Chapitre 17

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Luc se réveilla en retard. Il n'avait que huit minutes pour se préparer avant l'arrivée de son bus. Il sauta hors du lit, manqua d'éjecter son violon qui se trouvait à côté de lui et parti à la recherche d'habits au fin fond de son placard. Il passa dans la salle de bain rapidement, ébouriffa ses cheveux comme à son habitude et enfila une paire de chaussures. Par chance, son sac était fait et attendait dans un recoin de la chambre. Il prit son téléphone et se rua dehors, en oubliant son paquet de cigarettes dans la cuisine.
La fraîcheur le fit frissonner, bien qu'il ne la trouvât pas complètement désagréable. Il remonta la ruelle qui menait à une route plutôt passagère et attendit quelques instants le bus.

~

-Luc - lui dit Esther alors qu'ils se retrouvaient devant la grille du lycée, à l'heure de la recréation - je suis allée à l'hôpital hier.

-Je suis au courant tu m'as demandé le numéro de sa chambre souviens-toi.

Leurs regards étaient perdus dans le vague et le bruit autour d'eux ne constituait qu'un brouhaha. Luc regarda Esther. Ils étaient assis sur un petit muret et elle se roulait une cigarette. Ses cheveux rouges dansaient dans la brise matinale et ses yeux bleus étaient illuminés par le soleil. Luc chercha le paquet de cigarettes dans son sac et jura.

-Putain ! Je les ai oubliées !

-Tiens, je t'en roule une si tu veux.

-C'est bien parce que j'en ai pas alors.

-Estime-toi heureux que je partage avec toi. C'est payé avec mon argent je te ferais savoir alors si t'es pas content reste stressé et ingrat toute la journée.

Luc n'aimait pas tellement les roulées. Il disait que c'était pour les gens qui aimaient fumer du gazon sec et Esther lui rétorquait que fumer des industrielles en paquet c'était pour les coincés bourgeois qui ne fument que pour le style.

-Tu sais j'ai un peu discuté avec ta mère ...

-Je veux pas tellement en parler là ...

-Mais Luc, quand est-ce que tu voudra en parler putain ?!

Elle plongea son regard profond dans les yeux de son meilleur ami.

-Esther je ne vois pas ce qui te pousse à t'occuper d'elle comme ça et puis toujours lui parler etc ...

-Tu sais quoi ? Ta mère et moi avons pleins de points communs. Premièrement on t'aime et deuxièmement on s'occupe de toi. Ça fait neuf ans qu'on se connait toi et moi et j'ai l'impression que des fois j'occupe le rôle qu'elle devrait avoir. Mais tu vois, la différence c'est que moi tu m'écoute parce que tu n'as pas les mêmes choses à reprocher qu'à ta mère.

-Mais c'est normal, vois la vérité en face elle a trompé mon père et elle ne s'est occupée de moi que parce qu'il est mort !

-Est-ce que ce sont tes affaires ? Dis-moi, est-ce que ce sont tes affaires ? Ce qu'elle a fait envers ton père ne les regardaient qu'eux deux, c'étaient leurs histoires de couple ! T'étais gosse Luc, t'étais gosse ! - son ton avait changé - Tu as grandi dans l'idée que ta mère était quelqu'un de mal mais c'est parce que ton père a pris la décision de t'élever tout seul tu vois ? Ta mère s'en veut et ça t'es au courant mais tu veux pas le comprendre et c'est ce que je te reproche. Elle a besoin que tu lui parle, elle a besoin que tu lui dise que tu l'aime et elle a besoin que tu prenne soin d'elle un peu !

-Arrête de la défendre s'il te plait. T'es pas sa psy n'y rien d'autre pour elle, t'es ma meilleure amie.

-Je la défends pas je vois les choses de l'extérieur et t'as raison je suis pas sa psy non plus. Mais ne pense pas que c'est parce qu'on prête un peu d'attention à quelqu'un que l'on est son "psy". - elle imita les guillemets avec ses doigts fins - Tu lui as déjà fait preuve d'amour pour de vrai ? Tu lui as déjà dit que tu l'aimais ? Dis moi Luc tu l'as déjà fait ça ?

Luc regardait son amie avec incrédulité. Elle était sérieuse et prenait vraiment tout cela à cœur. Une larme s'échappa de l'œil du jeune garçon et roula lentement sur sa joue. Elle avait raison au fond, il n'avait aucun souvenir d'une quelconque preuve d'amour. Sa larme tomba sur ses genoux et fut suivie par quelques autres perles salées.
Le brouhaha semblait s'être tut mais ce faux silence fut rompu par la sonnerie annonçant la reprise des cours. Esther jeta son mégot par terre et sauta du petit muret comme un chat docile. Elle se retourna, fixa Luc quelques secondes puis s'éloigna vers les bâtiments de cours.

L'espace d'une seconde.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant