Chapitre 22 : À la recherche d'un Grizzly-Foudroyant

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La forêt du nord nous entourait de ses chênes majestueux et de ses pins, la senteur de leur sève embaumait l'air. Le sol était tapissé de feuilles mortes et de fougères ainsi que d'autres plantes dont la connaissance me faisait toujours autant défaut malgré mes dernières excursions. Tout au plus, j'étais désormais capable de repérer aisément de la damania écarlate grâce à la quête offerte par Élis.

En y songeant, il pourrait être bon de me renseigner davantage sur la botanique de ce monde. Puisque je ne pouvais utiliser la magie, connaître au minimum les plantes entrant dans la composition d'une potion de soin semblait être une sage alternative.

Encore faut-il savoir comment créer ladite potion... Mieux vaudrait aussi l'apprendre si possible.

— Je me demande si c'est comestible, murmurai-je en passant la main sur une feuille mordorée d'un arbuste lesté de baies violettes.

— Si tu tiens à ta vie, je te conseille d'éviter, répondit Sylvia. Ce sont des baies d'Aulm, elles sont toxiques pour les humains.

— Tu t'y connais en plantes ?

Son regard se fit légèrement plus sombre et lointain comme si elle songeait au passé. À la voir de profil, avec ses oreilles légèrement plus longues que la moyenne, on aurait véritablement cru voir une elfe.

— Un peu, finit-elle par dire évasivement. Tu peux les donner aux animaux, mais si tu en manges tu te tordras de douleur.

— C'est vicieux, dis-je en retirant ma main de la plante. Il y en a plus d'un qui a dû se faire avoir.

De tout temps, l'un des meilleurs moyens pour savoir si un aliment était toxique avait été de le donner à un autre être vivant, de préférence un animal. Si rien ne lui arrivait alors il y avait de fortes de chances que ce soit comestible, au contraire, au moindre signe d'empoisonnement, il entrait dans le savoir commun qu'il ne fallait pas en consommer. Pour le reste, il fallait compter sur le dévouement ou plus généralement sur la bêtise d'un humain. Au moins, ici il y avait de la magie, il devait donc y avoir peu de morts.

— Si tu as un mage compétent avec toi, il n'y a pas vraiment de problème. Avec un bon sort antipoison, tu pourrais même en faire ton repas en cas de nécessité.

— La magie est plutôt avantageuse, mais je préfère éviter de m'y risquer.

— Une sage décision.

Du coin de l'œil, je vis Séléna jeter discrètement une poignée de baie. Elle avait beau être intelligente, elle semblait tout aussi ignorante que moi quand il s'agissait de plantes. Pour tout dire, j'avais un peu de mal à la cerner. Elle était capable d'une grande maturité comme d'un comportement presque enfantin quand le sujet la touchait de près. Elle avait su voir en un clin d'œil à travers le jeu d'Émile, que ce soit dans ses motivations comme dans le fait que l'argent le maintenait dans sa position, participant à forger sa réputation à travers des pots-de-vin et le recrutement de mercenaires pour l'accompagner.

Elle avait l'air d'avoir de bonnes intuitions quand cela touchait aux combines et aux jeux des nobles. D'un autre côté, elle était légèrement naïve et immature quand cela concernait sa manière de se comporter avec les autres, comme si ce n'était pas naturel pour elle. Une pensée qui me rappela la manière dont elle s'était exclue de sa supposition selon laquelle Émile essayait de séduire les filles du peuple avec ses prouesses.

À croire qu'elle n'en fait pas partie...

Je jetai un regard en direction de Séléna, me demandant si je n'étais pas en train de me faire des idées. Elle était peut-être simplement maladroite. Elle me fit un sourire que je lui rendis avant de me replonger dans mes pensées.

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