Une année de printemps

Épilogue

J'étais assise au Café des Eclairs avec Andy, un sac posé au pied de mon fauteuil roulant. J'en avais encore besoin, mais plus pour longtemps. J'avais commencé à suivre une rééducation pour réapprendre à marcher. Après le spectacle, beaucoup de gens étaient venus nous dire qu'on avait très bien joué. Mais ce qui avait marqué mes parents n'était évidemment pas mon jeu d'actrice, mais le final auquel ils avaient assisté. Dès qu'ils avaient repris leurs esprits, ils avaient tout pris en charge. Personne n'avait jamais imaginé que j'arriverais un jour à marcher à nouveau. Aucun médecin n'a su nous l'expliquer, d'ailleurs. Quand mes parents ont raconté à mon oncle ce qui s'était passé, il a dit que c'était un miracle.

Marguerite, Baptiste, Anne, Nathan et Delphine entrèrent dans le café en parlant. Delphine vint s'asseoir à côté de moi et me demanda aussitôt :

-Alors, cette rééducation musculaire ?

-Ça se passe plutôt bien. Chaque fois que je marche j'ai envie de sauter de joie, mais les médecins m'ont fortement déconseillé de le faire, plaisantai-je.

-Je n'arrive toujours pas à réaliser ce qui s'est passé, avoua Marguerite. Tu étais en train de parler, j'étais à fond dans la pièce, et d'un coup je me suis dit « Mais attends...Sophie est debout, là ? ».

-Pareil pour moi, dit Anne avec un sourire. C'est incroyable, je n'arrive pas à croire que ça se soit produit sous nos yeux à tous.

-À part ça, la pièce était géniale, nous félicita Delphine. Vous n'avez pas eu un seul bafouillage, pas une seule hésitation. J'ai adoré ! Dommage que vous ne l'ayez joué qu'une seule fois. En même temps, je ne suis pas sûre que la mère de Sophie aurait supporté un deuxième coup de théâtre comme celui-là...

-Excellent jeu de mot, dit Andy en souriant.

-Elle est redevenue encore plus surprotectrice depuis que je me suis levée, dis-je en soupirant. Mais je la comprends, ça doit être un peu bouleversant. Du coup, je vais rester ici pendant toutes les vacances ! Mon oncle et mes grands-parents vont rester un moment je pense.

-Combien de temps peut durer ta rééducation ? demanda Baptiste.

-Je n'en sais rien, les médecins disent que ça dépend énormément de moi.

-Alors ça ne devrait pas prendre trop de temps, assura Andy.

Je lui souris et il me prit la main. Ce genre de geste ne me gênait plus à présent.

-J'ai des cadeaux pour vous, dis-je en m'adressant à tous mes amis. J'attendais que Nathan soit là aussi pour vous les donner.

Je pris le sac posé à côté de moi et je sortis des cadres enveloppés dans du papier bulle. J'en donnai un à chacun de mes amis. Baptiste fut le premier à ouvrir le sien.

-C'est nous tous ! s'exclama-t-il. Durant le pique-nique qu'on a fait pendant les vacances de printemps.

-J'aurais bien aimé que Koda puisse être sur la photo, dis-je à Delphine.

-Il sera sur celle de l'année prochaine, me dit-elle. C'est moi qui vous l'offrirai !

-Le cadre est magnifique, ajouta Anne. Je l'accrocherai dans ma chambre, comme ça vous serez toujours avec moi !

-C'est une idée géniale, on pourrait faire une photo de groupe tous les ans. On verrait notre évolution au fil des années, proposa Andy.

-Alors notre pique-nique durant les vacances de printemps doit être annuel, déclara Marguerite.

-J'ai aussi fait un album photo de mon année, ajoutai-je. Je l'ai amené pour vous le montrer...

Je sortis l'album de mon sac et je commençai à le feuilleter devant mes amis, qui faisaient des remarques pour chaque photo. La première était celle que j'avais prise avec mon téléphone à l'anniversaire de Marguerite. La qualité n'était donc pas très bonne, mais les photos d'après, prises avec mon appareil, étaient toutes très belles. Des photos de mon repas de famille à Noël, du nouvel an, de l'anniversaire d'Anne, du match de basket, de l'anniversaire surprise de mon père, de notre repas chez Andy, de mon anniversaire, de notre pique-nique, de l'arrivée de Koda, du pique-nique avec mon groupe de théâtre, et d'autres encore. J'avais des clichés de tous mes amis : Delphine embêtant Nathan, Anne et Marguerite riant ensemble, Baptiste et Andy se tirant dessus avec des pistolets à eau, Delphine essayant d'apprendre à Koda à ramener la balle qu'elle lui lançait, Marguerite et Baptiste s'enlaçant, Andy faisant une partie de cartes contre Anne en salle de permanence. J'avais aussi une photo de mon père et mon oncle ensemble, de ma mère et ma sœur en train de cuisiner, de Louise, Michel et ma sœur essayant de faire la « danse du lama » dans Kuzco, et des photos d'Andy et moi qu'Anne avait prises quand j'avais le dos tourné. Sur la première page de l'album, j'avais collé une photo de nous quatre au Café des Eclairs.