Les Mémoires d'Helledwen, l'Elfe de Sang. Chroniques d'Oblivion

Chapitre 15 Retrouvailles amères

Cela fait maintenant de longues minutes que Tess m'a ramené vers notre « campement » pour que nous discutions de la marche à suivre. Elle a eu la délicatesse de me laisser seule quelques instants, me laissant observer Anthéone à l'horizon. La cité me semble désormais froide, inhospitalière dans la lumière crue du soleil qui point lentement, et la rosée ne suffit pas à rendre à ces murs blancs leur aura mystique que je leur trouvais à notre arrivée. Je ne suis que brièvement la conversation entre Tess et Koora, cette dernière proposant de tenter de joindre les hommes du groupe en se transformant en oiseau, tout du moins pour tenter de les localiser. Je m'inquiète pour Eiffor, qui sans doute se retrouve à nouveau entre les mains de Korthos. Quant à Vy, ce dernier doit avoir retrouvé sa place dans les geôles, si les gardes n'y ont pas enfermé quelqu'un d'autre. Cela fait trois semaines que nous sommes partis, trois semaines que la maladie semble avoir progressé. Au loin, la rosée a laissé place à une brume opaque, grise. Je lève la tête vers la cime des arbres alors que Tess finit par convaincre Koora de ne pas prendre de risques inutiles : elle contactera Eiffor grâce à sa magie, et de là nous envisagerons la suite. Je me laisse hypnotiser par le pendentif de ma mère qui déverse ses reflets rouges sur l'ambre dorée, rappelant la lueur d'un soleil couchant enfermé dans ces pierres. Koora m'adresse un regard en coin, insondable, mais détourne rapidement la tête. Je crains que notre relation ne soit vouée qu'à des échanges brefs, nous sommes trop différentes, et pourtant je ne peux m'empêcher d'apprécier cette Drakéide, sa joie de vivre, son détachement. Ma psyché me semble être un labyrinthe permanent, parcouru de nappes de brouillard, de formes et de sons hostiles, un labyrinthe que je parcours en suivant les murs qui se dévoilent à mesure que je redécouvre ma vie. Pour Koora j'aime à penser que son esprit est un recoin perdu, vivace, peuplé d'animaux, d'un feu rassurant. Je me redresse pour m'approcher d'elle tandis que Tess se met à remuer les lèvres, prononçant son message muet. Quelques secondes passent, puis quelques minutes, jusqu'à ce qu'elle saisisse sa bague et se mette à jouer nerveusement avec :

- Oh non... Mais dans quelle panade tu m'as mise ? murmure-t-elle, ses yeux s'ouvrant avec stupeur

- Tu l'as eu ? ai-je demandé

- Oui, attends... C'est en cours... Mais...

- Qu'est-ce qu'il y a ? ai-je insisté

- Attends, s'il te plaît ; m'a dit Tess d'un ton qui ne souffrait aucune protestation, avant de demander le silence pour de longues secondes

- Il te parle ? a demandé Koora à son tour

- Oui. Bon euh... Il est avec Vy, chez Malathor...

- Avec Malathor ?! m'exclamais-je

- Oui. Avec Mala...

- Et Débrios ?; l'ai-je coupée ; et Valkin ?

- Euh... quoi ? a-t-elle demandé distraitement. Non, pas parlé non..

- Il a rien dit ? fis-je d'une petite voix

- Oh tu sais... vingt-cinq mots c'est court, m'a-t-elle répondu en détournant les yeux.

- Mais il a rien dit d'autre ?

- Point d'exclamation.

- Quoi ?

- Il a tenu à dire « point d'exclamation », précise alors notre barde

- Point d'ex...C'est inhabituel, ai-je simplement commenté. Il doit y avoir quelque chose d'anormal.

- Bah euh... il a dit que Kortos l'avait libéré aussi c'est p'tet ça ?