Chapitre 33

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« Sérieusement, que fait-on là ?

Grogna Negg d'une humeur massacrante depuis leur rencontre avec Sire Délèk.
Dévlin comprenait parfaitement le ressentiment que devait éprouver son frère. Il aurait également été furieux si c'était à sa compagne que le souverain avait fait son numéro de charme mais il commençait à difficilement supporter la mauvaise humeur du rouquin.
Ce dernier ne cessait de grommeler mais, au moins, il n'avait tué personne.
Pour le moment.
Voyant que son frère avait décidé de l'ignorer, Negg répéta :

- J'ai dit : que fait-on là ?
- Nous choisissons nos habits de bal.

Répondit Dévlin sans regarder Negg.
Ce dernier s'abstint répliquer que, heureusement qu'il était là parce qu'il n'avait pas compris avec tous ces costumes d'apparats entreposés dans la pièce où ils se trouvaient en compagnie de deux tailleurs.
Il se contenta de préciser:

- Je veux dire dans cette ville. Nous devions nous assurer que Rilin ne nous mentait pas sur la cité. C'est chose faite. Maintenant, que faisons-nous ?
- Nous faisons bonne figure et nous nous comportons comme des personnes civilisées jusqu'à parvenir à contacter le Conseil.
- Mais à quoi t'attends-tu ? Tu penses que Welkonn et Arancha vont ouvrir une ligne commerciale ? Nous ne sommes que cinq à avoir survécu à la traversée !
- Nous aviserons. Je ne peux pas prendre seul les décisions alors fais des efforts, prends ton mal en patience et choisi ta tenue !

Negg grinça des dents. Il se força à rester calme pour "faire bonne figure" comme l'avait si bien dit Dévlin.
Il lança un regard à Icrann et Batquisse qui étaient soigneusement restés silencieux lorsque les deux frères avaient commencé à échanger.
Ne comptant pas en rester là et laisser le dernier mot à son frère, le rouquin argumenta encore :

- Et pour Batquisse et Icrann ? Que vont-ils faire ?
- Nous préférons rester en-dehors de ça.

Répondit prudemment Batquisse en s'éloignant des deux frères de quelques pas pour bien marquer son désir de ne pas être mêlé à cette conversation qui commençait à s'agiter.
Dévlin soupira :

- Negg, s'il te plaît...

Le rouquin marmonna entre ses dents serrées, ruminant son énervement contre Sire Délèk, le Conseil des Mages, Dévlin, cette maudite cité et le monde entier. Contre lui-même aussi. Après tout, c'était lui qui avait convaincu Leïmy de se lancer dans cette entreprise.
Il inspira un grand coup pour tenter de s'apaiser puis il se força à se concentrer sur les vêtements qu'il avait à choisir. Il examine les tenues aux teintes plus criardes les unes que les autres.
Faisant comme si ils n'avaient jamais discuté à peine quelques secondes auparavant, Dévlin prit une veste de couleur claire qu'il montra à Negg :

- J'aime bien le bleu pâle.
- Pas moi, grogna le rouquin en se tournant vers l'un des deux tailleurs. Vous avez du noir ?
- Durant les bals, on a plutôt tendance à s'habiller avec des couleurs.
- Et bien moi, j'ai plutôt tendance à m'habiller en noir !
- Je vais vous trouver ça.

Le tailleur s'empressa de quitter la pièce à la recherche de ce qu'on lui demandait.
Dévlin le regarda partir puis reprocha à Negg :

- Tu l'as terrorisé. Enfin, il l'est certainement moins que les deux pauvres domestiques chargées d'habiller Leïmy. »

***

Alors que Negg, Dévlin, Icrann et Batquisse étaient conduits dans l'atelier des tailleurs royaux pour choisir leur costume, Sire Délèk en personne avait accompagné Leïmy à ses appartements. La jeune fille n'avait absolument pas écouté ce que le souverain lui racontait et qui devait certainement être de vaines et mielleuses paroles de séductions.
Une fois entrée dans ce qui était dorénavant sa chambre, elle mit le souverain à la porte de la manière la plus polie qu'elle connaissait. Ce qui signifiait sans cri ni lame mais sans sympathie non plus.
Un sourcil levé, elle examina l'immense pièce. De larges fenêtres encadrées de rideaux pourpres s'ouvraient sur le mur du fond. Le coin sud-est était occupé par un lit à baldaquin en bois massif sombre rehaussé de nombreuses incrustations en argent. Il était fermé par des voiles translucides laissant entrevoir des draps de soie. Au moins cinq personnes auraient pu tenir dedans. Cela aurait plut à Leïje. Le coin opposé était aménagé en un "espace salon". Deux canapés crème se faisaient face, séparés par une table basse en acajou. Pour terminer, un buffet en cristal longeait le mur de gauche à coté d'une porte garnie de moulures.
Leïmy songea à sa cabane perdue au cœur de la forêt d'Yolle et elle soupira.
Elle alla pour s'écrouler sur l'un des divans mais elle fut coupée dans son élan par des coups donnés contre la porte donnant sur le couloir.
La mercenaire se posta face à la porte et attendit qu'on entre. Ce qu'on ne fit pas. Leïmy leva les yeux au ciel et ordonna d'une voix exaspérée :

Chroniques d'une Mercenaire - Tome 4 : Par-delà la Mer [Terminé]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant