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Ce jour-là, Leandro n'est pas venu me rendre visite, et l'envie de le voir et de me blottir contre lui, m'accabla encore plus. Je m'inquiétais pour lui, contrairement à Mira, qui avait discuté avec lui quelques heures plus tôt, alors qu'il était à Albuquerque. Elle tentait de me convaincre qu'il était surement coincé dans un bouchon.


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« Madame, vous êtes sure que ça va aller ?
- Oui, Mira...
- Reposez-vous un peu, tout de même.
- Je ne veux pas. Je veux juste voir Leandro et nous réconforter mutuellement...
- Monsieur aurait pu...
- Mira...il faut que je vous dise quelque chose...
- Je vous écoute, Madame.
- La fausse couche....c'est de ma faute...je stressais tellement que je ne mangeais plus correctement et dormais encore moins...
- Mais pourquoi donc ?
- Il est venu...Monsieur Turner...et il m'a assuré que je perdrais mon enfant si je ne reconvertissais pas Leandro dans le deal.
- Oh mon...
- Et je ne lui ai rien dis...il n'est nullement au courant de notre rencontre et de nos discussions...
- Mais alors...
- J'ai peur...je veux rentrer chez moi...je veux prendre Leandro dans mes bras et être rassurée, rassurée qu'il soit à mes côtés...vivant...nngh...j'ai tellement peur, tellement....tellement...
- Dieu du ciel, calmez-vous. Je suis sure qu'il ne lui ai rien arrivé. Ah, j'ai demandé à mon ami de vous amener vos chats ici, pour vous réconforter un peu. »

Je tourne la tête et aperçois l'ami de Mira, devant la porte, avec les trois chats dans ses bras. Abelino s'échappe en premier et accoure dans mon lit, avant de venir se frotter à moi. Et, alors que je tente de le prendre dans mes bras, celui-ci colle sa tête sur mon ventre, avant d'incliner ses oreilles, et de sembler abattu.

« Qu'est-ce que... »



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Les animaux sont des êtres-vivants stupéfiants. Ils ressentent toujours le bien et le mal, les discernent facilement, et saisissent nos sentiments et nos émotions avant que nous puissions nous-mêmes les comprendre. C'est ainsi que, ce jour-là, Abelino devina ma tristesse simplement en me frôlant le ventre. Il comprenait. Il savait que quelque chose avait disparu, puisqu'il la sentait comme que je la sentait avant sa perte.


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« Leandro n'est pas à la maison, je vais appeler son hôtel pour me renseigner sur l'heure de son départ.
- D'accord... »


Je n'arrive pas à me calmer. J'ai perdu mon enfant...

Il est vrai que je suis jeune et que j'ai toute la vie devant moi pour me rattraper et en concevoir d'autres, mais...qu'en est-il de mon futur ? Et ce rêve...le bourgeon, je l'ai perdu. Est-ce que sa branche compte se casser, elle aussi ? Non, impossible, Leandro ne me quittera jamais, jamais, jamais ! Et puis, Monsieur Turner a besoin de lui, pourquoi est-ce qu'il le tuerait ? Au contraire, il ne veut s'en prendre qu'à moi, puisque son but est de rendre Leandro malheureux. Il veut blesser Leandro et lui faire payer ses erreurs coûte que coûte, mais pas s'en débarrasser car, sinon, il ne lui sera plus d'aucune utilité et ne pourra pas l'aider à reprendre ses ventes de drogues...
Ahhh, j'ai mal...j'ai mal au cœur, comme s'il commençait à s'effriter...

« Madame, Monsieur est partit ce matin, après que je l'ai appelé. La maître d'hôtel m'a assuré l'avoir vu furtivement partir en voiture, après mon appel, sans même penser à prendre toutes ses affaires et en payant plus que ce qu'il leur devait.
- Ah...
- Ne vous inquiétez donc pas.
- Albuquerque...c'est à combien de temps d'ici ?
- Eh bien...Monsieur avait pour habitude d'y aller fréquemment, avant, et il prenait entre 7 et 8h, quand il ne roulait pas rapidement.
- Donc il devrait déjà être ici...Nous étions au marché aux alentours de 9h... »

Je tourne ma tête pour vérifier l'heure sur l'horloge au mur.

« ...Et il est environ 19h... »

Il est en retard d'environ 2h.

« Pensez-vous qu'il vienne à m'en haïr ?
- De quoi donc, Sandra ?
- Leandro...pensez-vous qu'il m'en veuille d'avoir p...p-p-perdu... »


Entre nous deux quelqu'un doit souffrir Où les histoires vivent. Découvrez maintenant