de rotins ? Le châtiment des orteils pendus ? La marche des génuflexions ? Les 'Belles d'encens' ?'' Il frissonna sans avoir froid pour chasser ces idées saugrenues, au moment même où il s'arrêta.

L'intrus avait rejoint le toit de la maison voisine de sa cible. Il jeta un regard circulaire pour tenter de scruter les alentours et la demeure. Très vite, Yuan Sunjie repéra des silhouettes, dont certaines armées qui couraient avec des torches et des lampes dans la cour. Après un rapide coup d'oeil, il devina l'endroit qui l'intéressait.

Ce qu'il était venu chercher se trouvait être un artefact d'une valeur inestimable, très rare et fort utile pour un rituel d'exorcisme. L'objet réputé d'une grande puissance avait été sculpté par un célèbre artiste du nom de Miao Fei. Calligraphe, cultivateur, poète, musicien et sculpteur célèbre ; sa légende et sa renommée l'élevaient au rang de génie. Chacune de ses œuvres valait, encore des siècles après sa mort : une véritable fortune. Même les plus simples objets qu'il avait créés pour un usage banal ou pour la cultivation étaient convoités tant par les cultivateurs que par des amateurs d'art et des collectionneurs.

La relique que Yuan Sunjie recherchait était rare et d'une grande beauté, bien que l'esthétique ne fût pas le but de départ. Elle avait été créée pour exorciser les esprits, mais malgré sa puissance, elle s'avéra fort peu pratique : elle ne fonctionnait qu'une fois tous les vingt ans et avait fini réduite au niveau de simple objet d'art.

L'artefact appartenait désormais à un haut fonctionnaire. Par ailleurs, cet homme était bien connu pour ses goûts de luxe et sa collection d'objets rares. Sa demeure fut même victime de plusieurs tentatives de vol à maintes reprises. Pas étonnant que Yuan Sunjie ait vu des silhouettes armées dans la cour. Elles étaient là pour garder et sans doute tuer.

Yuan Sunjie se murmura à demi convaincu, ''Je ne suis pas venu pour voler, mais emprunter !''

Aussitôt, il s'attacha les cheveux en une queue-de-cheval et se dissimula la moitié du visage avec un morceau de tissu foncé sur le nez et la bouche.

Yuan Sunjie n'avait plus grand-chose de comparable à l'allure qu'il avait depuis son départ du monastère. Son visage était désormais plus proche d'un bel adolescent que de l'enfant. Il ne se rasait plus la tête et ses cheveux avaient poussé pour son plus grand bonheur. Hélas, ils étaient encore trop courts pour pouvoir tous les tenir ensemble. Il laissa une poignée sur sa nuque, attacha ce qu'il pouvait attraper et réajusta son semblant de masque.

Cela faisait un moment que Yuan Sunjie suivait Shi Chang sur les routes du pays. Techniquement, Yuan Sunjie ne pratiquait pas la cultivation en tant que telle, mais il servait plutôt d'assistant à Shi Chang. Son maître, quant à lui, chassait les esprits Yao et les monstres Mo.

Yuan Sunjie termina mentalement de dessiner sa trajectoire. Il devrait traverser la cour pour se rapprocher du bâtiment principal et tenter de pénétrer à l'intérieur.

L'Éternité d'Une SecondeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant