III. Les liens du passé

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Dabi

Cinq minutes plus tard, nous sommes assis côte à côte sur les sièges noirs de la vaste salle de cinéma. Elle a seulement pris une boisson, tout à l'heure, mais j'ai rajouté un paquet de chips et deux magnoms en devinant sa gêne. Elle ne fait aucun bruit en mangeant, discrète comme une petite souris. Je l'observe du coin de l'oeil et remarque ses joues couvertes de tâches de rousseur arrondies par son grignotage silencieusement. Je profite qu'elle ait les yeux fixés sur le grand écran encore noir pour tendre la main vers son visage et prendre une de ses joues entre deux doigts.  
     
- Finalement, je vais t'appeler petit hamster, annonçai-je avec un sourire amusé. C'est plus mignon, même pour un renard. 

Elle tourne ses yeux incendiés vers moi, elle rougit violemment en avalant de travers. Je lui tape doucement dans le dos pour faire passer, elle prend une gorgée à sa bouteille d'eau, des larmes perlent aux coins de ses paupières.

- Déjà... Je suis pas mignonne, commence-t-elle, son visage reprenant une teinte blanche. Ensuite... ne m'appelle pas hamster. Et encore moins renard.

Un voile mélancolique recouvre son regard orangé quand elle prononce le nom de l'animal roux, je comprends avoir touché un point sensible. Quelqu'un l'a déjà appelée ainsi, et ça la rend nostalgique. Peut-être un ancien petit-ami violent. Ça expliquerait sa réaction quand je me suis approchée d'elle, hier soir. En fait, vu ses manières, je suis pratiquement sûr qu'elle est vierge, mais il faut toujours garder le bénéfice du doute. Et je vais pas lui poser la question, elle le prendrait comme une offense. Je stoppe ma réflexion. Je n'ai pas à réfléchir à ça.

Mirajan

Les lumières s'éteignent, l'obscurité rampe sur la salle. Le film commence, les cris d'horreur s'élèvent depuis les hauts-parleurs. Les images défilent à l'écran pendant près d'une heure. L'histoire est à propos d'une fête foraine se révèlant être en réalité le théâtre des meurtres les plus cruels. Banal.

Au bout d'un moment, un screamer surgit, la moitié de la salle bondit sur son siège, même Dabi sursaute. Je remarque sa main crispée sur l'accoudoir nous séparant. Il a peur. Je n'aurais pas dû l'amener ici, j'ai mal choisi le film.

- Tu veux sortir ? murmurai-je. On peut partir, si tu veux...

Ses yeux aigue-marine glissent sur moi, tout aussi calme qu'à l'habitude. 

Dabi

Je m'étais à moitié endormi quand un grand bruit me secoue, me réveillant comme un coup de fusil. Des thrillers de ce genre, j'en vois tous les jours en direct.

- Tu veux sortir ? me demande-t-elle à voix basse. On peut partir, si tu veux...

Je la regarde, un peu surpris. Elle croit que j'ai peur. Ses beaux yeux orangés illuminés par la lumière tamisée me fixent avec une forme d'inquiétude coupable qu'elle s'efforce de cacher derrière un masque calme. Cette fille jusqu'à présent détachée de tout s'inquiète pour un gars qu'elle a rencontré la veille.

- Tu te sens mal ? suppose-t-elle. Je suis désolée, je n'aurais pas dû... 

J'entremêle mes doigts aux siens avant de nous poser sur l'accoudoir, lui coupant la parole sans ouvrir la bouche. Encore une fois, un élan instinctif m'a poussé à effectuer ce mouvement qui me semble aussi naturel que respirer. Elle se tait, ses joues rosissent tendrement.

- Lâche-moi, gromelle-t-elle.

- J'ai moins peur comme ça, ma renarde, mens-je avec un sourire goguenard. Tu me laisses me rassurer à tes côtés ?

Regarde-moi dans les yeux {Dabi x OC}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant