The Goodboy & a Badgirl (Auto-publié)

La princesse couronnée Reine de la révolte

Taylor

—Je... commence Madelynn.

Le micro résonne dans la salle. Tout le monde est accroché à ces lèvres qui sont restées closes jusque-là. Elle expire un bon coup avant de se lancer.

—Je suis Madelynn Parker, et j'ai été victime d'une agression.
Un murmure s'élève dans la foule. Madelynn ne s'arrête pas pour autant :

—J'ai été victime d'une agression, répète-t-elle. Et mes agresseurs sont Noah McLay et Will Dangrey.

Les deux concernés n'osent même pas démentir, ils sont cachés dans les rangs, et j'ai beau les chercher, je ne les vois pas. Je reviens à Lynn qui poursuit :

—Et comme je sais que ce genre d'histoire n'est jamais cru, j'ai préféré vous montrer les preuves.

L'ambiance est tendue, comme si le moindre mot de travers pouvait tout changer à ce calme. Le proviseur se tient aux accoudoirs de sa chaise, réfléchissant à ce qu'il va faire. Kyle et Henry se sont postés devant les escaliers de gauche, qui sont ceux que pourrait emprunter le père de Lynn s'il décidait de tenter de monter sur scène. Quant à moi et Aaron, nous nous tenons devant les escaliers de droite, à l'opposé des deux basketteurs. J'ai une vue complète sur le gymnase mais le fond est trop sombre pour que je distingue les visages des étudiants. Les seuls projecteurs allumés sont braqués sur la scène. Lynn déglutit et se racle la gorge en me lançant un regard sur le côté, je lui fais signe de continuer.

—Will m'a drogué, lors d'une soirée, il y a quelques semaines. Il m'a ensuite isolé dans le jardin de ma propre maison et Noah a commencé à filmer. Il a... elle reprend son souffle, comme si chaque mot lui coûtait, ce qui doit être le cas. Il m'a embrassé de force et il m'a touché alors que je tentais de me débattre. Je lui ai clairement dit non. Et je ne suis pas sa première victime.

Sur ses mots, une personne se lève dans la foule, traverse la longue allée qui sépare les deux blocs de chaises. Une fille à la chevelure blonde, un peu moins grande que Madelynn monte sur scène. Kyle et Henry s'écartent pour la laisser passer sous ordre de Madelynn. Cette dernière lui tend le micro. La jeune fille ne lève même pas le regard en murmurant.

—Je suis Abby Harley, et j'ai été victime d'un viol de Will il y a un an.

Les lycéens s'insurgent, une exclamation parcourt l'assemblée.

—Ça suffit ! hurle mon père en se débattant pour nous rejoindre sur scène. Ça n'a pas sa place ici !

Les membres de l'équipe de basket le retiennent. Les professeurs et les surveillants présents restent assis sous les regards oppressants des parents présents. Tout le monde souhaite connaître la suite, et personne n'empêchera Lynn de la dévoiler.

Madelynn reprend le micro, soudain en colère.

—Ah non ? Et donc à qui dois-je le dire ? Puisque personne ne me croit lorsque je demande aux adultes responsables de la sécurité des élèves !

Elle a les yeux fixés sur son père, la haine transperce son regard.

—Et nous ne sommes pas les seules dans cette situation !

Deux autres personnes se lèvent pour rejoindre Madelynn sur scène. Parmi celles-ci, un garçon et une fille. La fille parle en première :

—Je suis Megan Clark, et j'ai été agressée par Will il y a deux ans à mon entrée au lycée ici car je rejettais ses avances. Il m'a agressée dans les toilettes de ce gymnase.

Le garçon prend sa suite :

—J'ai été témoin d'une discussion dans les vestiaires du club de rugby entre Will et Noah avant la soirée de Madelynn. Ils parlaient de leurs intentions envers elle. Ils m'ont menacé de me faire virer de l'équipe si je parlais.

Je garde les yeux sur Madelynn, qui reprend de nouveau le micro, plus sûre d'elle que jamais. Apparemment, ses recherches et coups de fil de cette semaine ont porté leurs fruits. Elle et Lisa se sont mis en tête de trouver d'autres victimes de Will et de sa bande, chose simple étant donné qu'elle a traîné avec eux la semaine passée. Elle a pu noter tous les noms énoncés et les contacter ensuite. Madelynn s'est ensuite organisé pour s'entretenir avec eux pour les rallier à notre cause.

—Voilà la réalité ! reprend-elle. Depuis des années, une agresseur se balade en liberté dans ce lycée ! Et chaque témoignage a été minimisé, jusqu'à être rendu totalement muet ! Alors, si aujourd'hui je me tiens ici, c'est pour demander justice et écoute ! Qu'on entende la douleur des victimes et qu'on punisse les agresseurs !

Les lycéens commencent à parler entre eux. Madelynn continue son discours. À présent, elle ne tremble plus :

—Je demande qu'on arrête de dénigrer les témoignages et qu'on soutienne enfin les victimes !

—Ouais ! cri un groupe de lycéens. Elle a raison !

—Que les agresseurs qui restent impunis soient mis devant les conséquences de leurs actes. Une agression, un viol, la violence, rien de tout ça ne doit être ignoré !

Les lycéens applaudissent, les professeurs aussi. Je regarde autour de moi : ils sont levés, et acclament ceux qui se tiennent sur scène. Madelynn enlace un à un chaque personne puis ils finissent par faire un câlin collectif. J'ai le cœur gonflé de fierté et d'amour devant ce spectacle. Après cette courte pause, Lynn conclut :

—Que les adultes voient enfin, l'état de la génération qu'ils supervisent. Et que cette même génération soit solidaire. Merci à tous.

Elle éteint le micro tandis que la foule l'acclame de plus belle. Certains sifflent, d'autres hurlent son prénom. Madelynn s'incline devant eux, les yeux embués de larmes qu'elle retient.

Kyle laisse enfin passer son père qui s'empresse de monter sur scène. Il attrape sa fille par le bras et lui assène une gifle qui résonne dans toute l'audience. Le silence que ce geste entraîne est bref. Les lycéens le huent, certains commencent à monter sur scène pour les séparer, mais les enseignants les empêchent d'aller plus loin. Madelynn lève la main pour signaler aux adolescents de ne plus approcher. Elle leur indique de suivre les surveillants et professeurs les guidant dehors.

Je grimpe les marches en me faufilant derrière un professeur pour rejoindre Lynn qui est restée stoïque devant son père.

—Tout le monde dehors ! hurle le proviseur.

L'équipe enseignante parvient à faire sortir les élèves. Je me place tout près de Madelynn et passe mon bras autour de sa taille.

—Toi, dans mon bureau tout de suite ! ordonne-t-il d'un ton froid et empreint d'une rage profonde.

Elle acquiesce, mais bizarrement, elle n'a pas l'air d'avoir peur ou d'être en colère. J'attrape la main de Lynn et marche à ses côtés. Elle resserre ses doigts autour des miens tandis que nous avançons dans les pas de son père.

La sonnerie de la pause a retenti, dans les couloirs, plusieurs lycéens s'agglutinent autour des affiches. Le père de Madelynn se fraye un chemin jusqu'à l'une d'entre elles et l'arrache du mur d'un mouvement colérique. Les élèves s'écartent sur le passage du proviseur furax.

Le bureau s'ouvre sur nous trois : un adulte face à deux adolescents qui ont beaucoup à dire. La première fois que je suis venu ici, c'était pour mon arrivée dans ce pays, et j'étais bien loin de me douter de ce qui m'attendait.