CHAPITRE II

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« Non... non... Non ! »

Les yeux révulsés et assombris par la peur, elle sembla fixer un point invisible dans cette salle obscure où peu de lumière filtrait à l'intérieur. Son corps tremblait violemment sous le poids de l'effroi. Elle ne comprenait pas. Qu'est-ce que c'était ? Qu'est-ce que ça faisait dans cette salle ? Cet être monstrueux l'observait de ses grands yeux globuleux blancs. Sa fourrure était épaisse et recouvrait presque la totalité de son visage. Elle avait une mâchoire énorme, entrouverte qui la laissait respirer de manière erratique et où de longs filets de baves s'en échappait pour s'écraser au sol. Ce monstre... Des sueurs froides coulaient le long de son visage alors qu'elle hurlait, encore et encore d'hystérie. Elle n'avait plus aucune notion du temps et ne savait donc pas depuis combien de temps elle faisait là.

Pourtant, rien ne se trouvait face à elle.

oOo

Cela faisait un mois. Un mois qu'elle était morte. Et lui ? Il errait dans sa fac. Il errait tel un fantôme dans les couloirs, livide. Il ne vivait plus depuis un mois. Il bougeait, respirait, mais plus rien n'avait d'importance. Il ne ressentait plus rien, à part cet amèrement goût de culpabilité et de rancœur dans le fond de sa gorge. Il ne parlait plus du tout au vert, la colère l'aveuglant bien trop encore. Il détestait toute cette situation. Il détestait qu'elle soit partie. Alors qu'elle avait vécue tant de chose, alors qu'elle s'était relevée tant de fois, il avait fallu qu'elle meurt de cette manière. Aussi héroïquement. Il grimaça à ce mot. Elle était morte en héroïne. Il devrait être fier d'elle. Fier de ce qu'elle avait fait. Mais non. Il était même en colère contre elle, contre tous ceux qui n'ont pas réussi à la sauver à temps, lui y compris. Quelle douce ironie. Elle lui manquait tant... Il ressentait son absence chaque jour. Il ressentait un vide en lui depuis un long mois. Il ressentait l'amertume de sa mort le noyer dans une mer de chagrin et de colère incontrôlable, déchaînée. Les dernière images qu'il avait d'elle étaient d'horribles images où il la voyait souffrir. Où il la voyait l'abandonner lentement. D'une horrible lenteur.

Son cœur était douloureux. Compressé dans sa poitrine à chaque respiration. Et pourtant, il n'était pas là. Il avait disparu en même temps qu'elle. Il s'était de nouveau glacé comme il l'avait été à un long moment de sa vie. Il voulait seulement la revoir. Il voulait seulement la reprendre dans ses bras. Il voulait simplement la sentir encore une fois contre lui, avec lui. Il voulait la voir respirer la vie. Sourire comme elle le faisait avec Mari, avec Mina, avec son père, avec lui. Il voulait simplement la revoir. Mais c'était trop demandé. Pourquoi cela lui arrivait à elle ? Elle n'aurait jamais dû mourir de cette façon, dans la souffrance. Elle n'aurait jamais dû mourir. Elle était la dernière personne qui méritait ça. Et pourquoi devait-il enduré ça ? Pourquoi ? Qu'avait-il bien pu faire de si mal pour devoir souffrir de cette façon.

Il se stoppa, dans un couloir, près d'une cage d'escalier. Il s'adossa à un mur et craqua. Il laissa des larmes silencieuses s'écouler le long de ses joues d'une pâleur mortelle. Il laissa le chagrin l'envahir un peu plus que la colère et s'écroula au sol. Personne ne le verrait de toutes façons. Il était seul. Alors il se laissa aller contre ce mur froid de béton. Il laissa écouler sa peine, ses yeux cachés par son avant-bras. Il ne pleurait pas souvent sa mort. Il ne pleurait pas assez sa mort. Il préférait crouler sous le travail que penser à elle. Ça faisait trop mal.

C'était comme si sa vie n'avait plus aucun sens. Il n'arrivait plus à écrire la suite de son histoire. Lorsqu'elle était là, il voyait un avenir, aussi incertain que possible. A présent, il ne trouvait plus aucun mot qui pourrait décrire l'endroit et la personne qu'il souhaiterait être dans un, deux, cinq ou dix ans. C'était comme si l'inspiration avait complètement disparu. Il ne trouvait plus aucune suite à son histoire, à son avenir. C'était le noir complet, le vide, aussi bien dans sa tête que dans son cœur. Plus rien ne comptait, et surtout pas demain.

Héros au Sens Propre [Tome 2]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant