Deux heures. Deux heures que je suis installée dans cette cage. Une cage qui doit être probablement nettoyé une fois par mois, si ce n'est pas moins si j'en crois l'état de celle-ci. De la poussière partout, un banc en béton, sans aucun coussin, sans aucun confort. Personne n'est avec moi et d'un côté, je me dis que ce n'est pas plus mal. Je n'aurais pas aimé partagé cette cellule, ayant peur de tomber sur une personne mal intentionnée. Certaines femmes se font malheureusement violées en garde à vue. C'est choquant mais c'est possible dans le sens où nous ne sommes pas toujours sous surveillance. Une personne se trouve bien à l'accueil, afin de réceptionner ceux qui viennent porter plainte, ceux qui veulent des renseignements et par la même occasion, cette personne doit également jeté un coup d'eux sur cette cage mais ce n'est pas aussi simple. Parfois, le standardiste discute avec ses collègues, s'éloignent de son poste pour une raison inconnue, étant dans l'incapacité de surveiller ce lieu si obscur. Cela fait froid dans le dos. C'est sûrement aussi pour cette raison qu'aucun objet n'est autorisé à l'intérieur. Peur de blesser, de tuer ou de trafiquer diverses choses. Je sais qu'un policier va bientôt venir me chercher afin de m'emmener dans la cellule où je vais devoir y rester pendant un long moment. Normalement, c'est à ce moment-là où je dois paniquer mais je suis plutôt sereine. Je ne dirais pas être ravie de cette nouvelle mais apaisée. Je sais que je le mérite. Je sais que c'est la meilleure solution pour avancer, pour tourner cette page. Les prochaines années de ma vie vont désormais être extrêmement compliqué mais si ce secret avait été gardé, je n'aurais pas survécu. Je n'aurais tout simplement pas pu continuer de vivre en n'étant pas jugé. J'ai commis un crime. Je l'assume même si c'est grave et non voulu. Ma place est ici et pas ailleurs. Comment pourrais-je vouloir être ailleurs après ce qu'il s'est passé ?
Je vois les allers-venus de quelques personnes. Certains arrivent afin de signaler un vol, d'autres pour des renseignements. Il y a même eu un scandale d'un jeune, refusant d'avouer ses torts, obligeant un commandant de venir l'interroger dans une pièce à part. C'est sûrement malsain de ma part d'écouter toutes les discussions, de vouloir connaître la raison de chaque personne qui entre dans ce commissariat mais cela m'occupe. Je ne cherche pas à tout savoir des autres, à être aussi curieuse qu'une concierge, comme dans les immeubles autrefois où la gardienne tendait l'oreille à chaque personne qu'elle pouvait croiser, je cherche simplement à faire passer le temps. Je cherche à penser à autre chose, à m'occuper des problèmes d'inconnus plutôt que de me concentrer sur les miens. C'est égoïste de ma part, peut-être même méchant de m'intéresser au malheur des autres mais je pense qu'il est nécessaire dans ces moments-là de ressentir son côté cruel, sans pitié. Ça aide en quelques sortes à ne pas perdre pied, à ne pas se morfondre. J'ignore comment font les autres, ceux qui vont dans cette cage pendant 48 heures, voir plus. Ceux qui y entrent souvent parce qu'ils ne cessent d'être suspecté.
Baissant la tête, fixant ce sol en piteux état, je me pose des questions. Vais-je m'en sortir ? Comment vais-je faire ? Comment vais-je tenir ? Comment font toutes ses personnes qui sont condamnées pour la première fois ? Comment font-ils pour survivre ? Pour ne pas craquer ? Je n'aurais jamais imaginé ma vie ainsi. Je n'aurais jamais cru être en garde à vue et je n'aurais encore moins cru être un jour en prison. L'odeur de cette prison me donne envie de vomir. Cette senteur est spéciale. De la transpiration mélangée à plusieurs parfums mais pas que. Il y a comme un arrière goût amer dans celle-ci. Comme si mon malheur, ma tristesse et ma honte avaient une odeur et qu'elles étaient incorporées avec, me rendant encore plus mal que je ne le suis. Ma vision me joue des tours. Je ne suis pas en train de perdre la tête, d'avoir le tournis ou d'être malade mais en arrivant au commissariat, je me suis sentie bien. Les policiers avaient l'air d'être accueillants même en étant occupé. L'endroit en lui-même était chaleureux, ce qui est étrange. Généralement, lorsqu'une personne entre dans un commissariat, l'ambiance qui s'y trouve est différente de l'extérieur. C'est comme si c'était un autre monde, une autre planète. L'atmosphère étant plus douloureuse dans un sens, rappelant des souvenirs d'un agression, d'un vol, d'un meurtre ou d'une autre situation qu'il valait mieux éviter. Mais depuis que je me trouve dans cette cage, assise sur un banc en béton, je vois les choses autrement. Je vois le personnel discuter en pause depuis bien trop longtemps, la peinture des murs qui commence à s'écailler, le sol avec ses tâches de café mais aussi, certains meubles ayant pris des coups de pied. Cet endroit a un vécu, a un passé. Il raconte des centaines d'histoires, des centaines de témoignages. Je les ressens à présent, comme si je les avais toutes vécues, toutes entendues. Je ressens la tristesse des victimes, la colère des coupables et la peur de certaines personnes. Je vois les choses autrement, d'une manière que je ne connaissais pas. Comme si je découvrais le monde, comme si je percevais une autre vision de la vie. Tout n'est pas rose. Tout n'est pas positif. Tout n'est pas joyeux. Je le savais déjà par le biais de mon métier, avec les patients qui ont parfois des maladies incurables, des vies détruites mais là, c'est différent. La maladie n'est pas présente. Certaines femmes se font violer. Certains hommes se font accuser à tort. D'autres femmes assassinent. D'autres hommes abandonnent leurs animaux de compagnie. Tellement de raisons d'être ici. Parfois, la raison est accidentelle, comme moi. Ne voulant pas tuer, ne voulant pas commettre un acte grave mais d'autres fois, c'est volontaire. Les coupables préparent tout : la date, l'heure, le lieu. Les coupables peuvent aussi être spontanés, agir sur un coup de tête, ne réfléchissant pas aux conséquences, ne pensant pas à ce qui est grave, à ce qui est mal.

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Pardonne-moi.
FanfictionManon Maltais. Antoine Griezmann. Margot Maltais. Deux sœurs jumelles que tout oppose.