Chroniques des Neufs - T1 Morsiria

Chapitre Dix

Cette histoire possédant neuf personnages principaux, je conçois qu'il peut être parfois compliqué de s'y retrouver. C'est pourquoi vous trouverez, à chaque début de chapitre, un bref rappel des personnages principaux qui apparaissent dans ce chapitre.

Izaya : Princesse de Saïr / humaine / 19 ans / pronom elle

Arendiel : Valet d'Izaya / demi-elfe / 18 ans / pronom il

Cassandra : Chevalière royale pour l'armée de Saïr / humaine / 21 ans / pronom elle

Beollán : Scripteur / humain / 19 ans / pronom il

Cassandra 

— Est-ce que nous quitterons bientôt ces bois ? J'ai l'impression que tout Yrmid s'est transformé en forêt, demanda Arendiel, exaspéré.

— Je l'espère, répondit Cassandra. Si nous suivons toujours le nord, nous devrions finir par en sortir.

Elle était, elle aussi, fatiguée de voir le même paysage défiler devant ses yeux depuis deux jours : ça rendait le voyage interminable. Les arbres étaient si grands qu'il était difficile d'apercevoir le ciel ; il était par conséquent difficile aussi de reconnaître l'avancée de la journée. Cependant, regarder les rayons de lumière qui transperçaient les feuillages lui procuraient une étrange sensation d'apaisement. De faibles points lumineux éclairaient des endroits singuliers sur lesquels elle n'aurait pas arrêté son regard autrement. Son propre plastron luisait et renvoyait des points de lumière sur les troncs. Le visage d'Izaya, illuminé de la sorte, était d'une douceur qu'elle n'avait pas remarquée auparavant.

Elle ne put le contempler bien longtemps puisqu'elle entendit un râle de Beollán. Elle tourna la tête et constata avec inquiétude que le teint de ce dernier était devenu cadavérique. De grosses cernes rougeâtres entouraient ses yeux gonflés et son front luisait de sueur. Son état empirait d'heure en d'heure. Si ses blessures n'étaient pas rapidement soignées... Elle eut un regard pour Arendiel, monté sur son cheval, qui fixait lui-même le malade avec un air concerné.

Elle lâcha les rênes de sa jument, recula un petit peu pour être au même niveau que Beollán et sortit de son sac une gourde. Elle l'approcha de son visage.

— Buvez, conseilla-t-elle, même si cela ressemblait plus à un ordre.

Beollán fit non de la tête, avec une grimace de douleur. Elle soupira. Il avait déjà été compliqué de faire en sorte qu'il se nourrisse tout à l'heure, alors s'il refusait désormais de boire...

— S'il vous plaît, Beollán, intervint Arendiel. Il faut au moins que vous buviez un peu.

Beollán ouvrit enfin les yeux pour rencontrer ceux du demi-elfe. Il prit ensuite une grande inspiration et porta la gourde à ses lèvres. Il ne but qu'un petit peu, mais cela suffisait déjà à éviter qu'il meure de déshydratation plutôt que de fièvre.

Le sentier sur lequel ils avançaient devint boueux. Il avait récemment plu dans cette partie de la forêt. Au moins, ils étaient sûrs d'être à Midyr : il ne pleuvait presque jamais à Saïr.

C'était la première fois que Cassandra se rendait dans cette région. Elle était née et avait grandi à Milyd, puis avait rejoint Saïr à ses dix-huit ans lorsque le roi avait demandé plus de soldats pour renforcer ses troupes. Elle avait eu du mal à s'adapter au changement de climat, et maintenant qu'elle s'était habituée à la chaleur de Saïr, voilà qu'elle devait de nouveau supporter le froid et la pluie.

Perdue dans ses pensées, elle ne fit pas attention et marcha dans une flaque d'eau. Le cuir fin de ses chaussures fut trempé, et il était désormais très désagréable pour elle de marcher. Elle eut aussi soudainement plus froid et soupira, en espérant bientôt ne plus voir tous ces troncs, ces feuilles, ces champignons et toutes ces choses... forestières qu'elle voyait depuis, lui semblait-il, bien trop longtemps.