VENDREDI - 21 H 56

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— Quand on aime, on aime.

Depuis une heure, l'infirmière du lycée de la Mif, ma nouvelle collègue, était en train d'enchaîner les anecdotes plus savoureuses les unes que les autres sur son parcours amoureux. Je ne sais pas si mes amis étaient assez dupes pour croire tout ce qu'elle racontait mais, au moins, elle était surprenante et elle les captivait.

Cependant, quand elle nous a dit avec conviction « quand on aime, on aime », tout a défilé dans ma tête. La relation compliquée de mes parents, les rares couples que j'avais vus heureux dans les familles d'accueil où je passais quelques mois, toutes ces filles qui étaient passées dans mes bras et dans mon lit mais sans me réconcilier avec l'amour et le couple. Et puis elle était arrivée et sans rien faire, elle avait tout fait exploser, mes convictions, mes résistances et ma foi en l'avenir. Elle avait descendu ces marches avec son air renfrogné et j'avais senti de suite que c'était elle. Lors de notre première soirée ensemble à l'hippodrome, je n'avais qu'une envie, prendre son visage entre mes mains et l'embrasser encore et encore. Pour la première fois, je pouvais parler librement de tout avec quelqu'un sans qu'il n'y ait de réticences et ça faisait du bien. J'avais appris pour ses addictions mais malgré la peur de revivre la même chose que ma mère, je n'arrivais pas à la sortir de ma tête.

Notre parcours n'avait pas été simple entre deux accidentées de la vie, mais j'aimais chaque nouvelle version de Lola. J'aimais celle qui était passionnée et impulsive, j'aimais celle qui était tendre et attentionnée, j'aimais celle qui buvait et celle qui avait eu le courage de se faire soigner... mais je n'avais jamais su lui dire ou lui montrer. A quel point elle avait été la seule à faire tomber tous les murs de la prison que je m'étais construite, pour me protéger de la perte et des souffrances. Et maintenant, je l'avais perdue et ça faisait mal, tellement mal. Peu importe tout ce que j'avais tenté pour l'oublier, tout me faisait penser à elle, une chanson, une odeur, un mot, un objet... je n'arrivais tout simplement pas à vivre sans elle.

Après les paroles de l'infirmière, mon corps, sans que je lui ordonne, s'est tourné vers Lola ; elle avait ce regard doux et ce sourire attendrissant auxquels je ne pouvais pas résister. Alors, j'ai tenté de faire bonne figure malgré la boule qui me rongeait de l'intérieur, j'ai souri et j'ai fait semblant comme d'habitude. Quand elle a proposé que nous allions chercher des boissons, je me suis persuadée qu'elle voulait se retrouver seule avec moi pour que nous parlions. Rien de plus, elle n'avait plus de sentiments, je savais qu'elle souffrait mais aussi qu'elle voulait passer à autre chose. Je ne pouvais pas le supporter mais je l'aimais trop pour la forcer à quelque chose dont elle ne voulait plus. Pendant tout le trajet jusqu'à l'appartement, nous avons échangé des banalités mais, chaque fois que sa main frôlait la mienne, je sentais une décharge dans tout mon corps et je ne savais pas quoi en faire. 

Maya Etienne et Lola Lecomte (Skam France) : la suite de leur histoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant