DRUNK FACE

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- Lundi soir, 23h06 -

Ça devait paraître bien con comme idée. Oh, c'était totalement stupide rien que d'y penser. Les conséquences pourraient la foutre dans une merde de qualité suprême.

Elle se laissa le temps d'y réfléchir en embrasant le bout de sa clope.

« Parce que tu n'es pas tout le monde. »

Un fade sourire grignota la moitié de son visage péniblement éclairé par le fragment flamboyant de sa cigarette lorsqu'elle tira dessus à plein poumons.

« Parce que tu n'es pas tout le monde. »

Dans un haussement d'épaules peu convainquant, une grimace pour ne pas faire tomber sa clope sur la moquette de sa chambre et foutre le feu à l'appartement, Sana se dit que de toute manière la situation ne pouvait s'aggraver. Et quand bien même cela serait le cas, elle se sentait mieux à l'air libre qu'enfermée entre ses quatre murs à fulminer contre sa famille.

Le joint que s'alluma Sungjin en bas de son immeuble termina de la convaincre.

Elle mit sa capuche, attrapa sa veste et accrocha fermement les lanières de son sac sur son dos.

La jeune femme passa tout d'abord une jambe au-dessus du rebord de sa fenêtre grande ouverte et, dans le vide, frotta le mur de sa main droite. Palpant les centimètres d'une manière bien ridicule, elle mit une bonne dizaine de secondes à accrocher le métal de la gouttière. De sa jambe pendouillant dans le vide, elle parvint à capturer le rebord du haut de la fenêtre de salon des voisins du bas. Les points d'appui accaparés, elle décida qu'il était temps de ramener sa seconde jambes près d'elle.

Elle imagina Sungjin la prendre en photo ainsi : une jambe en l'air, une autre à moitié dans le vide et le bras droit totalement allongé. Une véritable ballerine, gracieuse et sans honte. Sana secoua le visage pour éviter de ricaner de son propre ridicule et tira maladroitement sur sa clope coincée sur le bout de ses lèvres. Le panache de fumée qui s'en libéra lui bloqua la vue quelques secondes.

Enfin en possession de tous ses membres, elle se mit en tête de descendre le long de la gouttière afin de rejoindre le toit des garages de l'immeuble qui, heureusement pour elle, se situaient en extérieur.

L'aventure fut parsemée d'insultes en tous genre : putain, merde, ça glisse ce truc de merde, depuis quand ils ont mis du barbelé sur les détours des garages ? Mais c'est que ça pique vraiment en plus bordel ! Mais également de maladresse maladive qui lui coûta presque un séjour dans l'hôpital le plus proche.

Les deux pieds - finalement - sur la terre ferme, elle trottina pour rejoindre son meilleur-ami.

Celui-ci ne lui dit rien et lâcha un maigre sourire qu'elle comprit moqueur. Comprenant sans grand soucis son erreur, le garçon se fit vite pardonner en lui tendant le joint, les pupilles malicieusement enjouées.

« T'étais censé être là depuis une demi-heure, tu t'es paumé entre ton salon et ta porte d'entrée ? Grommela la brunette en lui passant devant sans demander son reste et jetant son mégot.

- Mes parents regardaient une série, j'ai dû attendre qu'ils s'endorment avant de te rejoindre. Et ma petite-sœur a fait un cauchemar, donc ils se sont réveillés et j'ai encore dû patienter du coup je me suis dit que-...

- Tu sais que je rigolais hein ? Je m'en fiche que tu sois en retard, t'en que tu te fais pardonner,

- Ah, réalisa l'adolescent en accélérant sa démarche pour arriver à sa hauteur. Du coup, je suis pardonné là ?

- Non. »

Sana garda son inspiration un bon moment dans ses poumons avant de la recracher à l'air libre.

PSYCHOOù les histoires vivent. Découvrez maintenant