Chapitre dix-sept :

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« On va où ? » demanda Livaï Ackerman tout en tendant la main vers sa ceinture de sécurité.

Eren lui saisit le menton et captura sa bouche dans un baiser lent qui lui fit oublier le reste du monde.

« Bonjour. » murmura-t-il en relevant la tête.

Le noiraud resta figé sur son siège, le sourire aux lèvres pendant que le brun démarrait et sortait du parking. Ils avaient communiqué par messages tous ces derniers jours mais Eren lui avait manqué à un point inquiétant. Il boucla sa ceinture.

« Y'a un immeuble abandonné sur l'autre rive. »

Un petit air de printemps flottait dans l'air. Le ciel était dégagé, et pour la première fois de l'année la température dépassait les dix degrés. L'homme plus âgé jeta un coup d'œil à la banquette arrière et aperçut deux sacs contenant du matériel photo.

« Depuis quand tu fais de la photo ? »

Eren haussa les épaules.

« J'ai commencé au collège quand on m'a offert mon tout premier appareil photo numérique avec une petite lentille réglable... »

Il lança un rapide regard à l'homme à côté.

« Je suivais une spécialisation en photographie mais j'ai dû l'arrêter faute d'argent. »

« C'est donc à ce moment-là que tu as commencé à bosser comme escort ? »

« Ouais. »

Le ton était bref, cassant. Livaï posa la main sur sa cuisse. Comme si ce contact l'avait brûlé, Eren tourna la tête vers lui d'un mouvement brusque avant de ramener son attention sur la route. Il ne retira pas sa main. Il avait envie de le toucher.

« Je n'imagine pas faire ce choix. » avoua-t-il.

S'engager dans l'armée lui avait sauvé la vie quand il était plus jeune. Il y avait trouvé un cadre, une rigueur dont il avait besoin. Eren couvrit sa main de la sienne et enlaça ses doigts.

« À l'époque, ça ne me paraissait pas si terrible. Je me disais que c'était temporaire, que j'arrêterais dès que j'aurais gagné de l'argent afin de terminer mes plutôt longues études. »

Il lâcha un éclat de rire sans joie.

« Que s'est-il passé ? »

Le brun jeta un coup d'œil dans son rétroviseur et mit le clignotant pour signaler qu'il quittait l'autoroute. Il lâcha la main de Livaï pour manœuvrer dans les petites rues puis soupira.

« Aucune idée. »

Il y avait une soudaine distance dans sa voix. Ackerman le comprenait. Parfois la vie sortait tout juste de ses rails sans qu'on sache pourquoi.

« D'abord, j'ai remboursé mes dettes. Ensuite, j'me suis dit que j'allais continuer pour éviter de me retrouver sur la paille, et avant que j'aie compris, il s'était écoulé quatre ans. Je gagnais ma vie, je mettais de l'argent de côté. J'avais vingt-six ans quand mon premier contrat est arrivé à son terme. Je l'ai renouvelé parce que je ne savais rien faire d'autre. »

Il contempla le paysage en racontant son passé.

« Je vois ce que tu veux dire, j'me suis engagé dans l'armée à la fin du lycée parce que j'savais rien faire d'autre. J'ai été éduqué pour devenir soldat par un oncle qui était lui soldat et fils de soldat... j'me suis pas posé de question, pour moi l'armée était une évidence. »

Sous ton emprise... Où les histoires vivent. Découvrez maintenant