Chapitre 45

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PDV Anne, mi-octobre, vendredi, 15h34, à la ferme,

Dji est en déplacement à un salon international de tatouages en Belgique pour promouvoir son travail et se faire un nom dans le milieu, paraît-il, alors j'ai été très surprise quand Is m'a appelée pour me demander de garder Elise. Habituellement c'est Axelle qui s'en charge ou Mira, mais elle ne rentrera que dimanche.

Des soucis dans sa famille les ont obligés à partir quelques temps, et je dois dire que ça me convient tout à fait. Bien que depuis mon retour je n'ai pas eu l'occasion de la revoir, l'image que je garde d'elle est celle d'une femme sulfureuse, sensuelle et qui attirait Dji... alors même s'il m'a affirmé qu'ils n'avaient pas couché ensemble et que son attirance pour elle c'était du passé, une once de jalousie refuse de me quitter.
Mais peut-être que le vrai problème c'est que Dji n'aime pas parler de lui et de ce qu'il ressent, du coup il me distille quelques bribes de réponses et croit que je peux m'en contenter.

Bref, Elise est malade et Is a préféré la garder à la maison, donc il m'a demandé si je pouvais veiller sur elle. Peu après mon arrivée, Is est parti je ne sais où, mais m'a prévenue qu'il restait joignable et qu'il reviendrait vite.

Au salon, je suis debout devant le grand dessin mis sous verre, qui habille le mur entre le salon et la salle de séjour.

Je contemple cette femme, nue, de dos, légèrement cambrée, qui relève ses longs cheveux ondulés en un chignon négligé. On aperçoit l'arrondi d'un sein, mais pas son visage. Elle est agenouillée sur un lit et la draperie dévoile la naissance de ses fesses. Il se dégage beaucoup de sensualité de ce fusain, qui n'est pas signé, mais je jurerais que c'est Dji qui l'a fait pour représenter la mère d'Elise... c'est sûrement la seule image qu'il y a d'elle dans la maison.

Le babyphone grésille et m'envoie les chouinements d'Elise qui remue dans son lit.

Je soupire en m'asseyant sur le canapé et tente de mettre un terme à mon introspection, mais c'est peine perdue. Ça fait trois mois que Dji et moi sommes ensemble. On continue de se voir deux à trois fois par semaine, ce qui d'une certaine manière me donne le sentiment que les choses sont exactement comme avant, parce qu'on ne se voit que chez lui.

Certes, il m'a présenté sa fille, mais on ne fait jamais rien tous les trois et les quelques activités qu'on a faites lui et moi c'est parce que j'ai insisté. Il me semble loin le temps, mi-août en réalité, où il voulait m'emmener au resto et au ciné.

En plus, Dji ne me parle jamais de ce qu'il fait en dehors de son salon de tatouages, ni de ceux que Is appellent parfois leurs frangins et que Dji ne m'a pas présentés officiellement, exception faite de Is et Sparrow.

Je n'ai pas non plus oublié la tentative d'agression d'un de ses potes, mais je n'ai pas encore eu le courage d'aborder le sujet avec Dji. Je voudrais qu'il m'explique les choses, que ça vienne de lui et pas d'une de mes tentatives de pêches aux infos.

Dji compartimente tout et refuse même de parler d'Angélique, de me dire comment ils se sont rencontrés, comment elle est morte, pourquoi il n'y a pas de photos d'elle dans la maison, hormis le fusain. Tout semble verrouillé autour de lui et ça me donne l'impression de n'être qu'une activité ponctuelle dans sa vie.

Je sais qu'il faudrait qu'on aborde ces points sans attendre qu'une dispute éclate pour sortir les « dossiers qui fâchent », mais quand le calme règne sur la mer personne n'a envie de déclencher un ouragan.

Le bilan de cette réflexion douloureuse m'aide à comprendre que je réprime mon envie de lui dire que je ne sais pas jusqu'à quand le sexe me suffira entre nous... Peut-être que j'ai tort d'en vouloir plus, car si notre relation est restée aussi fragile qu'au début, c'est qu'elle n'est pas faite pour durer.

Les dévoyés 🔞 (1er Jet- terminé)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant