Chapitre 7 - Les Gardiens

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Je fus surprise de constater que, malgré mes réticences à m'intégrer à un groupe d'hommes et de femmes dont je ne savais pas grand-chose, je pris rapidement mes habitudes parmi cette étrange communauté. Nos journées dans la Fosse étaient bien réglées, grâce au sens de l'organisation indéniable de Bo et à la facilité avec laquelle il parvenait à se faire entendre de tous. Il n'y avait pas d'élément perturbateur dans son clan, aucune forte tête pour contester ses décisions qui, il fallait l'admettre, étaient pleines de bon sens. Chacun trouvait sa place et entretenait des relations convenables avec les autres, ce qui était plutôt rassurant. Même le mystérieux Kyle, qui me fascinait toujours autant mais dont j'avais parfois un peu peur, tant il me paraissait grave et sévère pour son âge, ne haussait jamais le ton contre qui que ce soit. Il semblait prendre son rôle de« Gardien » très au sérieux comme si, finalement, il était uniquement fait pou cela. Les deux autres Gardiens, Lexie –une grande et athlétique jeune femme brune aux allures de guerrière– et Liam – un homme aux longs cheveux roux, barbu, les yeux d'un bleu limpide et la carrure solide – avaient l'air de prendre eux aussi cette tâche très à cœur. Ils s'entraînaient avec une rigueur quasi militaire, apprenaient aux autres membres du groupe des techniques efficaces pour se défendre et se relayaient soit pour surveiller notre refuge souterrain, soit pour aider Bo à « faire le ménage » dans les vieilles galeries désaffectées. C'étaient l'expression qu'ils utilisaient lorsqu'ils voulaient parler du travail de consolidation et de rénovation de l'antique charpente, faite du bois fatigué venu jadis de l'Ancien Monde et de poutres de métal rouillées, qui essayait envers et contre tout de maintenir en place ce réseau minier à l'abandon.

Pendant qu'ils s'attelaient à ces tâches complexes, les autres membres du clan cherchaient des larves de ver, s'occupaient des enfants – deux d'entre eux, Luke et Mia, âgé respectivement de quatre et deux ans, étaient ceux de Bo et de sa compagne, les trois autres étant des orphelins dont l'un, Elias, n'était encore qu'un minuscule et fragile bébé –préparaient les repas ou confectionnaient des choses utiles avec ce qu'ils pouvaient récupérer dans les recoins encore inexplorés de notre prison souterraine. Et puis, bien sûr, il y avait les séances d'entraînement. Lorsque les Gardiens leur montraient comment se battre, au cas où les Autres, ces horribles cannibales que tous redoutaient, réussiraient un jour à pénétrer dans l'enceinte du village ou bien leur sauteraient tout simplement dessus au détour d'une galerie obscure. Si j'en croyais les dires du vieux Morris, c'était exactement ce qui était arrivé aux parents du petit Elias.


À la fin de notre première semaine d'adaptation au sein de la communauté, Bo nous fit convoquer, Max et moi, afin de définir le rôle exact que nous allions devoir jouer ici. Il souhaitait, par la même occasion, que nous rencontrions l'équipe complète des Gardiens, cet espèce de groupe d'élite dont chaque membre, tout comme nous, possédait le don. Je devinais sans difficulté que notre nouvel ami désirait en fait nous intégrer à eux, parce que nous composerions ainsi une petite mais puissante armée, nos pouvoirs combinés devenant un atout important pour la reconquête de notre liberté. Une liberté qui me paraissait toujours aussi impossible à retrouver, la pensée même que Bo et ses compagnons puissent envisager une seule minute que l'on pouvait mettre en place un mouvement de révolte m'effrayant bien davantage qu'elle ne me séduisait.

Nous nous étions donc retrouvés assis côte à côte dans la salle commune, là où nous prenions désormais tous nos repas, avec les quatre Gardiens et le bienveillant colosse en face de nous qui nous observaient en silence. Tandis qu'ils nous dévisageaient, j'avais la curieuse impression d'être soumise à un examen important, devant un jury d'experts extrêmement sérieux. Même Bo, qui était d'un naturel plutôt jovial, affichait un air bien plus grave que d'ordinaire.

— Ash, Maximus..., commençat-il de sa belle voix chaude et, malgré tout, rassurante. Je suppose que vous avez déjà une petite idée de la raison pour laquelle je vous ai demandé de venir ici. Je vous l'avais dit, dès notre première rencontre : votre don nous sera utile. Il est temps de vous en servir pour nous aider.

Ash Donovan et les Porteurs de Lumière - Tome 1 - Les Rampants et les ErrantsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant