Chapitre 6 - Eredan

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Il avait peur, si peur que son cœur risquait à tout moment de bondir hors de sa poitrine !

Emmitouflé dans sa couverture et la tête cachée sous son oreiller, Eredan pouvait encore l'entendre murmurer dans la pénombre oppressante de sa chambre à coucher. Il sentait sa présence dans le froid glacial, si proche....

Pars. Pars. Pars.

Il n'avait jamais souhaité quelque chose avec autant d'ardeur. Il voulait que ça se termine, qu'il disparaisse à jamais avec la lumière du jour.

Un poids fit s'affaisser le matelas à côté de lui.

Le petit garçon se crispa de terreur, ses yeux débordant de larmes. Puis, des bras chauds le l'encerclèrent dans une étreinte rassurante, apaisant sa terreur.

L'enfant ouvrit soudainement les yeux.

Derrière son père se tenait une forme, translucide, une femme au cou ensanglanté.

Il hurla.

* *

*

Tremblant dans ses vêtements encore humides, le jeune homme chercha un instant à reprendre sa respiration tandis que l'écho de son cri se perdait dans le silence de la nuit. Ses paupières lourdes s'ouvrirent et se fermèrent en saccade sur un paysage qu'il ne reconnut pas. Où se trouvait-il ? Que faisait-il là ? Il avait chaud, il avait froid, il avait mal et...

Il n'arrivait plus à bouger.

Pris de panique, l'esprit encore engourdi par les songes, Eredan s'agita dans tous les sens en tentant en vain de se défaire des liens qui maintenaient son corps entravé, pour finir par gémir de douleur lorsqu'il voulut s'aider cette fois-ci de ses jambes.

Une main autoritaire se posa sur son front moite.

— Calme-toi, tu risques d'aggraver ta blessure.

La voix lui était inconnue mais sa douceur stoppa aussitôt l'affolement qui le secouait. Le souffle court et les tempes lancinantes, Eredan tenta d'identifier, avec beaucoup de difficultés, la silhouette accroupie près de lui. Si seulement ses yeux avaient pu arrêter un instant de transformer le monde en taches floues et mouvantes...

— Bois. Ce remède te fera du bien.

Sans réfléchir une seconde à la probabilité qu'on tentait peut-être de l'empoisonner, Eredan ouvrit ses lèvres asséchées pour engloutir le contenu de la gourde penchée vers lui, avant que le goût âcre ne lui prenne la gorge tout entière : il recracha le tout dans un "Pouah !" écoeuré. C'était la chose la plus infâme qu'il eût goûtée de sa vie !

À présent parfaitement lucide suite à cette attaque perfide de ses sens, Eredan reconnut sans mal la femme qui se tenait à ses côtés. Impassible devant le spectacle d'une partie de son remède gâché, il s'agissait de la ravisseuse qui s'était interposée pour le protéger de l'homme qui l'avait attaqué par surprise.

Un instant, le souvenir du regard sadique de ce dernier lui transperça le crâne. Il l'avait regardé, le haïssait d'une haine sans nom, pourtant Eredan ne connaissait même pas son prénom.

— Évidemment, marmonna-t-elle entre ses dents avant de le fixer de son seul œil.

Eredan déglutit. L'Élytre n'avait pas l'air du genre commode et il avait été plus que témoin de ce qu'elle était capable de faire. Il ne pouvait s'agir que d'une Initiée du Corps. Une probable déserteuse qui avait choisi les Élytres.

— Tu as envie de mourir Novice ? l'interrogea-t-elle sèchement.

Pour toute réponse, le blond ne put que secouer vivement la tête. Il avait la bouche trop pâteuse pour pouvoir parler et son instinct de survie lui soufflait de ne pas agacer encore plus inutilement l'Élytre de mots inutiles.

Sang PerduOù les histoires vivent. Découvrez maintenant