Âmes soeurs

Sortilège complexe

Harry observait du coin de l'oeil Hermione et Ron rédiger une lettre à l'attention de la famille Weasley. Ron avait plaidé sa cause, et il avait été entendu visiblement.

Voldemort - de moins en moins Voldemort et de plus en plus Tom dans son esprit - était occupé à lire un parchemin, les sourcils froncés, grognant de temps à autres quand ce qu'il voyait ne lui plaisait pas. Harry savait que ses Mangemorts auraient été probablement en train de se liquéfier en le voyant ainsi mécontent. Pour sa part, il ne parvenait plus à avoir peur du mage noir. Il n'était même pas sûr d'avoir eu réellement peur de lui un jour...

L'adolescent soupira.
- Tom ? Pourquoi avoir créé la marque des Ténèbres ?
Surpris l'homme leva les yeux de sa lecture pour le dévisager. Puis il haussa les épaules, d'un air indifférent.
- Et bien c'est une façon de leur rappeler qu'ils m'appartiennent. Que je suis leur Maître.
- C'est pour ça le sortilège complexe en Fourchelang ?
Voldemort ricana.
- Évidemment. Si c'était aussi simple qu'un Alohomora, n'importe qui aurait pu me copier. Tenter de détourner ma marque. Tenter de l'ôter. De cette façon, je suis le seul à maîtriser qui je marque. Je suis le seul à pouvoir appeler mes Mangemorts.

Harry hocha la tête, comme si ça avait un sens pour lui. D'un coup, brutalement, il posa la question qui lui trottait dans la tête.
- Tu vas vouloir me marquer ?
Harry entendit le glapissement de Hermione, mais il ne tourna pas la tête vers ses amis, focalisé sur Tom, observant chacune de ses réactions.

Le Mage noir soupira.
- Ne sois pas stupide Harry. Tu n'es pas un Mangemort. Et ne me dis pas que tu as vocation de te battre à mes côtés.
- Tu ne vas pas m'obliger ?
- Non. Ça serait stupide de ma part de te mettre en danger déjà. Et puis, j'ai bien compris qu'il était compliqué de te forcer à faire ce dont tu n'as pas envie...

Harry resta un bref instant bouche bée, avant de glousser, et de se mettre franchement à rire aux éclats. Face à l'amusement manifeste du garçon, Voldemort sourit et secoua la tête avant de tranquillement retourner à son occupation première.

**

Plus tard dans la journée, Harry avait entraîné ses amis prendre l'air dans le jardin du Manoir. Ils avançaient à pas lents, en regardant autour d'eux, en silence.
Hermione échangeait des regards entendus avec Ron, et les deux amis échangeaient des mimiques de plus en plus désespérées pour déterminer qui allait aborder le premier le sujet Voldemort avec Harry. Ils n'oubliaient pas que Harry s'était montré plutôt soupe au lait avant sa disparition de Poudlard, et ils ne voulaient pas briser le fragile équilibre émotionnel qu'il avait retrouvé.

Le Sauveur s'immobilisa brusquement et ses yeux verts allèrent de Ron à Hermione lentement.
- Bien. Alors. Qu'est-ce que vous essayez de me dire tous les deux ?
Ron rougit aussitôt, et Hermione baissa la tête, vaguement honteuse. Cependant, elle fut la première à se reprendre et à parler.
- Harry... Je sais que les choses ont changé, mais... tu n'as jamais peur en lui parlant comme ça ? Il reste celui qui... Enfin voilà...
Le brun leva un sourcil perplexe et il haussa les épaules.
- Peur de quoi ? S'il me tue, il meurt. La folie de Bellatrix a eu un effet plutôt positif en remettant les compteurs à zéro entre nous.
- Et s'il s'en prend à nous ? Ou à Sirius ? Ou à d'autres sorciers ?

Harry leur posa à chacun une main sur l'épaule.
- Non il ne le fera pas.

