Un an plus tard.
An 2883, durant les conflits opposant Merildis et Karianis.
Ils s'étaient battus jusqu'au bout. Beaucoup avaient perdu espoir, mais restaient décidés à ne pas abandonner ceux qui ne pouvaient pas participer aux combats. Au moins, ils allaient pouvoir leur faire gagner un peu de temps ; cela leur permettrait de regagner les montagnes à l'est pour s'y cacher.
Au départ, lorsque les armées de Merildis avaient lancé les premières offensives sur leurs villages, les habitants de Karianis s'attendaient à ce que le roi des rois, Keder, leur envoie une armée afin de repousser l'agresseur. Ces assauts étaient illégaux ; Merildis n'avait aucune raison de les attaquer. Mais le roi Keder n'en avait que faire de ces chamailleries entre voisins. Pour lui qui dirigeait une planète toute entière, ce début de guerre revenait à une simple querelle de voisinage ; pas grand chose face à la menace d'un envahisseur venant d'un monde au delà des étoiles.
Sur Oberiande la technologie n'avait pas atteint le niveau moyen de la plupart des systèmes voisins. La grande majorité des habitants vivait sans énergie. Il existait bien des transports magnétiques ; mais seule, Adalgon, la capitale, avait suffisamment de moyens pour s'en procurer. Les habitants d'Oberiande étaient loin d'avoir une maîtrise parfaite de l'approvisionnement de ressources naturelles. Cela ne faisait qu'une quinzaine d'années que les habitants de la planète avaient mis au point un système d'eau courante. Malgré cela, tous les territoires ne disposaient pas forcément d'un réseau complet.
Karianis, considéré comme l'un des territoires les plus pauvres de la planète, n'avait qu'un système très sommaire de distribution de l'eau. La majorité des habitants vivaient de l'élevage de bétail et de cultures maraîchères. L'eau leur servait principalement pour l'irrigation, et encore, ils avaient tendance à économiser au maximum leurs ressources. Malgré tout, leurs produits étaient souvent très recherchés sur tout Oberiande. Ils vivaient sur une terre riche et fertile, traversée par de nombreuses rivières, ce qui leur permettait de cultiver une grande variété d'épices, de légumes et de fruits. Les karianis étaient vus comme un peuple en harmonie avec la nature, pacifique et généreux avec leur voisins.
C'était aussi le royaume qui possédait la plus petite armée. Si on pouvait appeler ça une armée.
Contrairement à la majorité des autres pays, les karianis ne croyaient pas aux démons ou aux sorciers. En effet, Oberiande était, malheureusement, envahie par des marchands de peur, contaminant la planète avec leurs superstitions. Depuis la guerre des Tungs et des Ragens, les habitants de cette planète étaient encore plus terrifiés et inquiets. Ils n'aimaient pas les personnes différentes, en particuliers les elysiens. Si dans de rares royaumes, ils étaient élevés au rang de prêtres ou de shamans, dans tous les autres, ils étaient exécutés : brûlés vifs.
Même sur les territoires, aux premiers abords tolérants, il était difficile de se faire accepter en tant qu'elysien. Ceux qui avaient réussi à accéder à un rang important se méfiaient des autres, craignant de se faire remplacer. Et il existait toujours des moyens assez simples et discrets pour se débarrasser de ceux qui dérangeaient.
Les gens avaient peur d'eux. Ils disaient souvent qu'il y en avait de plus en plus. Que les elysiens allaient finir par les envahir, et que les humains finiraient par disparaître. Les elysiens étaient bien trop souvent associés aux Ragens. Ces derniers étaient des assassins, descendus sur Oberiande dans des appareils gigantesques.
Karianis n'était pas atteint par cette folie meurtrière. Ses habitants avaient autre chose à faire que de se préoccuper de la paranoïa d'extrémistes qui gangrenaient la planète de leurs idées accusatrices. La guerre avec les envahisseurs venus de l'espace était terminée. Il était stupide d'en commencer une autre avec un pays voisin ; un pays du même monde.
Merildis voyait tout cela d'un autre œil. Sans que quiconque ne comprenne ce qu'il se passe, ce royaume avait, un jour, attaqué les villages frontaliers entre leurs deux pays. Progressivement, l'armée avait évolué à travers les terres karianies. Ces troupes efficacement équipées et rompues aux arts de la guerre, ne rencontraient pas beaucoup de résistances. Les officiers ennemis savaient qu'envahir Karianis ne leur poserait pas beaucoup de problèmes. Pour le roi Elderion de Merildis, c'était même une certitude. Sauf qu'Elderion était beaucoup trop sûr de lui.
Personne ne s'attendait à ce que cette armée ne soit en difficulté face au groupe qui s'était constitué à Nelmas. Nelmas n'était pourtant qu'un village de paysans comme tous les autres.
Mais c'était aussi le lieu où s'étaient réunis les survivants des attaques précédentes et les meilleurs défenseurs du pays. À cela se rajoutaient les habitants eux-mêmes prêts à se battre ; ils n'avaient qu'un minimum d'entraînement sommaire aux armes, mais leur nombre fit la différence. C'est la résistance de Nelmas qui donna du fil à retordre à l'armée de Merildis.
Bientôt des noms résonnèrent sur les champs de bataille ; le noms des combattants qui se démarquaient des autres. L'un d'entre eux, était le commandant de la Garde de Karianis : Kal Shino ; il y avait aussi Jill Layl, cheffe de Nelmas, qui se révéla être une véritable guerrière, et protectrice du peuple.
Alors qu'ils avaient fini par impressionner les merildis, ces derniers avaient décidé de les prendre au sérieux. Aussi, Elderion de Merildis n'était pas un superstitieux effrayé par les histoires qu'on racontait sur les elysiens. En réalité, il éprouvait une certaine fascination pour ces êtres. Ce qui se révéla être une aubaine pour eux comme pour lui. Car les elysiens de Merildis étaient formés et devenaient de véritables sorciers guerriers. C'est l'un d'eux qui fut envoyé soutenir les forces armées à Nelmas. Le royaume de Merildis était persuadé qu'avec un tel pouvoir, la résistance ne tiendrait plus longtemps.
Sauf qu'il leur était impossible de prévoir le futur. Finalement, la venue de ce sorcier n'eut pour effet que de démarquer un autre des héros de la résistance. Un fermier devenu un soldat par la force des choses. Ce n'était qu'un garçon qui haïssait la violence par dessus tout. Comme pour tout le monde, cette guerre lui prenait tout : sa famille, ses amis, les habitants de son village. Merildis détruisait tout.
Il avait apprit à se battre contre sa volonté. Mais avait fini par combattre avec toute sa rage. Les armes de guerre le répugnaient, alors qu'on finit par le considérer comme un expert. Il perdait tout, et avait peur de se perdre lui-même. Il ne pouvait pas se le permettre. Après la mort des deux leaders qu'étaient Kal et Jill, les membres restants de la résistance comptaient sur lui. Jill l'avait vu grandir et savait qu'il ferait tout pour protéger les habitants de Karianis. Kal ne l'avait rencontré qu'un an auparavant, mais il l'avait vu passer de fermier à soldat, d'innocent à guerrier. Ils avaient appris à se connaître. De la méfiance qu'il y avait au départ – parce que Reid ne faisait pas confiance à quiconque portait une arme, à une profonde amitié qui au final les avaient rendus inséparables. Ce n'est qu'à la fin, qu'ils s'avouèrent l'un à l'autre leur amour.
Kal était parti. Il avait fait promettre à Reid de ne pas le suivre, et de vivre. Il devait vivre, se battre, jusqu'au bout, et en finir, une bonne fois pour toute. Mais Reid s'était senti si vide. Il n'avait plus rien. Il ne voulait plus rien. Il ne savait plus rien. Les personnes qu'il aimait le plus au monde n'étaient plus. Il n'y avait plus que lui, Sylvia, et quelques autres résistants.
Ces derniers furent ceux qui le poussèrent à se relever. Surtout Sylvia, en lui rappelant la promesse qu'il avait faite, avant d'ajouter : « Lève-toi, vis, et bats-toi ». Sans savoir pourquoi, c'est à ce moment-là qu'il se remémora un rêve qu'il avait fait, environ un an auparavant. Et le vide, fut alors comblé par une fureur vengeresse. Il était décidé. Il ne s'arrêterait pas seulement une fois qu'il aurait libéré Nelmas ; parce qu'il savait que Nelmas serait libérée ; ce n'était pas une option. La résistance allait rendre leur liberté à tous les habitants des villages de Karianis, ils allaient se renforcer, et réduire l'armée de Merildis à néant.
Ensuite, il allait leur falloir s'attaquer à la source du problème : la famille royale de Merildis. Ceux qui voulaient ces terres. Reid, allait personnellement s'occuper d'au moins l'un d'entre-eux. C'était ce qu'il était devenu. C'est ce qu'ils l'avaient fait devenir.
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Elysians : L'Héritage des Étoiles
FantasiLes elysiens sont craints et rejetés. Leur différence pousse à la méfiance, voire à la haine. D'ailleurs, ne ressemblent-ils pas à ces envahisseurs venus d'autres mondes ? Reid, lui, est devenu ce qu'il redoutait par-dessus tout ; un guerrier, un as...