20 minutes. 20 longues minutes où ma respiration ne cesse d'augmenter. Où mon corps devient incontrôlable. Où mon cerveau décide d'être inactif. Je suis incapable de me calmer, pleurant, paniquant. Ce n'est qu'avec le temps où je commence à reprendre mes esprits, où je commence à comprendre ce qu'il se passe autour de moi. Je suis dans la cuisine, assise sur le sol, seule, dans une immense maison. Seule face à la vie, seule face à mon désespoir. Je reste ainsi de nombreuses minutes, ne bougeant pas, ne réfléchissant pas, simplement regardant droit devant moi. Antoine n'est pas à la maison. Je lui cache énormément de choses, ne voulant pas l'inquiéter et mon corps réagit différemment lorsqu'il est présent. C'est comme si il souhaitait dissimuler toutes mes émotions, tout ce que je pourrais ressentir au fur et à mesure dans une journée. Quand il est là, je suis vide. Aussi vide qu'habituellement mais autrement. Il ne fait aucune crise, aucun geste qui pourrait trahir mon mal-être quotidien mais lorsque je suis seule dans une pièce ou dans toute la maison, il rattrape son retard, faisant des crises à outrance, sans avoir le temps de réagir, sans avoir le contrôle. Depuis le décès de Margot, je ne vis plus. Les médecins pourraient enlever mon cœur de mon corps, je ne ressentirais rien. Même pas de la peine, même pas la mort qui approche. Comment vivre correctement après une perte comme celle-ci ? Margot m'a déçu. Elle m'a trahi. J'étais énervée contre elle, comme jamais. Dans ma tête, tout était clair : je n'allais plus jamais la revoir parce qu'il était impossible pour moi de lui pardonner. Impossible pour moi de passer au dessus de ses actes. Les mensonges étaient petits face à ça. Je pouvais passer au dessus. Je pouvais comprendre ses mensonges, sa double vie. Je pouvais comprendre énormément de choses mais cette trahison, son acte répugnant, c'était au dessus de mes forces. Même le temps n'aurait rien arrangé. Le pardon était inenvisageable. Mais tout était différent. Je ne lui parlais pas mais elle était là. Elle était toujours vivante. Elle pouvait changer de vie, courir, rire, être quelqu'un de meilleure mais ce n'est plus le cas. Je ne pourrais plus jamais entendre sa voix. Je ne pourrais plus jamais ressentir ce qu'elle éprouve, même loin de moi. Je me sens perdue. Je me sens inutile.
Deux heures sont passées. Je me retrouve dans la salle de bain, sous la douche. C'est à ce moment là où tout le monde prend le temps de réfléchir, de se poser les bonnes questions, de faire un point sur sa vie, sur son avenir, comme si l'eau chaude qui coule sur notre peau avait un sens à tout ça. C'est comme si l'eau chaude m'apaisait, comme si la chaleur sur ma peau m'aidait pour la suite. Je reste ainsi de très longues minutes pendant qu'Antoine prépare à manger. Lorsque je décide de sortir, mes pensées ne peuvent s'empêcher de s'orienter vers Margot, vers tout ce qui la concerne, me coupant ma respiration, m'empêchant de respirer comme il le faudrait. Une serviette autour de moi afin de me réchauffer, les battements de mon cœur s'intensifie, s'accélérant au fil des secondes. La chaleur de mon corps augmente, me faisant transpirer à grosse goutte. J'essaie de me contrôler, de me concentrer afin que cela s'arrête mais mon cerveau ne réagit pas, continuant cette panique. Assise dans la salle de bain, tout s'aggrave. Mon ouïe se brouille, rendant cette maison sans bruit, comme si il n'y avait aucun son, aucune vie sans cette demeure, ce qui n'est pas le cas. Je n'entends plus, à croire que je suis devenue sourde. Mon odorat ne détecte plus aucun odeur, ce qui est impensable normalement. J'ai un excellent odorat, pouvant sortir n'importe quoi, d'autant plus qu'Antoine est en train de cuisiner, même si je ne suis pas dans la même pièce que lui, je devrais sentir quelque chose, même infime mais non, rien. Ma vue devient flou, comme si je devenais myope en une fraction de seconde. Je ne vois plus rien, tout devient noir comme mon cœur. Mon corps tremble, comme si j'avais froid, comme si j'étais dehors, sous la neige alors que des bouffés de chaleur ne cessent de me parcourir. C'est comme si je devenais une personne âgée, aux nombreuses maladies, ne sachant comment affronter la vie, ne sachant comment combattre pour survivre. Je pars dans une autre dimension. Mon esprit est ailleurs. Mon cerveau s'est déconnecté avec le monde, avec tout ce qui l'entoure. C'est comme si je n'existais plus. Comme si mon cerveau avait subitement changé de crâne pour se loger. Les minutes passent et mon état s'aggrave. Je suis incapable de me concentrer. Incapable de revenir à moi, de parler, de crier. Seuls des larmes coulent. Seule ma tristesse et ma panique sont présentes.

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Pardonne-moi.
FanfictionManon Maltais. Antoine Griezmann. Margot Maltais. Deux sœurs jumelles que tout oppose.