Ron marmonna avant de parler de façon plus intelligible.
- C'est un mage noir Harry. Il tue des gens. Il attaque sans aucune raison. Pourquoi tu lui fais confiance à ce point ?

Le jeune homme eut un sourire triste.
- Parce que nous n'avons plus vraiment le choix : nous devons apprendre à nous faire confiance pour espérer survivre. Et Tom ne veut pas mourir. Moi non plus.
Le rouquin soupira et tapota maladroitement la main de Harry restée sur son épaule.
- Désolé mon pote. C'est juste encore un peu compliqué à accepter. Je veux dire...
- Je sais Ron.

Hermione continua, d'une petite voix.
- Tu vas vraiment l'aider, contre Dumbledore ?
Les yeux de Harry se durcirent.
- Oh que oui. Le Directeur n'aurait pas hésité à me tuer. Il m'a envoyé chez ma tante qui hait la magie. Il a refusé de m'écouter. Il a laissé Sirius pourrir en prison. Et je ne parle même pas d'avoir obligé le professeur Rogue à risquer sa vie sans hésiter ! Toutes les bonnes intentions du monde ne peuvent pas changer ça !
Le jeune homme s'arrêta, haletant. Hermione le contemplait, effarée. La lionne déglutit puis ferma les yeux.
- Oh Harry... Je suis désolée... Je... Je pensais vraiment qu'il voulait t'aider tu sais.
- Moi aussi je le pensais. Peu importe Hermione, au moins nous sommes tous les trois en sécurité maintenant. Même si c'est étrange de dire ça compte tenu de l'endroit où nous sommes.

Ron ricana.
- Tu peux le dire. Maman va faire une attaque quand elle l'apprendra. Ou elle essaiera de me tuer...

Les trois amis gloussèrent en pensant à Molly et à son caractère entier, la tension entre eux retombée. Hermione leva un sourcil en direction de Harry et dans une magnifique imitation de Molly Weasley en colère, mains sur les hanches, elle posa la question qui la taraudait.
- Tu étais réellement prêt à te laisser marquer ?
Nullement effrayé, Harry eut un large sourire et il échangea un regard complice avec Ron.
- Ne sois pas stupide Hermione. J'ai demandé à Tom s'il voulait me marquer, je ne lui ai pas demandé de le faire.
- Idiot ! Et s'il avait répondu qu'il le voulait ? Ou que tu devais être marqué pour rester ici ?

Harry ne semblait pas inquiet par l'éventualité proposée par Hermione. Il repoussa les mots de son ami d'un geste vague de la main.
- Ce n'est pas le cas, non ?

Hermione ouvrit la bouche mais Ron la fit taire en lui agrippant le poignet.
- Harry mon pote. Tu es sûr que tu vas bien ? Tu sais qu'on est là pour t'aider quoi qu'il arrive.
- Merci les amis. C'est... juste que c'est encore compliqué d'accepter que nous sommes liés alors qu'il a tué mes parents. Je me sens un peu... coupable. Mais je lui fais de plus en plus confiance malgré moi, et je vais réellement bien.
- Je savais bien que mon meilleur ami n'était pas un idiot colérique.
Harry fronça les sourcils, faisant mine d'être furieux avant d'éclater de rire face à l'expression de Ron qui peinait visiblement à retenir un fou rire. Bien qu'elle eut levé les yeux au ciel, le rire d'Hermione se joignit à celui des garçons.

En cet instant, Harry se sentit pleinement heureux. Il était libre de la prophétie qui le suivait depuis sa naissance, il était en compagnie de ses amis, qui ne lui reprochaient rien. Il pensa brièvement à Tom et il n'eut pas l'habituelle pointe de colère lorsqu'il évoquait l'image du mage noir.
L'avenir se présentait plus souriant que jamais, et même si c'était un peu effrayant - et pas mal grisant - il était prêt à se laisser porter, avec confiance.

Prompt de demain : Insectes morts