Chapitre 09 - Dorian ♛ : Porte-clé symbolique.

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— Je suis venue t’offrir quelque chose pour Noël. 

Sceptique, elle arque un sourcil. Malgré les jours et les semaines passées sans sa compagnie, elle garde toujours cette petite touche de tristesse sur son visage blême. Aussitôt, quelqu’un apparaît dans mon champ de vision, plus précisément, à sa droite. Un tantinet gringalet, l’homme semble déconcerté par ma présence. Je devine qu’il s’agit de son foutu mari et de ses yeux vert émeraude. 

— Qui êtes-vous ? me demande-t-il d’un ton glacial sans me laisser en placer une face à son visage bien plus vieux que ce à quoi je m’attendais. 

— Je suis un ami de Tara. 

— Le patron du bar, précise-t-elle, le corps tendu des pieds au visage. 

Je n’attends pas plus longtemps et plonge la main dans ma veste Chesterfield et en sort un porte-clé fait par mes soins. Une lune rouge sur laquelle est gravée trois chauves-souris en plein envol. L’une d’elles laisse dépasser son aile du porte-clé circulaire afin de donner plus de vie à l’objet. Je lui tends avec entrain sous les pupilles analytiques de son conjoint, toujours sur la défensive. Elle semble se détendre en l’attrapant, ses traits faciaux s’apaisent et l’ambiance devient moins tendue que lorsqu’elle m'aperçoit derrière le battant. 

— Merci, Dorian, mais tu n’étais pas obligé de te pointer ici au beau milieu de la nuit et de venir interrompre notre soirée, réplique-t-elle en reprenant ses airs de contrariée avant de me fermer la porte au nez. 

Bon, au moins elle a gardé mon cadeau. C’est mieux que rien. Je rebrousse chemin et, une fois que je ne me trouve plus dans la trajectoire de la maison, j’use de ma vitesse pour rejoindre CBC et sa rue piétonne. Lorsque j’entre, c’est avec peu de surprise que je tombe sur notre cher William Black en train de se bourrer la gueule jusqu’à la moelle. 

— Une énième excursion chez ta dulcinée ? m’interroge-t-il en tournant légèrement sa nuque dans ma direction. 

— Ta gueule.  

— J’en connais un qui s’est fait envoyer chier comme un chiffon sale, se marre-t-il lorsque je passe à ses côtés pour me poser derrière le comptoir. 

Il sourit avant de poser sa paume sur son verre frigide.

— Quoi de neuf, patron ? Je veux dire, en dehors du fait que tu n’arrives pas à attirer les minettes dans tes filets malgré ton charme inébranlable de trentenaire. 

Il commence vraiment à m’énerver. Il sait comment m’énerver, surtout. Toujours en train de me donner des leçons de vie alors qu’il n’est pas foutu de rendre sa femme heureuse. Elle fait partie des personnes appartenant au deuxième sexe qui ne jurent que par les gosses. J’ai cependant peur de ce que pourrait être sa réaction si un jour il apprend qu’elle est en cloque. 

— Rien depuis hier, William. 

Il se pointe vraiment tous les jours, ça en devient presque épuisant, à la longue. Il veut devenir pour oublier le problème qu’est sa conjointe, pas besoin de connaître toute sa vie pour le comprendre. 

Derrière lui, Edgar, toujours posté devant la porte du sous-sol. Malgré tout, je commence à me dire que c’est inutile puisqu’en cinquante ans ici, personne n’a jamais tenté d’entrer là-dedans à part Tara. Cette foutue fille que la curiosité a emporté bien trop tôt. Lamia, la métaphore du désespoir. Son visage m’intrigue toujours autant, même après avoir passé un mois sans la voir passer les portes du CBC. Je me sentais toujours combler d’impatience lorsque je l’attendais, bien que cela n’ait duré que quelques jours. J’avais cette soif de curiosité, de savoir tout d’elle parce qu’elle m’intriguait. Elle m’intrigue toujours autant. Comment fait-elle pour ne pas sourire ne serait-ce qu’une seule seconde de sa vie ? 

Lamia : La Nuit Du Désespoir. {TERMINÉE}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant