The Goodboy & a Badgirl (Auto-publié)

Le triangle Des Bermudes

Taylor

Le lycée était d'un monotone et pourtant d'une intensité épuisante. La seule petite éclaircie dans ce nouveau programme scolaire -que je peine à suivre- est Anyka et tous les autres. Ils m'aident comme ils peuvent selon leurs matières de prédilections.

En soi-même, le programme des cours n'est pas compliqué mais la compréhension dans des termes différents est parfois assez rude. Ils ont une méthode d'approche totalement différente de celle que j'avais dans mon lycée en Irlande.

Malgré ces difficultés, j'arrive à me hisser à une bonne position dans la classe, ce qui évidemment en agace plus d'un. Mais dès que quelqu'un semble me vouloir du mal, Lisa débarque et le dissuade de faire quoique ce soit. Quant à moi, je tente de m'imposer de plus en plus, afin de ne pas me laisser "me faire écraser" comme l'avait dit une certaine rebelle il y a maintenant plus d'une dizaine de jours.

Cette même rebelle s'efforce de rester le plus loin possible de moi malgré mes quelques tentatives pour l'approcher. Elle m'a même lancé des piques, comme pour me maintenir à distance en me vexant. J'ai vu Lisa s'énerver lorsqu'elle entendait certaines répliques. La tension entre ces deux-là plane dans l'air. Néanmoins, j'ai réussi à la convaincre que je m'en fichais.

Chose fausse bien entendu. Les premières se sont plantées dans mon cœur comme les épines d'une rose que l'on arrache à son rosier. Mais pour ce qui est des suivantes, j'ai réussi à prendre du recul et voir les pétales s'ouvrirent : elle ne fait ça que dans le but de me garder loin. Je crois. J'essaye de me convaincre que c'est le cas. Une part de moi se dit que c'est aussi une manière pour elle de garder contact avec moi.

Je dois avoir des penchants masochistes je crois...

—Notre pique-nique de demain tient toujours ? demande George alors que nous sommes tous assis à l'ombre d'un arbre de la cour.

—Je vais préparer des naans au fromage ! s'exclame Anyka.

—Moi je me charge de votre hydratation, dit Chloé en posant une main sur son torse comme pour jouer un rôle dramatique dans une scène de théâtre.

—Et moi des minis-sandwich et des roulés aux saucisses, déclare Lisa.

—Je suppose que je peux apporter le dessert ? dis-je en haussant les sourcils devant l'organisation.

—Alors, il n'y a qu'un seul dessert valable Taylor, commence George avec un soudain sérieux.

—C'est des fraises et du chocolat, intervient Chloé. Et par pitié épargne-nous ton discours sur le délice que c'est à tes yeux ! dit-elle à George.

Ce dernier lève les épaules, faussement vexé et se rabat sur son téléphone.

—Bon et bien j'apporterai des fraises et du chocolat dans ce cas !

—Il n'y a pas une spécialité d'Irlande que tu pourrais nous faire ? m'interroge Anyka.

De ce dont je me souviens, elle adore les cultures étrangères et rêve de voyager.

—Je ne connais pas de recettes de dessert, mais un autre jour je vous ferai un plat irlandais si vous voulez.

—De la nourriture gratuite ? Je prends ! proclame le roux ayant retrouvé son enthousiasme.

Nous rions tous et continuons de discuter de notre repas du lendemain. Notre emploi du temps s'est dégagé avec les nombreuses sorties scolaires qui ont été programmées. Nous devons d'ailleurs en faire une ou deux dans le mois de ce que j'ai compris. Emelyn Berkley, la femme qui m'accueille dans sa famille, m'a gentillement proposé de m'aider à faire les démarches pour que je puisse faire ces sorties. Et je crois qu'apparemment, le proviseur a tout de suite accepté. Sûrement un moyen de se faire pardonner.

Nous retournons en cours une fois que la sonnerie approche. Comme d'habitude, Lisa et moi partons de notre côté et les autres du leur. Anyka me salue de la main avec un sourire.

