Tes yeux dans les miens

Chapitre 18

Il n'était pas allé jusqu'à la bibliothèque. Peut être que le Créateur même ne voulait pas qu'il y aille, vu le manque de chance que ça avait été : à deux minutes près, il aurait pût en ouvrir les portes, et confronter le bibliothécaire... Si ce dernier était encore là. Mais non, il avait fallut que ce gringalet en livré jaune le rattrape, lui et HoSeok, et leur dise qu'ils étaient attendu de toute urgence en salle d'audience.

Bien. Merveilleux. Splendide.

Mais ça n'était pas ça qui l'empêcherait d'y passer après tout ça ! Maintenant qu'HoSeok avait attiré son attention avec son comportement suspect, il n'allait pas lâcher l'affaire de sitôt. Tout ça n'était qu'un simple contretemps. Et même s'il était très contrariant, ça n'était pas grave. Il finirait bien par avoir ses réponses

En arrivant sur place, après cinq bonnes minutes de marche rapide, presque trottinante, TaeHyung fut surpris : l'immense salle du trône était vide. Enfin, pas entièrement vide, bien sûr... les rangées de gardes étaient toujours là, avec leurs lances fermement plantés dans le sol. Mais les nobles, cette marée de gris perturbant, avaient désertés les lieux. Avec appréhension, TaeHyung s'avança vers le trône, ou plutôt les deux trône, où siégeaient la reine et JiMin. Leurs visages étaient impassibles, un véritable masque de marbre qui les rendaient effrayant. Il déglutit, pas rassuré pour un sous.

Là, la reine n'avait plus rien à voir avec la femme qui souriait comme une enfant. De même, JiMin n'était plus son fiancé doux et gentil, qui hésitait à lui prendre la main et lui demandait avant de l'embrasser. Il n'était plus timide, il n'était plus JiMin. Il était le Roi, celui dont les yeux verts aux milles nuances fascinent autant qu'ils inspirent la crainte.

HoSeok désigna à TaeHyung le côté du siège de JiMin, et le jeune vert remarqua à ce moment que le consort se tenait debout, à côté de la reine. Il se plaça de la même façon, à peut être à une dizaine de centimètres de son fiancé, mais celui ci ne lui accorda aucun regard. Pas même du coin de l'œil. Il semblait aussi figé qu'une statue.

Et alors, les lourdes portes à une cinquantaine de mètres d'eux se rouvrir dans un chuintement menaçant, et deux gardes s'avancèrent, escortant un homme.

Ses habits étaient sales. Même de sa position, TaeHyung pouvait le voir, mais lorsque l'odeur arriva à son nez, pour accompagner le reste de la pathétique image, il plissa le nez. JiMin se repositionna sur son siège, et TaeHyung reprit une mine impassible. Les imiter. Il devait les imiter. Un roi ne montre pas ses émotions.

Les gardes s'arrêtèrent à quelques mètres des trônes jumeaux, et TaeHyung pût inspecter plus en détail le prisonnier. Il allait pieds nus, sûrement pas par choix, et ses habits avaient dût être chics un jour. C'était ce qu'ils dégageait : un chic tapageur, trop visible pour être naturel. Pourtant, à présent, ses bas de soies étaient gris, ses cheveux sales et sa culotte trouée. Il sembla même à TaeHyung apercevoir une tache, mais il préféra ne pas s'avancer là dessus. Et ne pas imaginer ce que cette tache pouvait être, sueur, sang ou urine... il ne savait ce qui lui semblait pire.

« Alain Troulet, vous comparaissez aujourd'hui devant nos altesses royales pour une affaire de trafic de lentilles. Après avoir reçut votre jugement, vous en avez demandé un second, exercé par la plus haute autorité. Maintenant qu'elle est devant vous, qu'avez-vous à lui dire pour votre défense ?

La jeune héraut était là, presque invisible tant elle était petite, mais sa voix fluette portait toujours autant.

Le prisonnier renifla, visiblement inquiet.

- Vos altesses royales, vous devez me pardonner... Le peuple a besoin d'espoir, et c'est ce que je vends... Je ne veux pas faire le mal, simplement donner aux pauvres gens l'occasion d'expérimenter un jour la vie d'un autre ! Il est bien plus facile d'entrer aux bains publics avec des yeux comme les votre qu'avec des yeux comme les miens, geignit-il misérablement.