Franklin et Lamar

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MICHAEL


Michael fixait des yeux un point devant lui, comme perdu dans ses pensées. Le silence n'était brisé que par le cliquetis régulier de l'horloge, au mur, qui égrenait les secondes pesantes de son rendez-vous. Vêtu de son impeccable costume anthracite, il restait assis, immobile, sur le confortable sofa dos à la baie vitrée, d'où filtrait l'ensoleillement éclatant de cette matinée.

« Votre fils, James... C'est un bon garçon ? »

Michael fut tiré de sa rêverie par la question. Il posa un regard à moitié absent sur le Dr Isiah Friedlander, installé face à lui sur son fauteuil, son regard inquisiteur et ses mains jointes sur ses genoux croisés.

« Un bon garçon ? répondit-il doucement. Un bon garçon. Pourquoi ? Est-ce qu'il aide les pauvres ? » Ses épaules s'affaissèrent. « Non. Il reste assis sur son cul toute la journée, à fumer du shit et à se branler en jouant à son jeu de merde. Si c'est ça qu'on appelle un bon garçon, pas étonnant que ce pays soit foutu. »

Friedlander se pencha en avant, les yeux de plus en plus inquisiteurs.

« Et à votre sujet ? s'enquit-il.

- Mon sujet ? »

Le psychiatre lui adressa une œillade entendue. Michael se redressa pour le toiser.

« Hey, répliqua-t-il. J'ai pas eu autant de chance que ce gamin. Quand j'avais son âge, j'étais déjà allé en prison deux fois. Je braquais des banques, je faisais le mac, je vendais de la came.

- Et vous considérez ceci comme des preuves de réussite ?

- C'était les seules opportunités que j'avais, asséna-t-il avec ferveur. Au moins, je les ai saisies.

- Et où est-ce que ces opportunités vous ont conduit, Michael ? »

Le père de famille soupira, ressentant soudainement un immense dépit. Puis, dans un élan de frustration, il se leva vivement.

« Elles m'ont conduit... s'emporta-t-il, ici, putain ! Le bout de la route. » Il se mit à faire les cent pas dans le bureau austère, décoré de bustes sculptés et d'œuvres d'art abstrait, le sang bouillant dans ses veines. « Avec une grande maison, un gamin bon à rien, et je continue de me confier à vous parce que personne d'autre n'en a rien à foutre. Oh, je vis dans un rêve, baby ! Et un rêve qui... qui est foutu, putain ! »

Friedlander le considéra un moment, aussi détendu et stoïque qu'à l'accoutumée.

« Dites ce que vous avez sur le cœur. » finit-il par déclarer.

Michael se rassit pesamment sur le sofa, encore plus dépité.

« Je pense que je viens de le faire, murmura-t-il, tête basse.

- Oh. » Il regarda sa montre, et un sourire fendit son visage terne. « Eh bien, je crois que nous en avons fini pour aujourd'hui. Même heure la semaine prochaine ? »

Michael eut un soupir cynique, avant de se relever pour marcher vers la sortie.

« Je suppose... Mais franchement, j'ai pas l'impression que tout ça fonctionne sur moi.

- Hmm... » Le psychiatre se leva à son tour. « Faire face à ce sentiment de futilité est un aspect essentiel du processus. Ouvrez-vous à cela. »

Michael ouvrit la porte du bureau, et le pas lourd, s'en alla sans même lui adresser un regard.

« Si vous le dites, doc... »

𝐺𝑟𝑎𝑛𝑑 𝑇ℎ𝑒𝑓𝑡 𝐴𝑢𝑡𝑜 𝑉Où les histoires vivent. Découvrez maintenant