Âmes soeurs

Chassé

Lorsque Harry attrapa la Gazette ce matin là, en prenant son petit déjeuner, il pensait que curieusement, il parvenait à peu près à cohabiter avec Voldemort. Le Mage Noir avait mauvais caractère, et il s'emportait facilement. Mais tant que Harry parvenait à occulter le fait qu'il avait tué ses parents, il pouvait accepter ce coup du sort qui le liait à lui. Il était à peu près mieux traité que chez les moldus.

Cependant, à peine le journal déplié devant lui, le jeune homme oublia ses pensées positives alors que la colère montait en lui. Il leva les yeux vers Voldemort, et serra les poings, avant de cracher.
- Je ne peux pas accepter ça.
Le Seigneur des Ténèbres leva un sourcil surpris et reposa doucement sa tasse de thé, pleinement attentif. Il commençait à connaître le gamin face à lui, et quand il avait ce regard noir, c'était en général le signe qu'il était en désaccord sur un point et qu'il allait devoir parlementer pour le calmer.
- Accepter quoi ?

Le Gryffondor lança la Gazette devant lui, avec un grimace écœurée sur le visage. Voldemort y jeta un œil distrait et constata qu'une fois de plus, il faisait la une. Ou plutôt, l'un de ses raids était en première page. Il retint un sourire satisfait qui risquait de déclencher l'apocalypse vu l'humeur du gosse et soupira.
- Il ne faut pas croire tout ce qui est dans la gazette, Harry.
- Alors il n'y a pas eu d'attaque de Mangemort hier ? Il n'y a pas eu de morts?
Le mage noir ricana, pas vraiment impressionné.
- La guerre ne va pas avancer si je ne fais rien.

Le Gryffondor baissa un instant la tête. Mais ce n'était pas en signe de défaite. Il semblait plutôt rassembler ses idées. Lorsqu'il se redressa, il était toujours aussi furieux, et une étincelle de détermination faisait briller son regard plus que jamais.
- En attaquant des moldus ? Ils ne sont même pas au courant de notre existence ! C'est... lâche ! Ils n'ont pas les moyens de lutter !

La décontraction apparente du lord disparut et il fronça les sourcils, se penchant légèrement en avant, pour fixer le gamin dans les yeux.
- Les moldus qui sont chassés sont ceux qui ont un jour porté préjudice aux sorciers.
- Un village entier ? Avec des enfants ?
L'adulte eut un geste brusque de la main.
- Et alors ? Ton cousin est peut être un pauvre moldu innocent ?
- Mon... cousin ?
- Oh Harry... Crois-tu que je n'ai pas été voir qui étaient tes tuteurs ? Quand j'ai vu par légilimentie des fragments de ton enfance, je me suis renseigné, pour en avoir le cœur net... Comment peux-tu défendre les moldus, alors qu'ils sont monstrueux ? Bien plus que moi ?

Déstabilisé, Harry secoua la tête.
- Ce n'est pas pareil.
- Tu n'as jamais pensé à te venger de ta famille moldue Harry ?
- NON !
Harry avait hurlé sa réponse, précipitamment, mais il rougit, conscient d'avoir légèrement menti. Il ne voulait pas la mort de sa famille évidemment, mais il avait souvent rêvé qu'ils paient l'éducation misérable qu'ils lui avaient donné.
Voldemort se laissa aller en arrière dans sa chaise en l'examinant attentivement. Puis il soupira.
- Comment peux-tu te montrer aussi... indulgent envers ces gens ? Combien de blessures t'ont ils infligé ? Combien de repas as-tu manqué ? Combien de fois as-tu été tenu à l'écart ?

Harry ferma un instant les yeux puis il soupira.
- Peu importe. Les moldus... Ils ne sont pas tous comme ça !
- Vraiment ? Combien d'entre eux t'ont aidé ? Les voisins, les institutrices ? Les autres enfants ? Qui a essayé d'améliorer ta vie, Harry ?
- C'est... Les Parents de Hermione ! Ils sont différents ! Ils sont tolérants. Ils s'occupent bien d'elle. Elle a toujours été heureuse, et ils ne l'ont jamais repoussé en apprenant qu'elle était une sorcière.

- Il y a tes moldus. Négligents. Maltraitants. Il y a le père de Severus Rogue. Il n'en parle pas bien évidemment, mais aucun de mes Mangemorts ne peut me cacher quoi que ce soit. Son père alcoolique le battait, pour faire disparaître la Magie en lui. Il a tué sa mère également, à force de mauvais traitements. Le savais-tu Harry ?

Harry blêmit, horrifié de l'enfance qu'avait du connaître Severus Rogue. C'était peut être ça qui l'avait rendu aussi renfermé et hargneux...

Cependant, Voldemort n'avait pas terminé. Il serra les poings, froissant le journal, et se pencha un peu plus.
- Et ce cher Albus, a-t-il parlé de mon enfance ?
Harry secoua la tête, visiblement méfiant. Le Lord noir continua, sans changer de ton, comme s'il n'était pas concerné.
- Ma mère est morte en me mettant au monde, puisque mon moldu de père l'a abandonné enceinte et sans argent. Elle a terminé à la rue, et... elle a juste trouvé la force d'aller jusqu'à l'entrée d'un orphelinat pour accoucher. Bien évidemment, sans famille pour me recueillir, je suis devenu pensionnaire de ce prestigieux établissement. C'est la loi de la jungle Harry. J'ai vite compris que si je voulais quelque chose, je devais l'arracher des mains d'un autre. Je me suis fait des ennemis bien évidemment, puisque ma magie m'aidait grandement à... améliorer mon quotidien. J'étais le monstre, l'enfant anormal que personne ne voulait adopter. Même le personnel avait peur de moi et de mes... étrangetés. Et quand les moldus ont peur... ils attaquent.

Harry, toute colère oubliée, dévisageait intensément le Seigneur des Ténèbres, abasourdi. Il secoua lentement la tête.
- Alors c'est pour ça, tout ça ? Une vengeance ?
- Non. Quand j'ai tué mon père moldu, c'était une vengeance. Quand j'ai tué mes grands parents qui estimaient que le précieux sang-pur Gaunt était souillé, c'était une vengeance. Le reste... C'est pour prendre le pouvoir. Pour diriger le monde magique selon mon bon vouloir. Pour changer tout ça.

Harry pointa du doigt la Gazette, les sourcils froncés.
- Ces gens là... ils n'avaient rien fait ! Tous les moldus ne sont pas mauvais.

Bien que Harry soit toujours totalement convaincu de ses paroles, il n'avait pas d'arguments solides à lui opposer. Même s'il avait grandi dans le monde moldu, il lui semblait parfois qu'il avait vu le pire. Sa famille était loin d'être un exemple après tout.
Il devait avouer que l'explication de Voldemort l'avait déstabilisé. Ce dernier soupira et jeta un regard de dégoût à la Gazette.
- Et bien. Je suppose que mes mangemorts peuvent se tenir à distance des villages moldus pour l'instant. Ils n'attaqueront les moldus que pour se défendre. Es-tu d'accord avec ça ?
Harry le dévisagea, hésitant à croire ses paroles. Puis il hocha la tête, se sentant légèrement mal à l'aise de négocier avec l'homme qui terrorisait le monde magique, mais soulagé de savoir qu'il y aurait moins de victimes.

Prompt de demain : La magie est de retour