Chapitre 24 - Tara ♔ : Une personalité qui a du culot.

11 4 0
                                    

« Le désespoir est parfois moins destructeur qu’un espoir qui nous est enlevé brutalement. » 

La soirée bat déjà son plein. Cela fait déjà quelques dizaines de minutes que je me trouve accoudée au comptoir, servant parfois plusieurs ivrognes à la fois. William ne s’est pas encore pointé. Je ne l’ai vu qu’une fois, mais son odeur d’alcool restera à jamais dans mes sinus, son visage restera ancré dans mon esprit jusqu’à mon dernier souffle. Son faciès mate, ses cheveux et sa barbe noire tirant sur un gris argenté me font frissonner. Même ses yeux aspirent à un mauvais avenir. Les conversations fusent dans la pièce spacieuse, aux tabourets du bar et aux banquettes posées face à ces derniers. Tony et sa chevelure ambrée m'assistent, sans pour autant faire la plus grande partie du travail.          
   
Le gri gri au-dessus de la porte d’entrée résonne bien des fois, mais une me marque tout particulièrement. Elle aussi, je ne l’ai entendue qu’une seule fois.

— William Black, soupire Dorian.         

Avec peu d’entrain, il le salue, assurément lassé par le fait de le voir ici. Son regard se tourne vers moi. Ses yeux noisettes me détaillent, un sourire en coin. 

— C’est la petite dame qui commande maintenant, Dorian ? 

— C’est ma nouvelle employée, descends sur terre, tu veux ? grogne-t-il, assis en bout de rang. 

Il n’y a que quelques centimètres entre les deux, mais aux poings serrés de Dorian, je devine qu’il a envie de lui en coller une sur le coin de la figure. Je le comprends. La crinière ébouriffée, l’homme à la veste trois quart s’installe sur le tabouret présent à gauche de Dorian. Il se tourne vers Tony, l’observe nettoyer certains verres à ma droite et lui adresser enfin la parole :          
                
— Comme d’habitude, Tony. 

Aussitôt, Dorian lui donne un coup de coude dans sa côte gauche. 

— Tony s’occupe de la vaisselle et de vos déchets, Monsieur Black. Pas la peine de faire comme si je n’étais pas là. 

— C’est qu’elle mordrait, la nouvelle, se marre-t-il. 

La mâchoire serrée, je me retiens de protester. Il est tellement culotté que je ne peux plus rien faire pour son cas.   
     
— Je crois que tu n’as pas saisi, William. Tu me ressors encore une réflexion et je te fous dehors. 

Je les ignore discuter et prépare une pinte à ce William à qui je souhaite simplement se noyer dans la bière. La même chose que d’habitude, Tony. Ouais, c’est ça. Du bon whisky pour un alcoolique invétéré aux principes marginaux. 
Presque noyée dans la colère, je lui colle son récipient sous le nez. Il ne me remercie pas. 

— De rien, dis-je, froidement. 

Ses pupilles noisettes se lèvent vers moi, son sourire s’élargit. Effacé de ce qu’il se passe à ce comptoir, Tony continue, dos à moi à essuyer la vaisselle et remettre en place un tas d’affaires en toute innocence.

— Si vous aviez des gamins vous serez peut-être plus aimable.  

Ce n’est pas une bonne idée de ramener ce sujet sur le tapis, Tara. Suite à ma remarque, Dorian se tend encore plus aux côtés de William qui se mord la joue de nervosité. Sa peau glisse entre ses dents. 

— Je ne suis pas sans savoir que vous avez mise votre vie en danger pour enfanter. Tout se sait ici, Madame. Je n’ai pas besoin de vos leçons de vie lorsqu’on sait que vous avez tué votre gamine. 

Tout droit sorti d’un cauchemar, mon crâne peine à encaisser le choc. Dans un bruit sourd, j’entends Dorian gueuler, le forcer à se lever et devant moi, le pousser de force à sortir. Je suis figée face au comptoir, main droite posée sur la plateforme froide. Edgar se poste devant moi, ses lèvres bougent mais je l’entends à peine. 

Lamia : La Nuit Du Désespoir. {TERMINÉE}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant