Le cri de la mer

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Suite du flashback de la reine Betyla Rose

C'est alors qu'elle m'expliqua tout. Les prémices de notre création, le fonctionnement de l'utérus royal. Tant que je ne me reproduisais pas, j'avais la même espérance de vie que les sirènes stériles. J'allais mourir rapidement uniquement dès le moment où je me reproduisais pour la première fois.

Elle m'expliqua également notre mission, nettoyer les océans. Pour le reste, je dus me débrouiller toute seule, car elle disparut du jour au lendemain, me laissant avec plusieurs cellules oeuf.

Avant que Ambre, puis Agnès, puis Franchesca ne viennent au monde, j'étais restée seule plusieurs mois dans cet immense bateau. J'étais triste. J'avais l'impression qu'on m'avait volé mon humanité. Je n'avais plus rien à perdre. J'avais donc réfléchi à une organisation de notre société, à des pratiques, à des rituels que les sirènes devaient faire.

Je jouais au piano, comme dans mon ancienne vie. Chaque jour, je perdais mes souvenirs, chaque jour, j'oubliais un peu plus qui j'étais avant. A la fin, ce qui m'était restée, c'était des bribes de mon ancienne personnalité. Ma confiance en moi, mon jeu de piano, ma douceur, certaines fois.

Je m'étais vue me transformer en monstre affamée de sang. J'étais contre nature. Les différents génomes des différentes espèces altéraient mon cerveau et me rendaient nerveuse, sanguinaire, colérique.

A chaque fois qu'une sirène naissait, c'était la même chose. Je la voyais émotionnelle, humaine, puis elle se transformait petit à petit en monstre, en machine. Au début, je souffrais, puis la notion de souffrance devint abstraite. Je ne ressentais plus rien, seulement du plaisir. Le plaisir à manipuler. Je ressentais aussi de la colère. De la colère contre Rozenn Angel et Amandine Westbrook. Je leur en voulais de m'avoir transformée en monstre. Je n'avais qu'une envie, c'était de mourir.

Lorsque j'avais dit à Marion Van de Kampf  de rester en vie, ce n'était pas au sens propre du terme. Je lui avais dis en vérité, de garder son humanité.

La transformation en sirène nous transformait en version corrompue de nous même. Cependant, j'avais constaté avec dégoût que la reine Betyla Rose avait toujours fait partie de moi. C'était une version de moi qui se devait d'être cachée pendant toute ma vie.

Juste avant ma mort, il ne me restait plus rien. J'avais oublié ma famille, mes amis, ma vie. J'avais oublié que j'étais humaine, avant. J'avais oublié que je n'avais pas toujours été ce que je suis.

Dans l'au delà, je suis toujours la reine Betyla Rose. Je ne me suis pas retrouvée. Ce que j'étais à l'origine est perdu pour toujours. Je suis condamnée à rester cette créature froide, triste et torturée.

Bloc opératoire du docteur Agnès

Point de vue extérieur

Agnès replaçait délicatement l'utérus royal dans le corps de Ambre, qui, comme la reine Betyla Rose souffrait, mais ne le montrait pas.

A part la tristesse d'avoir perdu sa reine, Ambre ne ressentait rien. L'utérus royal devait une partie d'elle, et elle se demandait qu'est ce qui allait changer. Oui, c'est vrai. Qu'est ce qui changerait ?

L'opération était longue et minutieuse. Agnès était toujours sous pression. Si elle endommageait l'utérus, elle serait dans de gros problèmes, l'espace serait dans de gros problèmes. Cependant, elle faisait du bon travail.

Était-elle triste que la reine Betyla Rose soit décédée ? Non. La mort était une libération, pour elle. En effet, depuis qu'elle avait rencontré Enzo, elle avait compris que son existence de sirène était malheureuse. Elle avait compris qu'elle était condamnée à obéir, à perpétuer l'existence et la postérité de son espèce. Betyla Rose devait sûrement ressentir la même chose. Sa vie n'avait aucun autre but.

Le cadavre de la reine portait toujours son diadème au cinq diamants blancs. Il faudrait le retirer, le nettoyer et le donner a Ambre. Ensuite, il faudrait demander à Ambre s'il faudrait aménager la chambre royale à son image.

L'opération touchait à sa fin. Plus que quelques vaisseaux à assembler. Ambre allait ensuite former un cocon pour que son corps soit transformé par l'utérus royal. La reine Betyla Rose avait obtenu sa queue duochrome. C'était la seule à avoir une queue de ce genre. Quelle serait la caractéristique de Ambre ?

Six heures après le début de l'opération, Agnès avait enfin terminé. Elle regarda le corps d'Ambre se recouvrir de mucus blanchâtre, et ce mucus, s'épaississant, forma un cocon. Les sirènes soldates transportèrent le cocon dans la salle du trône. Agnès et les docteurs nettoyèrent la salle opératoire.

Agnès tourna son visage vers le corps sans vie de la reine Betyla Rose. Un sentiment étrange l'envahît. Elle comprit qu'elle n'allait plus jamais revoir la reine.

Était-ce de l'affection, ou de l'habitude ? Jamais elle n'aurait la réponse. Aujourd'hui, la reine Betyla Rose était délivrée des souffrances qui venaient avec la transformation en sirène. Quand serait-elle délivrée à son tour ?

Elle demanda aux autres sirènes de sirènes de l'aider à refermer la cicatrice au niveau de l'utérus royal dans le corps de la reine de Betyla Rose, puis elle leur ordonna de la laisser seule.

Le corps de la reine devait être rendu à la mer par une cérémonie. Cependant, alors qu'elle se trouvait seule avec le cadavre de la reine, elle eut une idée.

Fin de la partie III.