34. TPB

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Killian

Pour la première fois de ma vie, j'entrepris une introspection. Ce fut fastidieux. Steve m'aida beaucoup, et j'en parlais également à Adrien. Le courage me manquait pour en parler à mes autres amis. Et honnêtement, leur avis suffisait amplement pour me faire ouvrir les yeux. Je commençais à comprendre, j'étais malade.

Rien n'était certain ou confirmé, cependant, c'était une forte probabilité. J'étais malade. Réaliser ce fait me broya de l'intérieur, mais m'apporta pour la première fois une certaine porte de sortie. Être malade signifiait-il qu'un traitement était envisageable ? Pouvais-je être soigné ?

Contrairement à ce qu'Alec imaginait, je ne pouvais acheter un billet dès le lendemain de ma conversation. Il me fallait attendre. Attendre au moins une quinzaine de jours que je puisse me faire dépister puis attendre les résultats de mes analyses pour les IST. Retrouver Alec et se réconcilier pour finir par apprendre que j'avais attrapé une merde, n'était pas envisageable.

La première semaine fut la plus simple à supporter, je parvins à utiliser l'excuse du travail chez Bob ou de mes affaires administratives pour repousser mon départ. Alec restait compréhensif, bien qu'il ne soit pas naïf. La deuxième et troisième semaine se transformèrent en enfer personnel, jour après jour, mon esprit m'enfonçait de plus en plus dans l'auto-apitoiement. Je me répugnais, et la honte me poussa à éviter les appels avec Alec. Ne sachant plus quoi inventer pour justifier le fait de retarder mon départ, j'avais fini par imposer un silence. J'avais si peur.

La sonnerie de l'entrée retentit, me faisant sursauter sur mon canapé. Je m'empressai d'ouvrir pour découvrir Steve sur le pas de la porte.

—   Je dois te mener quelque part, annonça-t-il immédiatement.

—   Où ça ? m'étonnai-je.

—   Ne pose pas de question et fais-moi confiance.

Steve était mon plus proche ami - si on faisait abstraction d'Alec - alors ce fut avec une grande confiance que je le suivis. Sur le trajet, je commençais à douter, Steve ne répondit à aucune de mes questions. La route défilait et je savais que l'on se dirigeait vers L.A. sans savoir où exactement.

—   Allez, dis-moi où tu m'amènes, quémandai-je vivement.

Je savais qu'il ne me conduisait pas à l'hôpital ou dans un centre, puisque cette semaine j'étais allé faire un dépistage complet. J'attendais donc à présent les résultats. Penser à cette situation me brûla la gorge. J'avais été à deux doigts de la catastrophe. Je savais à quel point il était dangereux de pratiquer le sexe sans protection, je ne déconnais généralement pas avec ça puisque les coups d'un soir étaient mon quotidien. Alors le fait que cette fois, je me sois mis autant en danger en disait long sur mon état mental. J'avais dépassé les limites. Des limites que je pensais déjà très poussées me concernant. Je devenais un danger pour moi-même à mesure que le temps passait, mes comportements s'aggravaient et j'avais peur. Jusqu'où irais-je la prochaine fois ? Mieux vaut ne jamais le découvrir.

—   Tu vas aller consulter, parler à un professionnel.

L'annonce de Steve m'interpella l'espace de quelques secondes avant qu'elle n'apparaisse comme logique. Parler à un professionnel. Parce que quelque chose clochait chez moi.

—   Je suis malade, chuchotai-je comme si c'était un secret.

Steve tourna la tête et me regarda longuement, ses yeux me scrutaient, me mettant mal à l'aise.

—   Je ne sais pas si le terme est exact, mais... oui, Killian, tu as besoin d'aide.

Sa main se déplaça vers moi pour recouvrir la mienne en signe de réconfort. Malade. J'étais malade et j'avais besoin d'aide. Qu'est-ce que cela voulait-il dire ? Qu'avais-je ?

Alter EgoOù les histoires vivent. Découvrez maintenant