Nous finissons cette journée avec deux heures de mathématiques. La professeure nous ouvre la classe et je pars m'installer au dernier rang. Je n'ai absolument aucune énergie et motivation à consacrer à cette dernière période. Cette matière est bien une des seules pour lesquelles je peux me prélasser sans soucis puisque peu importe les mots, la logique reste la même.

—Bon, entrons dans le vif du sujet, tonne Mme Perlyn. Vous allez devoir me faire des exposés, et avant que vous ne commenciez à me poser tout un tas de questions inutiles laissez-moi vous dire que votre binôme et votre sujet seront tirés au sort.

Un râle général parcourt la classe.

Un exposé contient aussi une certaine forme de logique, non ?

La professeure sort deux bocaux remplis de petits papiers. Elle appelle quelques élèves pour tirer un binôme et un sujet. Mon nom ne ressort pas et je soupire de soulagement à chaque fois. J'espère avoir assez de chance pour tomber sur Lisa.

—Mademoiselle Parker ! C'est à vous.

Madelynn se lève avec désinvolte et plonge sa main dans le bocal.

—Et comme je sais que vous aimez le travail d'équipe et qu'il faudra un trinôme, vous piochez même deux noms !

Madelynn est encore plus agacée. Elle sort un premier papier qu'elle déplie avant de pousser un juron.

—Noah ! proclame la professeur en lisant le papier.

Le concerné tape sur sa table avant d'afficher un rictus malsain. Il ne semble pas agacé, mais plutôt intéressé de ce qu'il pourrait tirer de cet exposé.

Oh, c'est pas bon du tout ça...

Madelynn replonge sa main. Rien ne pourra être pire de toute manière. Du moins, je crois. Le suspens me prend aux entrailles. Je ne sais pas pourquoi mais une angoisse se loge dans ma cage thoracique et grandit à mesure que les secondes passent.

Après avoir tourné la main dans le bocal, elle ressort un second papier qu'elle lit.

—Taylor, prononce-t-elle en décollant chaque syllabe.

J'hésite actuellement entre les larmes de joie et les pleurs.

Madelynn est dans un état second alors qu'elle tire notre sujet qui sera "l'histoire d'Ada Lovelace". Le sujet est probablement l'un des moins pires : une simple biographie. Cependant, Noah semble bien déterminé à nous mener la vie dure, et ça je le comprends lorsqu'il me jette un regard meurtrier.

Madelynn rejoint sa place, je m'empresse de lui envoyer un message en douce avant de me rendre compte que je n'ai toujours pas son numéro. Pourtant, comme si un lien spirituel nous unissait, je reçois un message :

"-Hey, c'est Lynn. Pour l'exposé, comment on gère ?

-Je me doute que c'est toi. Je ne sais pas, Noah va vraiment être pénible ?

-J'en ai bien peur. Si tu veux je peux m'en charger avec lui et faire le point avec toi.

-Et te laisser seule avec un des chiens de ce taré de Will ? Jamais. Non, on va régler ça en une après-midi, à trois, en espérant qu'il veuille collaborer.

-Ça, c'est pas gagné."

Ses réponses sont froides, dénuées d'intérêt ou de gentillesse. Enfin, au moins elle répond. J'espère simplement que cet exposé pourra aussi me permettre d'obtenir une raison à son éloignement soudain. Une vraie raison. Et pas juste un mensonge qu'elle aura prémâchée comme à son habitude. Je veux entendre la vraie Madelynn, pas celle qui porte un masque de fille méchante. Sans m'en rendre compte je m'imagine comment ça serait de travailler avec elle pourtant je n'arrive pas à le visualiser. Comme si la seule chose que je pouvais voir c'était une fille mesquine et peu travailleuse. Toutefois, mon instinct me dicte le contraire. Je secoue la tête pour me libérer de cette réflexion bien trop poussée pour une fin de journée.

J'enregistre son numéro et referme mon portable. Je jette un regard vers Madelynn qui m'accorde un coup d'œil avant de retourner la tête rapidement. De l'autre côté, je vois Noah qui nous fixe d'un regard mauvais.

Et bah... ça promet !