Hannah : laisse-la en dehors de ça

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Alors que j'ouvre à peine les yeux, des bruits inaudibles me parviennent. Des grincements et voix dont chaque son est démultiplié et résonne dans ma tête. Je lève difficilement une main, mais l'autre ne veut pas venir. Un bruit métallique l'en empêche, quelque chose de froid, et puis sa voix, son murmure :

— Bienvenue dans la réalité ... Hannah.

Son haleine, métallique elle aussi, reflète sa personnalité, froide et sans une once d'humanité.

— Où est ...

Je me racle la gorge :

— De l'eau, il me faut de l'eau.

Cette fois son rire :

— Je ne crois pas que ce soit ta priorité.

Et puis mon cœur accélère :

— Où est Angie ? Angie !

Il serre mon poignet attaché à la barre du lit, je baisse les yeux et constate ce que je pensais, une paire de menotte me retiens à lui, à ce lit froid, et cet endroit sinistre.

— Qu'est-ce que tu lui as fait ?!

— Calme-toi, elle est loin d'ici, et saine et sauve. Enfin, pour l'instant.

— Espèce de salaud !! T'avises pas de l'approcher sinon ...

Il rit, en balançant la clé au bout de ses doigts :

— Tu ne risques pas d'aller bien loin. Mais bon, t'as de la chance, je suis encore en période de sursis, je dois me tenir tranquille, alors je vais te détacher.

Un lent cliquetis, comme pour me montrer qu'il m'a bien à sa merci et il serre mon poignet :

— Tu as un mois. Tu as un mois pour la retrouver, et pour la convaincre de n'importe quelle façon, de m'obtenir des pouvoirs. Si dans un mois, rien n'est fait, cette fois je n'attendrais pas.

Et puis il se penche à mon oreille, je tourne la tête mais de son autre main il serre mon cou :

— Ne t'inquiète pas, je me débarrasserais juste d'elle pour les récupérer si tu ne trouves pas un autre moyen. Et bien sûr, je m'arrangerais pour te faire accuser de tout ce qui est arrivé : l'accident, d'avoir poussé ton cher ange du pont et enfin après avoir échoué deux fois, de t'en être débarrassée une troisième pour de bon.

— Je ne vois pas le rapport avec elle ! Tu n'as qu'à me demander à moi de trouver un moyen mais laisse-la en dehors de ça !

— T'as pas compris alors ? T'as pas compris pourquoi on la protégeait tant que ça ?! Je pense qu'elle doit avoir de sacrés pouvoirs et une sacrée importance pour qu'on veuille à ce point-là qu'il ne lui arrive rien. Réfléchis et tu comprendras ! Sur ce, passe le bonjour à ton ange pour moi !

Il ouvre la porte, quand il me regarde une dernière fois :

— Oh, et ne te rate pas Hannah. Ou devrais-je dire ... Elina.

Ma respiration se suspend :

— Comment est-ce que ... Personne ne peut être au courant ... Personne ne ...

Mais la porte se referme et je mets quelques minutes à comprendre ce que ça signifie. S'il connait cette partie-là de moi, alors c'est qu'il a bien caché son jeu, c'est qu'il sait beaucoup plus de choses, sur moi et sur nous. Mais c'est surtout qu'il est capable de tout, et des pires choses qui soient.

Je me tiens à carreau le temps que le médecin passe, mais dès qu'il a le dos tourné, j'arrache les perfusions, et tout ce qui me relie à cet endroit. Je leur laisse quand même un mot, attestant que je prends la responsabilité de ce qu'il va m'arriver.

J'enfile ma veste, rabat ma capuche sur mes yeux, mes mains dans les poches, et marche sûre de moi à travers ces couloirs froids.

Je sais que je n'ai pas beaucoup de temps. Je sais qu'un mois ne sera pas assez, je sais qu'il ne me laissera pas tout ce temps parce que je viens de comprendre ce qu'il veut et pourquoi. Je sais que la seule solution que je dois trouver, c'est de me débarrasser de lui et de protéger Angie.

**

Je pousse la porte de cet endroit que je n'ai pas fréquenté depuis des années :

— Tiens tiens, qui voilà.

— Salut Boy.

— T'es de retour pour ce que je pense ?

— Ouais. Mais cette fois j'ai besoin que ça fasse vraiment des dégâts.

— Hannah, tu sais ce que tu risques si ...

— T'occupe, je te demande juste de me procurer le matériel.

Il soupire parce qu'il sait que c'est inutile de batailler quand je suis dans cet état

— Ok, viens avec moi, je vais te montrer quelque chose.

— Par contre, faudrait que tu m'héberges quelques jours, j'ai besoin de repos.

— Ça marche, tu sais que tu peux rester autant que tu veux.

— Je sais, mais là c'est vraiment que j'en ai besoin parce qu'en réalité, je n'ai pas beaucoup de temps.

Il s'arrête et se tourne vers moi :

— Oh oh, est-ce que j'ai vraiment envie de savoir pourquoi ?

Il fixe les jointures de mes mains abimées sur mes poings serrés et je sais qu'il connaît déjà la réponse :

— Je ne crois pas.


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