Mutante - Tome 3

Chapitre 14 : Adam

Ma tête bougeait sans que je ne le lui demande. Quelque chose touchait mon crâne endolori. Je n'arrivais pas à ouvrir les yeux. J'entendis des murmures, sans pouvoir les déchiffrer.

Quelqu'un souleva ma paupière, mais je ne pouvais toujours pas voir. J'étais vidée, et j'avais mal partout. Surtout à mon aile déchirée. Mon aile était déchirée ? Comment ? Tout s'embrouillait dans ma tête, percée par un sifflement insupportable.

Je sentis quelque chose passer sous mes jambes, et dans mon dos. Je fus alors soulevée de terre, et plaquée contre un torse ferme. Un homme. Ma tête ballottait contre son épaule, alors qu'il marchait. Je voulais geindre pour extérioriser ma douleur. Mais mes cordes vocales, comme mes lèvres, ne tremblèrent pas.

Je savais que l'on avançait. Je savais que quelqu'un me portait. Quelqu'un dont je ne connaissais pas l'odeur. A moins que... elle me disait quelque chose, mais n'était pas tellement familière. Tout était déjà si confus. Un long soupir sortit de ma bouche. C'était le seul mouvement que j'avais réussi à faire. J'entendis un léger rire.

Soudain frigorifiée, je tentais de contracter mon corps pour me blottir. Je ne savais pas si ça avait fonctionné, mais la personne qui me portait ramena ma tête dans le creux de son épaule. Je tentais d'ouvrir les paupières. Tout ce que j'y gagnais, c'était à nouveau perdre connaissance.

Ma première sensation fut celle de la couverture qui piquait mon menton. Mes bras étaient si emmitouflés dedans que je n'arrivais pas à les bouger. Il y avait aussi une agréable odeur de poulet et de feu de bois dans l'air.

Ce fut après que se pointèrent les sensations désagréables. Un élancement atroce dans ma tête. Et une douleur étrange, dans... mon aile. Mon aile ?

Les derniers souvenirs me revinrent en un bloc, si bien que mon cœur s'accéléra brusquement. Je bougeais mes membres – ou plutôt j'essayais – sous le coup de la panique. Mon corps entier était atrophié, et ma gorge desséchée. J'ouvris alors brusquement les yeux. Du gris. De la pierre. Où étais-je ?

Un peu plus paniquée, ma respiration devint saccadée, alors que j'essayais tant bien que mal de me dégager. Un bruit étrange sortit de ma bouche, à mi chemin entre la plainte et le grognement. Deux mains se posèrent sur mes épaules.

– Tout va bien, respire, me rassura une voix.

Cette voix... je la connaissais. Mais malgré mes yeux ouverts, tout était flou. J'arrivais à peine à discerner le visage de l'homme à qui je parlais. Je clignais plusieurs fois des paupières. Je voulus me les frotter, mais mes mains restaient bloquées. Je ne comprenais pas pourquoi. En tirant un peu plus fort dessus, une bruit métallique retentit dans la grotte.

– Vaux mieux que tu t'éloignes, elle va encore essayer de te tuer, suggéra une seconde voix légèrement amère.

– Ses yeux ne sont pas rouges, cette fois, contredit la voix de l'homme près de moi.

– Et c'est sensé indiquer qu'elle n'a plus de folie meurtrière ? railla l'homme plus loin.

Je secouais mes mains. Elles étaient attachées. Je comprenais mieux pourquoi je n'arrivais pas à les ramener vers ma tête. Je tirais encore dessus, voulant faire céder les chaînes.

– Elle va te mordre, éloigne-toi, conseilla l'homme, presque amusé.

– Arrête tes idioties, tu veux ? maugréa celui près de moi.

La panique commençait à me submerger de nouveau. Et je ne voyais toujours pas net.

– Détachez-moi, ordonnai-je d'une voix cassée et rocailleuse.