Chapitre 29 - Dorian ♛ : Veillée ténébreuse.

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31 décembre 1990.

Elle a finalement décidé de passer le réveillon du nouvel an en ma compagnie. Elle a fait son choix après être restée deux jours avec son mari. Elle ne venait plus que pour travailler prendre de mon sang et me donner du sien. J'ai, durant une seconde, la perdre. Mais elle est revenue. Le CBC est le seul bar de la ville qui ferme ses portes durant les fêtes, parce que personne ne sait ce qu'il se trame au sous-sol. Installé au comptoir, je l'entends au rez-de-chaussée. Elle ouvre le battant et descend nous rejoindre, bien plus à l'aise ici qu'entourée d'humain. Bien plus joviale, aussi. Elle porte une robe rouge sang, laissant ses épaules dénudées. Avec aisance, elle me rejoint, le sourire aux lèvres.

Elle m'a choisi.

— Je ne suis pas certaine d'être prête à tous les entendre crier à minuit, dit-elle avec sarcasme en s'asseyant en face de moi.

— Moi non plus. Mais c'est une habitude à prendre, au fil des années, je ne les entends même plus.

Un sourire vient fleurir sur mon visage. Je prends toujours plaisir à observer le sien, bien que ses joues soient toujours creusées par la maladie. Maladie qui continue de progresser malgré le fait qu'elle reprenne ses médicaments chez elle. Peut-être que je ne l'oblige pas assez souvent à faire de la kinésithérapie respiratoire ? Nous verrons bien cette nuit. Pas question que je la laisse filer si vite la nuit de la nouvelle année.

— Max a eu la bonté de te laisser venir ici ? repris-je pour brisé le silence qui était en train de s'installer entre nous deux.

— C'est dans mon contrat invisible, sourit-elle. Tant que je travaille ici, je suis libre de mes choix. De toute façon, il ne me fera pas revenir en arrière.

Surtout depuis que j'ai activé le rituel du Calice. Plus rien ne peut casser ce lien, à part la mort. Et il ne lui reste plus beaucoup de temps lorsque je la voit s'époummoner en face de moi, la main devant la bouche pour retenir son mucus. Mon sang ne la guérira jamais assez. Il ne guérit pas les maladies mortelles, pas même pour la jolie Lamia.

Sans que je ne puisse faire quelque chose, une larm perle sur sa joue gauche. Pourtant, elle garde le sourire. Une larme de désespoir.

— Je ne sais pas comment tout lui avouer, confesse-t-elle en relevant les yeux dans ma direction.

— Tu n'auras pas besoin de leur faire. D'ici quelques jours, tout sera terminé.

Sa larme s'écrase sur le comptoir, brille sous la lumière Lila des projecteurs.

— Que veux-tu dire par là ?

Pour l'instant sans réponse, je pose ma main sur sa joue droite et essuie avec attention le liquide salin commençant à couler de son œil.

— Tu verras en temps voulu.

Je ne me résous toujours pas à lui dire. Comment faire ? Comment puis-je espérer une seule seconde qu'elle ne prendra pas la fuite lorsqu'elle saura ? Mon combat intérieur sur cette foutue question n'en finit plus. Elle veut savoir, et elle le saura lorsque cela arrivera. Et je serai tapis dans l'ombre pour l'observer commettre l'irréparable.

— Ne pense plus à ça et concentres-toi sur ce soir. D'ici quelques dizaines de minutes, il y aura un peu plus d'ambiance.

J'essaie de me rassurer en me disant qu'elle finira bien par le deviner mais c'est comme si, au fond d'elle, elle n'avait pas envie d'aborder le sujet plus en détail. Je la comprends, elle ne veut pas savoir. Elle ne souhaite même pas l'imaginer. Il n'y a qu'à voir sa tête pour le deviner, pas besoin d'explorer son esprit.

Lamia : La Nuit Du Désespoir. {TERMINÉE}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant