Chapitre 12 - Nathan

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Dans les jours qui suivirent, je ne reparlai pas de cette dispute avec mes parents. J'avais expliqué ce qui s'était passé à ma sœur, qui ne comprenait pas pourquoi je n'adressais plus la parole à ma mère, pourquoi celle-ci avait les yeux rouges en permanence, et pourquoi mon père n'ouvrait plus la bouche.

-Tu as vu tonton Géraud, alors ? me demanda-t-elle plus tard. Tu as de la chance...Il me manque à moi aussi, on s'amusait tellement bien avec lui !

-Oui. Il n'a pas beaucoup changé ! Toujours joyeux et dynamique... et il a toujours son chapeau !

-Ah, son chapeau, dit ma sœur en riant. Tu sais que c'est papa et moi qui le lui avions offert, le jour de ta naissance ?

-C'est vrai ? m'étonnai-je.

-Oui. En fait, on avait acheté ce chapeau pour son anniversaire au départ, mais on lui a donné en retard, parce-qu'il n'avait pas pu venir avant. Mais il est arrivé en courant quand il a appris que tu allais naître ! Et puis, après, pour choisir ton nom, papa et maman hésitaient entre « Sophie » et « Inès », alors il a inscrit les deux prénoms sur un bout de papier, les a mis dans ce chapeau et m'a fait tirer au sort dedans.

-Laisse-moi deviner...c'est tombé sur Sophie, c'est ça ? dis-je en souriant.

-Eh bien oui !

-Tu te rappelles encore de cette histoire ? Tu avais moins d'un an !

-Oui, mais papa m'a raconté cette anecdote plusieurs fois depuis, me répondit-elle avec un clin d'œil.

Le dimanche, je me sentais de plus en plus mal. Mon père m'avait dit la veille que ma mère ne voulait toujours pas aller voir mon oncle. C'était d'ailleurs les seuls mots que nous avions échangé depuis la scène de vendredi. Je ressentais le besoin irrépressible de parler à Anne, à Marguerite ou à Delphine, qui, je le savais, me soutiendraient et me réconforteraient. Mais je ne voulais pas leur envoyer un message déprimant alors qu'elles s'amusaient et qu'elles étaient en vacances toutes les trois.

Mais la personne avec qui je voulais le plus parler était Andy. Je ne savais pas pourquoi, mais j'étais sûre qu'il trouverait les mots dont j'avais besoin pour me remonter le moral. J'hésitais à lui envoyer un message pour lui demander si on pouvait se voir, mais chaque fois que j'allumais mon téléphone je finissais par renoncer, persuadée que je l'embêterais.

Je décidai finalement de sortir pour aller à la médiathèque, histoire de pouvoir me plonger dans des livres. Je préférais éviter le plus possible d'être à la maison, et je n'avais pas vraiment envie de me balader dehors par ce temps glacial.

Pourtant, loin de me divertir, les livres me paraissaient longs et ennuyants. Finalement, je finis par craquer, et je sortis mon téléphone. Je commençai à écrire un message à Andy, mais je l'effaçai, pour la énième fois. Je soupirai. Je devais vraiment apprendre à ne plus me poser autant de questions. Après tout, si ça le dérangeait de venir, il me le dirait. Et s'il était occupé, je lui proposerais de se voir à un autre moment. Je n'avais rien à perdre, et tout à gagner. Je repensai au jour où j'avais osé jouer le rôle de Marlène devant les autres élèves, au théâtre. Je ne m'étais pas posée de questions, à ce moment-là, et ça m'avait été bénéfique ! Ce souvenir me décida, et je tapai un message à Andy et l'envoyai immédiatement pour être sûre de ne pas changer d'avis.

Au bout de quelques minutes, mon téléphone vibra dans ma poche. Je le sortis directement et lus la réponse qu'il m'avait envoyée : Pas de problème, j'arrive.

Je souris. J'étais sûre qu'il viendrait. Soudain, je repensai à ce qu'il m'avait dit au début de l'année, qu'il était amoureux de Delphine. Sur le moment, ça m'avait plutôt surprise, mais maintenant je ressentais un drôle de pincement au cœur en y repensant. Comme si ça me faisait de la peine qu'il ait des sentiments pour elle. En réalisant cela, je me sentis saisie d'effroi : je n'étais pas jalouse, tout de même ? Cela voudrait dire que j'avais moi-même des sentiments pour Andy, et ça...c'était inenvisageable à mes yeux. J'avais déjà du mal à lui parler en tant normal, mais si je commençais à éprouver des choses pour lui, c'en serait fini de notre amitié : plus jamais je n'oserais ouvrir la bouche en sa présence.

Une année de printempsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant