10.

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10. « Anéanti car ma mère n'a jamais su mentir, l'huissier m'appelle fiston car ce fils de pute m'a vu grandir. »

« J'suis seule, emprisonnée dans mes pensées, mon mal-être. J'débite des phrases même pas cohérentes. Mon manque de foi s'ressent quand à chaque épreuve j'supplie le Très Haut d'm'emporter très haut avec Lui.

Au fond d'moi c'est hard comment je chauffe, je sais plus quoi faire, plus où donner d'la tête.

Une fois de plus j'me sens comme le vilain petit canard. Pas attendue. Démunie. Trahie. Rejetée.

Mon imagination est limitée bro, pas la patience ni la force d'aller chercher plus loin.

À l'ancienne j'aurai kiffé connaître tous les secrets que recèlent ce bas monde. Détenir cette putain d'clef, la clef du savoir, n'en déplaise à quiconque.

Maintenant des secrets j'en connais déjà un et il m'a déjà achevée.

Ce monde là il est ripou bro. Pour des 100 euros on t'met des kicks dans l'dos. Même pour des trucs qui s'achètent pas. Les sentizeuuuuuub. Pour se sentir désirée, se sentir importante ma mère m'a vendue et m'a laissée agonisante sur les rives de l'Enfer.

Celle pour qui j'aurai pris du ferme pour une syllabe de trav. Celle pour qui j'aurai retournée la Terre entière juste pour une fois dans ma vie voir cette chienne d'étincelle dans ses yeux qu'ici on nomme la fierté.

Elle m'la mise bien profonde. Plus profond y'a l'noyau terrestre.

Alors j'frappe bro, parce qu'au fond j'suis bonne qu'à ça : mettre des directs du gauche là où ça fait mal. J'frappe pour plus jamais ressentir cette saleté de tumeur dans ma poitrine, qui demande qu'à s'agrandir, pour engendrer plus de haine. J'mets des coups jusqu'à me dessécher la peau des mains. J'péta comme une hystérique pour extraire cette putain d'rage qui s'est vue naître le jour d'ma venue au monde.

Tu comprends pas? J'te l'ai déjà dit ; j'suis Le Vilain Petit Canard ; j'étais pas prévue. Un putain d'accident, une capote trouée voilà c'que j'suis.

Alors j'encule ma rancœur et mes larmes dans c'punching-ball. C'est décidé maintenant ; plus d'sentiments.

Salim l'entraîneur me crie d'lâcher le punching-ball. J'persiste, lui aussi.

Salim : _ Taper le sac de frappe c'est bien, mais taper un humain c'est mieux.

Sa réflexion engendre des rires moqueurs dans la salle qui m'font serrer les dents. Un dernier coup, puis je me tourne vers lui, attendant qu'il développe.

Salim : _ Mehdi, tu montes sur le ring avec Maryâm. Assaut libre.

Un gars d'la salle : _ Euh Limsa t'abuses pas un peu ? Mehdi i doit faire au moins 20 kilos de plus que Maryâm wesh !

Salim : _ C'est bon c'est juste un entrainement pour la forger un peu, j'exagère de rien du tout. Allez Maryâm dépêche-toi d'monter j'ai pas qu'ça à faire moi.

J'm'avance, le pied actif. Le présumé Mehdi se tient devant moi, une tablette de Milka sur pattes. Il n'est vêtu que d'un short Everlast assorti avec ses gants.

On se salue, comme avant chaque combat. Il a la force, la technique, l'expérience, les heures d'entraînement, mais pas le feu qui abrite en moi. Et c'est pourtant souvent cette hargne que je possède qui détermine la fin d'un combat.

Il m'tourne autour, moi aussi. Il associe direct sur direct que j'esquive facile, j'sens venir un coup d'pied, j'lui enchaîne deux fouettés en changeant de hauteur auxquels il répond par un chassé tellement imprévisible que j'ai pas anticipé ; j'le reçois dans l'ventre.

Maryâm - « Bent Hram »Où les histoires vivent. Découvrez maintenant