Chapitre 12 : Aller de l'avant

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Mes poings frappèrent le sac de sable. Mes jointures en saignaient presque. En donnant un dernier coup de pied, boosté par le fluide, le sac se décrocha et se vida sur le sol. Je soupirais, allant de nouveau chercher un balai.

Jun m'en avait mis trois en réserve. C'était le dernier. En parlant du loup, il entra dans la salle d'entraînement, et observa les dégâts.

– Je ne dirais pas que je suis malheureux de te voir réussir à contrôler les énergies, mais tu commences à coûter cher en sacs de sables.

– N'en rachète pas, marmonnai-je en m'approchant du balai. Je vais frapper dans des arbres.

Jun m'arrêta sur le chemin, une main sur mon épaule.

– Tu vas raser une forêt si je te laisse faire. Que tu aies compris la clé de l'utilisation des énergies, c'est parfait. Mais utiliser comme émotion ta colère envers toi-même, je ne suis pas sûr que ce soit la bonne solution.

Sans répondre, je me dégageai et saisis le balai. Mes coups sur le sol étaient sec, durs.

– Amy, soupira Jun. Tu n'aurais pas pu le sauver. Il était condamné avant même qu'on arrive.

Encore cette conversation. Depuis quatre mois que nous étions rentrés de la mission de rang C, Jun n'avait cessé de me répéter cette phrase. Et à chaque fois, un objet finissait cassé à la fin de notre échange.

Puisque la mission avait été un... « succès », et que rien d'anormal, du moins dans le monde des Lumières, ne s'était produit, nous n'étions plus à l'écart. Nous effectuions des missions, comme toutes les équipes, avec notre superviseur. Toutes des réussites, tant bien que mal.

Mais une seule mission avait impliqué une mort. Celle de Ron. Je savais pertinemment qu'il aurait fini par mourir. Que ce soit de sa maladie de peau, ou de la contamination. Mais j'avais eu la possibilité de jouer contre le destin. Même si ça avait été pour quelques mois, quelques semaines.

Si j'avais empêché l'Ombre de lui injecter cette seringue, il n'aurait pas muté si abruptement. J'aurais pu continuer à absorber sa maladie, peut-être au bout d'un moment, aurais-je pu le sauver. Il aurait pu s'expliquer avec ses parents.

Ceux-ci, après avoir enfin réalisé ce qu'ils avaient fait, ne cessaient de demander pardon. Pas à nous. Mais à leur fils.

Nous étions restés quelques jours après le décès du garçon, pour nettoyer les dégâts et retrouver l'Ombre. Les habitants du village étaient reconnaissants que nous les ayons débarrassés de la secte. Ceux qui en faisaient partis s'étaient enfuis. Finalement, personne n'était mort dans l'incendie de l'église.

Le problème... c'était que les parents de Ron avaient vu un Mutant. Alors nous avions dû leur faire oublier. Ils avaient pleurés leur fils pendant deux jours, puis avaient reçu un élixir. Ce dernier agissait sur la mémoire, rendant flous les mois précédents. Finalement réveillés à l'hôpital, ils croyaient désormais avoir subi un accident de voiture, et avoir perdu leur fils dedans.

Je trouvais ça injuste, car ils étaient aussi fautifs dans le sort de Ron. Mais ils pensaient désormais le contraire, que c'était seulement le destin. Depuis, je n'avais de cesse de ressasser ces moments. Avec un goût amer, je m'imaginais ce que j'aurais pu changer.

Je savais que cela ne servait à rien, mais mon cerveau s'obstinait à le faire. Alors que je pensais que ma colère et ma rancœur se dissiperaient avec le temps, j'avais faux. Elles n'en étaient que plus fortes.

Jun disait que j'avais besoin d'un déclic, pour comprendre que je n'étais pas toute puissante. Au fond, je le savais, que certaines choses étaient inéluctables... mais c'était plus fort que moi. Je n'arrivais pas à aller de l'avant. Cela ne faisait que renforcer ma colère.

Mutante - Tome 3Où les histoires vivent. Découvrez maintenant