Dumbledore avait conscience d'être en mauvaise posture. Il était plus inquiet que jamais.
D'abord, Harry Potter disparaissait. Au début, il avait sincèrement pensé que le gamin avait fugué. Il avait vu son air colérique, et sa difficulté à se contrôler. Il avait vu ses regards noirs, et sa façon de serrer les poings.
C'était un adolescent après tout. Dans sa longue carrière de professeur puis de Directeur, il en avait rencontré des gamins révoltés à l'âge où les hormones s'emballaient.Il se moquait bien de la confiance aveugle de ses amis, il savait que personne n'avait pu s'introduire dans Poudlard. Le jeune Potter s'était couché à l'infirmerie, et entre deux rondes de Pomfresh, il s'était volatilisé. Pomfresh pouvait insister sur le fait qu'il avait pris une potion de sommeil sans rêves, Albus était persuadé que Harry était tout à fait capable de simuler un profond sommeil. Et ce ne serait pas la première fois que la brave infirmière se laissait abuser par des élèves : il suffisait de se souvenir des Maraudeurs qui avaient tenu compagnie à leur ami loup-garou à l'insu du corps enseignant dans son entier.
Dumbledore avait fait face à l'inquiétude des membres de l'ordre et à la colère de certains. Il avait patiemment expliqué que le Sauveur serait retrouvé, qu'il le cherchait activement. Il l'avait dépeint sous les traits d'un gamin ingrat, pour persuader tout le monde que sa disparition n'était qu'un caprice passager. Tout plutôt que de laisser le doute s'infiltrer sur le bien fondé de leur combat. Il avait affirmé haut et fort que le garçon reviendrait lorsqu'il serait suffisamment effrayé ou que la solitude lui pèserait trop, même s'il n'y croyait pas trop.
Ensuite, les deux meilleurs amis de Harry s'en allaient à leur tour. Ils avaient quitté Poudlard discrètement et avaient disparu eux aussi. Son hypothèse première avait été qu'ils étaient partis à la recherche de leur ami.Les membres de l'ordre avaient protesté un peu plus, mais Dumbledore avait annoncé que les adolescents n'étaient pas partis les mains vides : ils avaient emporté leurs affaires, prouvant que c'était un départ volontaire. Des groupes de volontaires étaient partis à leur recherche, pour les localiser et les ramener.
Enfin... Son Maître des potions et espion disparaissait sans laisser de traces. Severus était parti à la recherche des Gryffondor, mais il n'était jamais rentré et il ne donnait plus signe de vie.
Dumbledore avait confiance en lui, il savait que l'homme était fidèle avant tout au souvenir de Lily Potter. Severus ne retournerait jamais de son plein gré dans le giron de Tom Jedusor... Pas après le meurtre de Lily.
Un pressentiment désagréable lui tordait les entrailles, alors qu'un scénario catastrophique se profilait dans son esprit. Et si Voldemort avait une longueur d'avance sur lui et qu'il détenait les gamins ainsi que Severus ? Harry était incapable de faire de l'occlumentie, et il savait que son professeur de potions était un espion après tout...
Lorsque Maugrey arriva dans son bureau, Albus sortit de ses pensées et repoussa ses craintes. Il était toujours le leader de la lumière et tous comptaient sur lui pour les guider.
Son vieil ami grogna en se laissant tomber sur un siège et marmonna.
- Black ne donne plus signe de vie. Avec Lucius Malefoy qui le fait innocenter j'ai bien peur qu'il ne soit passé à l'ennemi.Dumbledore soupira et eut un geste vague de la main.
- Sirius ne ferait pas ça, voyons. Il est bien trop attaché à son filleul...
- Albus ! Comment expliquer son absence dans ce cas ?
Le vieil homme soupira en lissant sa barbe.Maugrey resta silencieux quelques instants, son oeil magique tourbillonnant follement dans son orbite. Puis il grogna et se redressa.
- Qu'allons nous faire ?
- Attendre. Quoi d'autre ? Sans Severus nous sommes aveugles, malheureusement. J'espère juste qu'il... qu'il est indemne.
- Il faudra bien vous y faire Albus. Votre cher espion est retourné s'aplatir aux pieds de son maître.Dumbledore soupira avec lassitude et ferma les yeux un instant. En ce moment il se sentait terriblement vieux, et perdu. Il se battait depuis si longtemps sans qu'il n'y ait d'avancée significative...
- J'ai confiance en Severus, Alastor. Il est notre meilleur atout.Le vieil Auror grogna sourdement et secoua la tête.
- Nous devrions donner un bon coup de pied dans la fourmilière. S'en prendre aux Mangemorts connus, et les secouer. Parce que quand nous verrons la queue du démon, il sera trop tard et nous serons perdus.
Les deux hommes échangèrent un regard inquiet, puis Dumbledore baissa la tête.
- Fudge ne nous laissera pas faire, Alastor. Je suis conscient que Lucius Malefoy est proche de lui, bien trop proche à mon goût...
- Alors éliminons-le. Il ne sera pas compliqué de trouver un scandale pour le forcer à démissionner.
- Alastor... même si votre idée est tentante, n'oubliez pas que nous pouvons tomber sur un Ministre pire encore !
- Sauf si nous poussons sur le siège tant convoité notre propre candidat. Scrimgeour serait parfait, il est officiellement neutre mais se bat contre le seigneur des ténèbres. Il est ancien Auror, et il n'hésiterait pas à s'en prendre à ceux qui sont... d'une honnêteté douteuse. Je suis sûr de lui, Albus, il est terriblement honnête.
- Scrimgeour... C'est effectivement un bon choix. Mais serait-il d'accord pour prendre ce poste ?Maugrey ricana, et se laissa aller en arrière dans son siège, satisfait.
- Il convoite le poste, Albus. Il sautera sur l'occasion croyez-moi.Les yeux bleus de Dumbledore pétillèrent, c'était la première fois depuis longtemps qu'il se sentait satisfait. Remplacer Fudge qui était un peu trop proches de mangemorts connus était une excellente idée. Ils pourraient ensuite peut être obtenir plus d'aide du Ministère, pour partir à la recherche des adolescents disparus ou de son espion envolé.
Le vieil homme se redressa et lissa sa barbe avec un petit sourire.
- Parfait. C'est une excellente idée et ça nous donnera un peu de temps. Des élections imprévues sont toujours les bienvenues pour faire diversion.
- Un peu de temps pour quoi ?
- Pour retrouver mes Gryffondors envolés. Et pour savoir enfin ce qui est arrivé à Severus. Tant que je n'ai pas de preuves concrètes de sa trahison, je continue de lui faire confiance, Alastor.
- Pourquoi tant d'intérêt pour cet homme si... détestable ?Albus eut un petit sourire triste.
- Sa culpabilité d'avoir causé la mort de la femme qu'il aimait m'assure sa fidélité. Il est venu me demander mon aide en rampant, et il ne m'a jamais déçu. Voyez-vous quelqu'un d'autre pour accepter un rôle si ingrat ? Il reçoit des Doloris plus qu'à son tour, et pourtant il revient toujours, et trahit sans la moindre hésitation.
- Ainsi donc cette chauve-souris désagréable est capable d'aimer... Si vous êtes sûr de vous Albus, après tout... À vous de voir.
Prompt : Sortilège complexe
VOUS LISEZ
Âmes soeurs
FanficLa jalousie d'une femme, un sortilège noir, très noir. Et la vie de deux personnes bascule. Le destin est parfois étrange, et complique singulièrement une vie déjà bien remplie.