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Jeudi 15 mars :

Trois jours. Cela fait désormais trois jours que je joue la bonne femme avec Leandro.

Cela se passe toujours de la même façon : il va "bosser", je reste à la maison pour faire un peu de ménage, et dès que 20h sonne, je me met au travail. Vers 21h30-22h, il rentre donc et retrouve son dîner, son bain, et son lit douillet tout prêts. Question conversations, rien de spécial. "Bonjour", "A ce soir", "Bonsoir", "Merci pour le bain", "Merci pour le repas", "Bonne nuit". Voilà, c'est tout simple. Il me touche parfois avant de dormir, mais sans qu'il n'y ai de pénétration. Et hier, il est rentré aux environs de 2h du matin, un peu saoule...ou même beaucoup, vu qu'il a passé une heure à parler dans le vide (c'est ce qui m'a réveillé). Je ne m'attendais vraiment pas à ce qu'il soit dans un tel état et, d'ailleurs, aujourd'hui aussi je ne m'attendais pas à ça...

"Passe-moi le sucre, bon sang.

- Oui, Madame."


La mère de Leandro est arrivée dans la matinée, quelques heures après le départ de son fils.

"Le sucre vanille, petite sotte ! Le sucre vanille !

- Oui, Madame.

- Quel genre de femme es-tu, bon sang ?

- Je suis désolée, Madame...

- Mon fils ne te portera jamais d'attention si tu continue à te comporter aussi sottement.

- Oui, Madame...

- Ne parle plus ! Ferme cet orifice qui te sers de bouche et va donc finir ton nettoyage."


Je m'incline devant elle et quitte la cuisine, pour aller sortir le linge de la machine à laver. Je ne pensais pas qu'elle serait aussi stricte et encore plus glaciale que son fils. A peine arrivée qu'elle me donnait déjà des ordres. J'étais encore dans mon lit quand elle s'est permise d'entrer (avec les doubles des clés) et de me réveiller en me jetant la lampe de chevet dessus. Oui, la lampe de chevet ! (Une chance pour elle qu'elle ne se soit pas cassée...) Après ça, elle s'est directement mise à faire un gâteau au chocolat, en me bramant des ordres par-ci, par-là, avant même que je ne puisse me changer. Et pour clore le tout, elle n'a pas arrêté d'aboyer ! "C'est quoi cette farine ? Où est le bicarbonate ? Comment ça, il n'y en a plus ? Va m'en chercher, vite ! Quoi, tu ne peux pas ? Comment oses-tu refuser, petite sotte ?! Va faire le ménage, petite sotte ! Et change-toi, petite sotte !" Une chance pour elle que je ne suis pas sa fille, je me serais déjà suicidée en l'emportant avec moi. Et puis, qu'est-ce qu'elle peut être casse-pieds avec ses "petite sotte", à croire qu'elle n'a que ça à la bouche.

"Camérière, viens ici !"


Camérière ? CAMERIERE ?! Mais elle est sérieuse, elle ! Je vais lui faire bouffer son...

"Oui, Madame ?"


Bon, d'accord, je lui ferais bouffer une autre fois. Je ne tiens pas à prendre de risque et à me faire tuer par son fiston chéri.

"Nettoie-moi ça !"


Je regarde à terre et remarque le grand bol de pâte renversé. Si elle croit que je vais m'agenouiller pour lui nettoyer sa merde....

"Oui, Madame."


Je m'empare d'un torchon sur la table, puis ramasse le bol et me mets à nettoyer le coulis. Je suis tellement stupide. Je ne fais que parler...et j'agis selon ses ordres...

"Que faites-tu, bon sang ?!

- Je nettoie...

- Tu nettoie ?! Tu te fou de moi ?! Amène-moi donc une serpillière !"


J'accoure chercher une serpillière au sous-sol et revient la minute d'après, essoufflée, pour la lui passer.

"Que...? Tu ne crois tout de même pas que c'est moi qui va nettoyer tout cela ?!

- Bah...vous me l'avez demandé alors...

- Petite sotte !"


Elle me gratifie alors d'une gifle aussi rapide que puissante, ce qui me fait trébucher sur le sol, glisser sur la flaque et tomber sur le sol, après m'être lourdement cognée sur le bord du plan de travail.

"Aiiiiie !!"


Mon dos me fais mal, mais le plus atroce, c'est ma tête...j'ai l'impression de...

"...du sang...

- Va donc me laver cette horreur, c'est dégoûtant. Et hâte-toi de nettoyer ce bordel. Bon sang, qu'est-ce qu'il lui a pris d'épouser une gourde comme toi !"


Je n'y crois pas...je n'y crois pas...je saigne, je suis blessée, et la seule chose qu'elle trouve à me dire c'est "va donc me laver cette horreur, c'est dégoûtant"...dégoûtant...dégoûtant...ce qui est le plus dégoûtant ici, c'est de voir qu'il existe bel et bien des gens comme elle, incapables d'aider les autres et de les considérer comme de quelconques humains...et puis, je suis la femme de son fils, elle devrait mieux se comporter avec moi...me respecter un peu plus que les autres...ou peut-être que, justement, il n'y a que moi qu'elle ne respecte pas, et avec qui elle se comporte aussi grossièrement...

"Pourquoi pleures-tu donc ?! Allé, lèves-toi !

- ...ça ma fait mal...

- Mets un bandage autour de ta tête et ça ira ! Allez, ouste !"


Je me lève alors, difficilement, et me dirige vers la salle-de-bain. Je ne peux même pas constater l'ampleur des dégâts, vu que je me suis blessée à l'arrière de la tête...

"Pourquoi...pourquoi...pourquoi, pourquoi, pourquoi, pourquoi....nnnngh"


Après ça, je m'effondre en larmes par terre et me mets à penser à ma famille...elle me manque tellement. Je ne l'ai pas vu depuis seulement 5 jours, mais j'ai l'impression que cela fait un éternité...Ma mère me manque...elle qui était toujours là pour me nourrir en période de faim, pour me réconforter lors des moments les plus tristes, les plus déprimants et les plus difficiles...et pour me soigner lorsque j'étais amochée...Et mes frères et sœurs...qu'en est-il d'eux ? Est-ce qu'ils vont bien ? Est-ce qu'ils étudient correctement ? Et l'argent ?! Est-ce qu'ils reçoivent de l'argent ?? Raaaaaah, ma tête !!! Elle me fait terriblement mal...il faut que je me calme...où sont les calmants ? Et ça, c'est quoi ?! Ah, du sirop...

Je ne suis tellement pas habituée aux médicaments que je laisse tomber ma recherche. Je vais plutôt mettre un bandage et le cacher avec mes cheveux. Il ne faut surtout pas que Leandro le remarque...

"Alors ? Tu te dépêches, oui ! J'ai besoin de finir mon gâteau, moi !"


Je sors de la salle-de-bain, sans même avoir terminé d'enrouler le bandeau autour de mon crâne.

"Je suis désolée...

- Allez, allez !!"


Je la suis alors jusqu'à la cuisine, où je reprends mon nettoyage, avec la serpillière cette fois-ci, pendant qu'elle reprend la préparation de son moelleux au chocolat.

Je sens que la journée va être longue...très longue.

*

Voilà votre chapitre long 👅😌

Entre nous deux quelqu'un doit souffrir Où les histoires vivent. Découvrez maintenant