Chapitre treize :

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C'était ridicule mais Livaï avait la sensation que sa main brûlait encore d'avoir serré celle du brun pendant tout le film. Restait à espérer qu'il ne lui poserait pas de questions, il n'en avait aucun souvenir. En revanche, il aurait pu décrire toutes les nuances de son eau de toilette et la douceur soyeuse de sa paume contre la sienne. Ils quittèrent le cinéma sans se dire grand-chose. En vérité, une seule question lui importait... et là ?

« Je suis garé là-bas. »

Eren montra une rue un peu plus loin à droite. Le noiraud enfonça les mains dans les poches de son manteau, pas à cause du froid mais pour s'empêcher de serrer de nouveau sa main dans la sienne. Son cœur battait vite, et plus il pensait à ce qui allait se passer, moins il le maîtrisait.

« Tu veux venir ? »

« Chez toi ? »

La surprise qu'il lut sur son visage lui fit faire immédiatement marche arrière.

« Tch, mais on peut aller boire un thé noir quelque part si tu préfères, morveux... »

« Tu as du thé chez toi ? » demanda Eren.

« Oui. Et aussi des biscuits faits maison. »

« Tu veux dire que c'est toi qui les as faits ? »

Il n'y avait pas la moindre ironie dans la voix du jeune, et ce fut ce qui le décida à répondre.

« Cet après-midi, ouais. »

« Emmène-moi tout de suite chez toi ! »

« Tu ne fais jamais de pâtisserie ? »

« Jamais, mais je n'en achète pas non plus. »

Eren sortit son téléphone.

« File-moi ton adresse. »

Livaï la lui donna et ajouta quelques précisions pendant que l'autre l'enregistrait dans son GPS.

« Je te retrouve là-bas. On peut se garer ? »

« Il y a des places visiteurs. »

Le trajet permit à l'homme aux cheveux ébènes de se détendre. Il avait passé une partie de l'après-midi à briquer son logement pour le cas où Eren accepterait, mais d'un autre côté il n'y avait jamais de désordre chez lui. Il gara sa voiture dans le parking souterrain puis ressortit pour l'accueillir. Il entrait déjà dans le petit parking quand il le rejoignit. Quand il sortit de voiture, le halo des réverbères éclaira son visage magnifique, et le noiraud sentit sa nervosité revenir. Ce gosse avait tout pour lui, la classe, l'élégance, la beauté. Il méritait bien mieux qu'un ex-militaire introverti et maladroit. Il pouvait avoir n'importe qui.

Sans se laisser le temps de réfléchir, il poussa la porte de l'immeuble, et un tourbillon d'air glacé entra dans le hall avant qu'il s'efface pour laisser passer son... copain ? Pour ce soir, tout au moins.

« J'habite au sixième. » indiqua-t-il.

« Je ne savais pas qu'ils avaient réhabilité cet endroit. C'est plutôt très chouette. »

Eren s'arrêta pour regarder les moulures.

« Peu de gens le savent. L'immeuble est vide. Les loyers sont trop chers pour les moins de trente ans, le quartier pas assez commerçant pour les familles et pas assez chic. »

« Idéal pour toi, alors. »

La conclusion d'Eren était dénuée d'ironie, et Livaï sentit une douce chaleur l'envahir. Il avait trouvé quelqu'un qui le comprenait. Il ne recherchait pas le contact avec les autres et sortait peu. C'était dans son tempérament et il ne s'en cachait pas, mais la plupart des gens n'arrivaient pas à admettre que c'était par choix et que cette façon de vivre lui convenait. Beaucoup, y compris sa propre famille, considéraient son besoin de solitude comme une anomalie. Que diraient-ils s'ils apprenaient qu'il avait invité un homme chez lui pour l'embrasser et peut-être même pour coucher avec lui ? Il déverrouilla sa porte d'un geste agacé. Peu importait ce qu'on pensait de lui. Ce Kirstein avait eu raison sur ce point. Le brun franchit le seuil et laissa échapper un sifflement admiratif.

Sous ton emprise... Où les histoires vivent. Découvrez maintenant