Chapitre 5 La volonté du Chevalier d'Oblivion

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Nous rejoignons finalement la capitainerie sans un mot. Fan'goriah nous y attend, le visage marqué, d'avoir peu dormi, ou trop pleuré je ne sais pas.

Son bureau est jonché de documents, et elle nous annonce sans grande cérémonie, que nous pouvons désormais devenir les co-gérants de cette compagnie. De ce fait nous bénéficions, bien sûr, d'une rentrée d'argent plutôt lucrative, mais aussi nous devons assumer les responsabilités des employés, les conflits avec les compagnies rivales, les partenaires commerciaux... Rien de cela ne m'enchante.

Mais alors, elle nous annonce avant cela qu'elle décide de se montrer plus sélective dans ses recrutements, à commencer par nous, se redressant face à nous. J'ignore comment le reste de l'équipe a vécu ce passage, mais à voir leurs visages, pas très bien. Pour ma part, j'ai senti quelqu'un s'insinuer doucement dans ma conscience avant de retrouver cet espace sombre. Devant moi une elfe, la peau blanche cendrée, dont la peau se craquèle. Et tandis que sous sa peau de porcelaine qui se fragmente, tombant peu à peu en poussière, apparaît une chair brûlante comme un magma, une voix androgyne surgit alors « Tu es à moi petite pleurnicharde ».

Quand je reviens à moi, je croise le regard de Fan'goriah qui reste silencieuse, comme nous tous. Nous signons les papiers sans grande hésitation, puis nous sommes emmenés jusqu'à l'ignoble caravelle que nous avons croisée en arrivant. Ignoble c'est le mot. Beaucoup trop d'opulence, de mauvais goût tant à l'extérieur qu'à l'intérieur. Je prends la décision, craignant le pire, de rester en retrait, demandant à parler seule à seule avec Fan'goriah. Je tente maladroitement, la gorge nouée de lui demander ce qu'elle a vu en moi, réponse peu pertinente de sa part, elle ne voit qu'une part de vérité. Rassemblant mon courage, je fini par lui avouer, creusant davantage l'abîme de mon cœur, que je suis celle qui a mis fin à la vie de son ami, mais au lieu d'une colère et des menaces, c'est une main chaleureuse qui se pose sur mon épaule. Un doux sourire apparaît sur son visage quand elle me dit « je savais tout cela, et je vous en remercie »

C'en est trop pour moi, je quitte prestement la pièce, m'accoudant au bastingage. Je reprends mon souffle et mon sang froid, rejoignant le reste de l'équipe dans ce dédale de mauvais goût. Nous fouillons dans les différents coins des pièces, lorsque Vy nous annonce avoir trouvé un masque. Au milieu des moqueries vient alors un silence de mort. Je me retourne alors, et face à moi se trouve Löne. J'avance d'un pas, j'aimerai le toucher, vérifier qu'il soit bien là. Mais je l'ai tué, je le sais, j'ai son sang sur mes mains. La nausée s'empare de moi et sous le choc je tombe à genoux. L'illusion s'estompe alors et Vy se retrouve face à nous, le visage étonné presque souriant, il ne semble pas comprendre. Pleine de colère je m'élance pour le frapper, mais c'est trop pour mon corps. Dans un demi-tour, je rends mon repas et les restes d'alcool que j'avais pu ingurgiter, dans l'un de ces ignobles vase à motifs floraux. J'abandonne mes compagnons à leur décoration et sort prendre l'air pour me calmer. Je me retiens de pleurer, encore. Dieux, si j'avais su que cela faisait si mal de perdre un être cher... je regarde alors Valkin du coin de l'œil, et mon cœur se serre à nouveau. J'entends mes camarades faire appel à des artisans afin de modifier la caravelle, retirant toute trace de son ancien propriétaire.

Je pars finalement acheter des potions de soin, j'ai besoin de me reprendre. Jouant de mes talents de négociatrice, je nous obtiens une potion pour tous à un tarif raisonnable. Le soir nous savons que nous allons sans doute être appelés, et Tess nous prévient que l'épée de nuit est habitée par un esprit, Nocturno, qui la met en garde, nous devons dormir équipés. Bien entendu Valkin ne comprend pas, nous allons disparaître et le laisser seul, mais à force d'encouragement, nous lui confions la mission de veiller sur la gondolfière et de veiller à l'avancée des travaux jusqu'à notre retour.

Les Mémoires d'Helledwen, l'Elfe de Sang. Chroniques d'OblivionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant