Chapitre 6

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Les soirs qui suivirent, Neven retrouva Helena sur le toit presque à chaque fois, malgré l'interdiction formelle qu'ils avaient d'y retourner, après qu'ils se virent trouvés là par un intendant. On eut pu entendre jusque tard des rires discrets résonner dans la noirceur de la nuit, éclairée désormais par une nouvelle flamme...

Un soir, pendant lequel la plupart des élèves de première année s'étaient réunis en salle communale, autrement appelé salon, afin de passer du temps ensemble et de partager les inquiétudes des uns avec les conseils des autres. La bonne humeur était au rendez-vous, jusqu'à ce que vint le tour des questions dites personnelles, dont l'utilité était d'après tous : apprendre à se connaître davantage. Helena n'éprouva cependant aucune réelle gêne à parler de son père, quand son tour vint, et qu'on le lui demanda. Elle se voyait heureuse à présent que sa mère, Anna, s'était remise de son départ précipité.

OMARA : Où est-il à présent?

Omara Vasquez était une jeune fille de dix-huit ans déjà, dont le passé lugubre l'avait obligée à repasser sa première année. Aucune des raisons n'avaient été présentées aux élèves, et elle de son côté, s'était contenté de conserver ses complications pour elle-même. Elle était par ailleurs très respectée et aimée de beaucoup, de par sa gentillesse naturelle et sa bienveillance, elle jouait en quelques sortes le rôle d'une seconde mère de pensionnat pour ceux qui s'en seraient montrés nécessiteux.

Helena expliqua qu'afin de ne heurter sa mère, cette dernière lui avait interdit de rechercher la raison de son absence subite. Un autre garçon lui fit savoir qu'il serait temps qu'elle sache la vérité, du fait du temps qui s'était écoulé depuis, justifiant que la blessure d'Anna avait certainement cicatrisé. L'adolescente exprima son refus de s'engager dans une quête à la vérité, et demanda à ce que l'on passe à la présentation de Mathilde.

Neven était resté assis dans un coin, étrangement silencieux, au regard de son caractère habituel et de son besoin insolent de faire remarquer sa présence. Helena se leva délicatement de son assise et alla s'assoir à côté de lui. Afin de ne pas couvrir le joyeux tumulte que provoquait le fait d'être tous ensemble, ils chuchotèrent :

NEVEN : Vous devriez retourner avec les autres.

HELENA : Pourquoi, ma présence vous est-elle si désagréable?

NEVEN : Vous souriiez là-bas. 

HELENA : C'est trop généreux. Pourquoi n'y êtes-vous pas?

NEVEN : Je suis fatigué, j'ai peu dormi ces temps-ci.

Helena esquissa un sourire de compassion.

NEVEN : Je vais prendre l'air, me suivez-vous?

Helena le succéda et tous deux se rendirent pour la cinquième fois de la semaine sur les toits du bâtiments. Les étoiles scintillaient plus que jamais, la pleine lune s'était levée.

NEVEN : Vous ne voulez pas savoir la vérité, n'est-ce pas?

Helena se saisit du pan de son pull et l'examina attentivement tout en écartant légèrement les coutures.

HELENA : J'ai peur de la savoir.

Il était d'une rareté sans pareille que la jeune femme ne se prenne d'honnêteté si rapidement et qu'elle fut capable d'avouer ses ressentis avec autant de facilité à quelqu'un.

NEVEN : Je vous comprends.

Un jet d'or se dessina soudainement dans le ciel.

NEVEN : Faites un vœu, Helena.

Elle ferma les yeux. Que souhaitait-elle par-dessus tout? Le bonheur de sa mère, sa propre réussite, tant de choses considérées importantes filèrent dans son esprit. Mais une seule retint son attention. Elle entrouvrit les paupières à nouveau, tandis qu'un frisson lui parcourut le corps. Un bâillement lui échappa, et elle laissait tomber sa tête sur l'épaule de Neven. Celui-ci ne tarda pas à s'endormir également, après avoir installé Helena, qui dormait désormais à points fermés, délicatement à son côté, sur un endroit plat du toit qui formait une petite terrasse.

Car je vous aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant