Chapitre 7

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   Les premiers rayons du soleil pointaient à l'horizon quand Helena ouvrit les yeux. Les reflets brillants se déposaient sur ses pupilles, qui semblaient embrasser parfaitement ce doux rayonnement. L'espace d'un instant, tout sembla parfait : un léger bruissement du vent se mêlait au chant matinal des rossignols, le visage reposé du garçon qui dormait encore à son côté, et en guise d'ornements, un remu lointain de l'eau de l'étang, au bas du bâtiment, quelques mètres plus loin. Soudainement, cette tranquillité se brisa au sursaut d'Helena! Nous étions samedi. Sa première heure de cours avait lieu à sept heures trente, horaire que démentait la position du soleil, déjà bien avancé dans le ciel pour une journée de septembre. Elle secoua frénétiquement l'épaule de Neven tout en lui criant à voix basse qu'il n'aurait jamais dû la laisser s'endormir. Les deux prirent le chemin des dortoirs en courant à pas de loups, et s'éclipsèrent subrepticement dans leurs chambres respectives. En se penchant depuis la fenêtre, il était possible d'apercevoir l'horloge du clocher de l'église. Dix heures moins une, soit deux cours oubliés et la possibilité d'assister au troisième sans retard. La jeune femme obtint pour punition de s'être déjà faite remarquer après une semaine inachevée, et on la menaça de nuire à ses projets d'avenir si une quelconque semblable situation paraissait à nouveau. Elle se rendit donc en classe, suivie de près par Neven, qui assistait à la même, sans ne lui adresser mot et se plaça dans le rang d'élèves toujours placés devant la porte, traduisant que le cours n'avait pas encore débuté, ce qui valut à Helena un immense soupir de soulagement.

Madame Beauvais était professeure de grec ancien, matière considérée nécessaire, voire indispensable à la culture générale des élèves du lycée Diderot. Elle allait engager l'énumération des grandes figures grecques, quand on frappa à la porte. Il n'était certainement pas habituel pour un membre du personnel de déranger un cours, d'où l'on savait que jamais quelqu'un ne tenterait d'entrer durant un cours. Madame Beauvais leva des yeux gris étonnés, et se dirigea d'un pas lent vers la porte, qu'elle entrouvrit. On la vit échanger quelques mots avec une silhouette indiscernable, puis elle sortit de la pièce et tira la porte. Tous se regardèrent. Un léger bruit de fond commença à s'élever, quand la professeure revint. Elle était accompagnée d'une jeune femme, qui dès son entrée, fit percevoir à tous comme une sorte de chaleur, qu'elle semblait transporter autour d'elle-même, comme invisible. Sa longue chevelure blonde était attachée par une pince, dont deux mèches au-devant s'étaient comme échappées hardiment, tandis que ses grands yeux verts scrutaient la pièce. Elle portait pourtant l'uniforme attribué sans la moindre dérogation, mais elle paraissait dégager quelque chose d'imperceptible... Quelques chuchotements déferlèrent, jusqu'à ce que madame Beauvais ordonna le silence.

MADAME BEAUVAIS : Je vous prie d'accueillir comme il se doit mademoiselle Aurore Brun. Elle est arrivée par le train ce matin, n'ayant pu y accéder la semaine passée, pour cause de contre-temps familial. Elle nous vient avec un bagage culturel large et se prévoit une carrière musicale, qui paraît tout à fait réalisable.

Depuis son arrivée, elle n'avait prononcé aucun mot, s'étant contentée de paraître et de sembler, de laisser le choix quant à la perception que ses camarades auraient d'elle. Helena jeta un œil à Neven, qui semblait comme happé par la beauté enivrante de la nouvelle arrivante...

Car je vous aimeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant