Le trajet

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Bien sûr, Vivien était devenu tout rouge et n'avait pas réussi à aligner deux mots au moment où Roland avait enlevé son pull pour que sa chemise en dessous se relève, dévoilant son ventre quand ils attendaient de monter dans l'avion. Peut-être que la moitié des élèves l'avaient vu baver ainsi que les deux professeurs qui les avaient accompagnés. Il se haïssait d'être aussi épris du professeur d'italien. Il agissait comme une ado de 13 ans devant son crush plus âgé. Qu'est-ce qu'il aurait aimé se donner des claques.
Il était à présent dans l'avion qui n'avait toujours pas décollé, ils attendaient que les autres passagers embarquent. Là professeure assise à côté de Vivien semblait impatiente, quelque chose avait l'air de la tracasser. Elle regarda son téléphone une énième fois et souffla de soulagement avant de se tourner tout sourire vers Vivien qui paraissait perplexe.

« Cela vous dérange si je change de place avec Roland ? J'aimerais m'asseoir avec Christine. »

Vivien ne sût que répondre, il fixait Mme Lambert sans répondre. Il réalisa qu'il allait devoir passer une heure à côté de l'homme qu'il aimait secrètement, il fut soudainement stressé. Il examina la dame d'origine d'Asie de l'Est en face de lui, la bouche entrouverte.

« Bien sûr, ça m'est égal, finit-il par dire.

- Super, Christine lui a demandé et il est d'accord. À tout à l'heure.

- Oui... »

Elle se leva rapidement, prit ses affaires et rejoignit l'autre bout de l'avion à grande vitesse. Vivien était un peu surpris. Il rajusta son tee-shirt, passa une main dans ses cheveux, s'assura qu'il ne puait pas de la bouche et attendit patiemment Roland qui arriva quelques secondes plus tard, un énorme sourire scotché sur les lèvres. Ok.

« Elles sont inséparables, commença Vivien d'une voix aiguë qu'il venait de prendre soudainement en voyant la chemise de Roland beaucoup trop ouverte.

- Peut-être quelles sont ensemble ?! dit Roland en riant. »

Vivien se mit à rire à son tour, des petites rides se formaient aux coins de ses yeux quand il riait et Roland trouvait ça magnifique. Ce dernier s'assit à ses côtés et souffla tout en prenant un livre de son sac. En se penchant vers son sac à ses pieds, Vivien aperçut la nuque de Roland. Il s'ajusta dans son siège et pria pour que le vol soit rapide, être à côté de Roland était une pure torture mentale et physique. Chacun de ses gestes faisaient monter une chaleur dans le corps du professeur d'histoire et ses mots résonnaient alors en lui : "le premier amour ne s'oublie jamais". Pourquoi Roland lui avait dit cela, et en italien en plus ? Vivien se questionnait encore, mais il devait arrêter d'y penser, sinon le trajet serait encore plus long qu'il ne l'est, alors qu'il ne dure qu'une heure et quinze minutes.

L'avion commença à s'engager sur la piste et à se positionner pour décoller, Vivien se mit à inspirer et expirer, il était souvent stressé lors du décollage et de l'atterrissage. L'avion tremblait en avançant, et bien sûr ils étaient avec Ryanair, ce qui ne réconfortait pas le professeur d'histoire.

« Prends ma main. »

Vivien observa Roland qui lui souriait pour le réconforter. Soudain, il y eut une secousse qui fit sursauter Vivien qui attrapa fortement la main que le professeur d'italien lui tendait gentiment. Leurs mains s'agrippaient fermement, l'avion décolla petit à petit et pendant que leurs oreilles se mirent à siffler à cause de l'altitude, ils entrelacèrent leurs doigts. Il n'existait qu'eux au milieu de tous ces passagers, ils ne pensaient même pas à si les élèves pourraient les voir, leurs mains ne s'étaient pas enlacées de la sorte depuis un bon bout de temps. Roland caressait avec son pouce le dos de la main de Vivien. L'avion fut enfin au-dessus des nuages que l'on pouvait voir par les hublots. Il ne tremblait plus, tout allait pour le mieux et les passagers pouvaient aller aux toilettes. Vivien sortit sa main délicatement de l'emprise de celle de Roland et lui sourit en rougissant.



Le professeur d'italien était en grande conversation avec le chauffeur de bus qui devait emmener les élèves et les professeurs à l'hôtel qui leur étaient assigné. Vivien comprenait vaguement la langue et déchiffra que le chauffeur était actuellement en pause et qu'elle finirait à treize heures, une heure et demie après l'heure où ils étaient censés y être. Après des minutes de négociation, Roland lui glissa des billets en cachette qu'il prit en ricanant et en se moquant des Français.

« Tu n'étais pas obligé de faire ça, lui dit Vivien tandis que les élèves montaient dans le bus un par un et que les deux autres professeurs les comptaient.

- Ce n'est rien, assura Roland en évitant le regard de son collègue.

- Tu lui as donné combien ?

- Suffisamment pour qu'un Italien ne râle pas... allez, monte. »


L'hôtel était situé à côté de la ville, mais en quelques minutes à pied, ils pouvaient se rendre au centre sans problèmes. Les élèves sortirent du bus, émerveillés par l'hôtel qui possédait une entrée en arc avec une fontaine où des poissons multicolores nageaient. Les élèves s'étaient agglutinés autour de cette dernière, en essayant de toucher les animaux. Parfois les professeurs se demandaient quel âge ils avaient vraiment. Ils entrèrent dans l'hôtel qui possédait des pylônes en marbre, depuis quand le lycée pouvait prendre des chambres dans un hôtel comme celui-là ?! Roland fut celui qui fit toutes les démarches, il parlait avec toute l'équipe de l'hôtel, accompagnait de Mme Lambert, parce qu'elle avait appris l'italien pendant ses années au lycée. Tandis que Mme Durand et Vivien s'occupaient des élèves et essayaient de les faire rester calmes parce que l'heure du repas arrivait et une trentaine d'ados affamés étaient dangereux pour quatre adultes épuisés.

Après avoir réparti les élèves dans leurs chambres, les professeurs durent prendre les leurs. Et bien sûr que Mme Lambert et Mme Durand voulaient à tout prix prendre une chambre ensemble et qu'elles ne pouvaient pas prendre une chambre avec un Vivien ou Roland parce qu'elles avaient des maris et qu'ils étaient trop jeunes, comme s'ils avaient envie de faire quoi que ce soit avec elles. Alors ils se retrouvèrent tous les deux dans une chambre, dans un silence complet. Heureusement que les lits étaient séparés, qu'il n'y avait eu aucun problème avec cela. Ils sortirent les affaires de leurs valises, sans se parler. La chambre était blanche, tout était blanc et en bois. Un petit Jésus était accroché sur un des murs, épiant les deux professeurs. Bienvenu en Italie.

« Il est déjà midi passé, il faut amener les élèves au restaurant de l'hôtel, ils avaient l'air affamés.

- Oui, il faut le dire à Christine et Manon.

- Non, mais ces hétéros, franchement, ils ont peur de tout. Elles ont cru qu'on avait envie de... ? demanda Roland en riant.

- Normal, elles sont plus rassurées entre femmes. Les hétéros, quand une fille et un garçon sont proches, ils sont déjà mariés pour eux...

- Je pensais que ça se voyait que je ne suis pas attiré par les femmes.

- Je t'assure que non ! s'écria Vivien. J'ai entendu quelques élèves parler de toi et elles pensent toutes qu'elles auront une liaison interdite avec toi durant ce voyage. Pas toutes, mais un petit groupe.

- Sérieusement ?!

- Roland, tu fais tomber tout le monde sous ton charme. »

L'interpellé se prit un fou rire et s'allongea sur son lit en fixant le plafond, il ne croyait pas Vivien. Et s'il faisait tomber tout le monde, comme disait-il, est-ce qu'il le faisait tomber sous son charme aussi ? En tout cas, il l'espérait.













*NDA : Je suis déjà allée en Italie, notamment à Venise, mais jamais à Vérone, alors si vous connaissez la ville, les endroits, sachez que j'imagine juste, donc désolée si ce n'est pas représentatif. Merci, j'espère que cela vous a plu.*

Verlaine cherche RimbaudOù les histoires vivent. Découvrez maintenant