CRUSH

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- Mercredi après-midi, 17h07 -

Sunmi fixa le reflet que lui renvoyait son minuscule miroir fendu bloqué au fond de son casier. Elle y voyait une jeune femme blanche, les yeux fuyants comme de l'eau et une bouche abîmée d'avoir était trop mordillée. Elle y voyait son stress lui être balancé au visage sans complexe. Soupirante, elle claqua la porte métallique, fit d'un geste mou son code et s'empara de son sac à dos qu'elle avait maladroitement déposé contre sa jambe.

Sans un regard, elle se faufila dans la masse d'élèves.

Ils étaient nombreux autour d'elle à rigoler. À parler trop fort. À grommeler. Voir même à chuchoter pour se moquer de la jupe d'une de leur camarade. Ils étaient nombreux autour d'elle à ne se soucier de rien. Elle les enviait légèrement. Elle les enviait d'une façon si fine qu'on aurait pu comparé ce sentiment à une coupure produite par du papier. Ce genre de douleur qui vous surprend mais qui, en un instant, s'enfuit au loin. Voilà, le lycée pour elle, ce n'était qu'une coupure occasionnelle.

Elle les enviait de profiter de ce moment pour ce décontracter. Certains iraient rejoindre des cours du soir. D'autres rentreraient chez eux pour s'attarder un long moment sur leur devoir. Puis, elle, elle se rongerait les ongles jusqu'au sang en relisant ce petit morceau de papier. Encore et encore. Comme elle l'avait fait le soir d'avant. Comme elle l'avait fait dans le bus ce matin.

Au creux de sa poitrine, battait un bout de chaire qui lui intimait de foncer, de ne pas regarder en arrière. Puis, bordel... Qui s'en rendrait compte ? Pas grand monde, lui susurra son cerveau.

Une épaule lui rentrant dedans la tira de ses pensées.

Au-dessus de cette masse d'adolescent prêt à entrer dans l'âge adulte s'étendait des rangées de néon vieillissant qui n'arrangeaient en rien leurs teints fantomatiques. On aurait cru voir se développer une sorte de parodie grecque. De celles qui ne font pas rire mais qui vous font envier la douleur.

Dans un petit saut, elle parvint à s'exfiltrer du groupe pour venir sentir l'air frais de cette fin de journée.

Elle jeta un œil creux à son portable.

Son fond d'écran aux couleurs d'une idole quelconque l'éclaira une seconde avant qu'elle ne découvre l'heure : 17h06.

Le bus n'allait pas tarder. Il débarquerait fièrement, à peine remplit d'étudiants provenant du second lycée de la ville. Le privée.

Sunmi descendit les marches. Autour d'elle, quelques camarades discutaient, prônaient le droit de rire, mâchaient des chewing-gums bas de gamme. Dans ses narines, un relent de parfum lui retira l'envie de rester là. Prostrée, dans une attente immense quoi que légère.

17h07.

Elle soupira et, comme attirée par l'ombre d'un grand arbre abîmé par l'âge, elle alla s'y abriter.

Les nuages aux tons sombres ne présageaient rien de bon.

Elle posa une épaule fatiguée contre le tronc de cet arbre. Puis, elle examina les lieux. De loin elle aperçut les silhouettes de quelques-unes de ses voisines de classes. Elle vit aussi le dos d'une des archères de l'équipe ; pas suffisamment douée mais assez pour espérer tenir les bouteilles d'eau pendant les compétitions.

Cette constatation lui rappela qu'elle aussi, elle devrait fournir un peu plus d'énergie lors des entraînements. Aux côtés de Somi ou Mina, elle devait paraître bien trop médiocre.

Sunmi frotta ses mains pour se réchauffer.

17h08.

Peut-être que le bus serait en avance aujourd'hui ? Rentrer à pied ne l'enchantait guère.

PSYCHOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant