Leïmy avait entendu Dévlin et Negg crier mais elle ne s'en était pas préoccupé. Si Negg avait envie de se battre, cela était son problème à lui, non à elle. C'était ce qu'elle se disait pour se débarrasser de la détresse qui l'avait envahie quelques minutes plus tôt.
Son besoin d'oxygène se renforça après cette dispute et elle ouvrit à nouveau la fenêtre. Une bouffée de vent s'engouffra dans la cabine pour aller se perdre dans sa chevelure. Elle inspira profondément, emplissant ses poumons d'un air humide et chargé d'une odeur d'iode. Juste à son parfums, la Mer Désertique ressemblait énormément au second océan de Welkonn.
Alors qu'elle allait se détourner pour sa rasseoir sur le lit, quelque chose attira son oreille. Un son provenant de l'extérieur pénétrait dans la petite pièce par la fenêtre.
Ce n'aurait été que le bruit des vagues se fracassant sur la coque du navire ou les piaillements d'oiseaux marins, Leïmy ne s'y serait pas intéressé mais il s'agissait d'un chant. Elle se hissa sur la pointe des pieds pour regarder par la fenêtre mais elle ne vit rien ni personne qui aurait pu expliquer ce chant.
L'hypothèse la plus logique était que les marins chantaient sur le pont et que le vent charriait leurs paroles jusqu'à Leïmy mais c'était une voix de femme et la langue était incompréhensible. Les mots se ressemblaient tous. Ils étaient sifflants et légers, évoquant à Leïmy des volutes tourbillonnant élégamment dans l'air. La jeune fille avait beau chercher à se convaincre que c'était totalement impossible, elle ne pouvait que constater que le chant provenait de la mer.
D'autres voix féminines se joignirent à la première qui se noya parmi elles. Certaines reprenaient la même chanson que celle qui avait attiré Leïmy alors que d'autres entonnaient une nouvelles mélopée sur le même air envoûtant.
Leïmy commença à se sentir nauséeuse et la tête lui tourna. Elle recula en vacillant et elle se rattrapa au mur pour ne pas chuter. Elle secoua la tête pour tenter de chasser ces sensations désagréables.
Les voix se turent et la soudaine faiblesse de Leïmy la quitta.
Elle regarda à nouveau par la fenêtre. Elle distingua la côte de Welkonn au loin mais rien de plus.
Elle n'avait pas rêvé, elle en était certaine, alors d'où venait ce chant et qui le psalmodiait ? Personne d'autre ne semblait l'avoir entendu, cette chanson lui était donc t-elle adressée ?
Sur ses gardes, Leïmy se coucha sans défaire les draps. L'étrange chanson continuait à résonner dans son crâne, tournant et virevoltant dans son esprit.
Elle ferma les yeux et, n'ayant rien d'autre à faire, elle chercha le sommeil mais ce dernier ne se laissa pas attraper. Il la fuyait.
Leïmy s'agaça au bout de quelques minutes.
Elle se leva et sortit, toujours hantée par les voix mystérieuses.
Les premières personnes qu'elle trouva furent Batquisse et son second. Elle se plaça à leur hauteur et leur demanda :« Vous avez entendu ça ?
- Quoi donc ?
- Je suis vraiment la seule à avoir entendu ? C'est une blague !
- J'ignore ce que tu as entendu mais ce n'était peut-être que dans ta tête. Cela faisait un moment déjà que je me questionnais sur ta santé mentale mais, à présent, j'ai confirmation que tu es folle. Je ne sais pas si notre famille est en cause mais je suis sûr que tu ne te priveras pas de m'accuser puisque tout est toujours de ma faute ! N'as-tu pas pensé que tu pouvais être en partie responsable de ton malheur ? Personne ne t'a réellement forcée à être la garce que tu es aujourd'hui !Leïmy resta un instant immobile, ayant peine à croire ce que Batquisse venait de lui parler de la sorte, puis ses lèvres se tordirent en un rictus de rage.
Elle tenta de se jeter sur son demi-frère mais quelque chose la retint. Le second la ceintura de ses bras de colosse et la souleva du sol.- On se calme.
Recommanda t-il d'une voix apaisante mais ce n'était pas suffisant pour calmer Leïmy. Elle se débattit farouchement, envoyant son coude dans les côtes du second. Tout l'air contenu dans les poumons de ce dernier fut expulsé d'un coup. Il se plia en deux en lâchant Leïmy.
La jeune fille roula sur les planches du gaillard puis bondit sur ses pieds. Le second tenta de l'immobiliser à nouveau mais elle fut plus rapide et elle lui faucha les deux jambes puis enchaîna en lui frappant le front contre le sol, le sonnant.
Le colosse étant hors d'état de combattre, la mercenaire se tourna vers Batquisse qui s'était emparé d'un poignard. Leïmy ne savait pas si il sortait des plis de ses vêtements ou d'ailleurs et elle moquait bien. Ce n'était pas une lame aussi ridicule qui allait la faire reculer.
Ils s'affrontèrent d'abord du regard puis Batquisse chargea, lame en avant. Leïmy se déporta sur le côté d'un petit saut. Le poignard se ficha dans le bois du bastingage et Batquisse ne se repositionna pas immédiatement, entraîné par son élan et manquant de pratique.
Leïmy passa derrière lui et lui tordit le bras dans le dos pour l'immobiliser. Elle songea à lui glisser quelque chose à l'oreille mais elle se ravisa. A quoi bon lui signaler qu'elle le détestait ? C'était évident.
Trouvant que le bastingage était une arme bien pratique, elle saisit Batquisse par la nuque, enfonçant ses ongles dans sa peau, et le cogna contre le bois à plusieurs reprises.
Le second, qui venait de reprendre ses esprits, se précipita vers la mercenaire. Cette dernière lâcha son demi-frère qui s'affaissa comme un sac de jute.
Toujours écumante de rage, elle se tourna vers le second et le rassura :
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Chroniques d'une Mercenaire - Tome 4 : Par-delà la Mer [Terminé]
FantasyUn an après l'union des magies à Welkonn, Leïmy et Negg ont fuit la guilde des mercenaires, à présent dirigée par Gammon, au profit de celle des voleurs, aux côtés de Leïje, leur seul soutien en son sein. De son côté, Dévlin, qui a retrouvé sa place...