15- Définition du bonheur.

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Sarah avait vite compris qu'elle ne pouvait pas m'acheter. La date limite pour remettre notre travail approchait et on n'avait encore rien fait. Aucune de nous deux voulait céder. De mon côté, j'avais commencé. Finalement, à une semaine de la remise du devoir, elle était venue me trouver non sans son arrogance, de surcroît. Deux jours après, je me retrouvais encore chez elle. 

— J'ai commencé... Avec quelque chose, dit-elle avec une hésitation dont je ne lui connaissais pas.

— C'est un devoir en groupe, lui rappelai-je.

— Que voulais-tu que je fasse ? Que je t'attende ?

— Et toi ? Que croyais-tu quand tu m'as fait cette proposition ? rétorquai-je.

— Ça s'appellait une opportunité et tu l'as laissée passer, se justifia-t-elle.

— Une opportunité comme ça, je m'en passerais.

Elle me toisa et enleva le drap qui cachait son devoir. Je restai bouche bée en découvrant sa toile. Ce n'est pas elle qui l'a fait, m'étais-je dit. Même moi, je n'arrivais pas à faire de même. Son tableau était magnifique, digne d'un grand artiste.

— Tu es...

Elle le recacha vite, l'air gêné. Ce n'était pas la Sarah pleine d'assurance et de répartie qui se trouvait en face de moi.

— Comme il nous reste seulement quelques jours, on n'aura pas assez de temps... J'ai demandé à mon parrain de le peindre.

C'est dur de l'admettre mais elle mentait. Sa voix tremblait presque.

— Ce n'est pas vrai.

— Je te demande pardon ?

— Tu peins, n'est-ce pas ?

— Non, s'écria-t-elle.

— Je ne le dirai à personne, promis-je en allait retirer le drap. Il est magnifique.

— C'est ça, moque-toi.

— Non, je te jure. Moi aussi je peins.

— Vraiment, quelle bonne surprise, fit-elle faussement étonnée.

Bien sûr, toute la classe savait. Cependant, je ne le disais pas comme une information de première.

— La peinture est ma passion, ajoutai-je en ignorant sa remarque. Je pense que tu ne devrais pas te cacher.

— Qui te dit que je me cache ? Qu'est-ce que cela peut te faire ? T'es d'accord ou pas ?

— Non !

Plus les minutes s'écoulaient, plus elle devenait une autre personne. Après avoir passé deux heures à refuser les propositionss de l'autre, on se mit d'accord sur une idée. On allait séparait le tableau en deux, chacune de nous allait se représenter dans un moment de pur bonheur. Étonnement, pour nous deux, peindre nous rendait profondément heureuse. Cela l'avait poussé à me dévoiler un secret.

— J'avais 3 ans quand mon parrain avait mis dans mes mains mon premier pinceau, raconta-t-elle. Je me rappelle avoir sauté de joie car j'ai toujours voulu faire comme lui. Il m'a tout appris.

— Je ne comprends pas pourquoi, en classe tu fais semblant de ne pas t'y intéresser.

— Mon père ne veut pas que je peigne. Il dit qu'une Jean-Pierre ne doit pas s'adonner à de telles futilités, soupira-t-elle tristement.

Cela me rappelait quelqu'un...

— Tu veux en faire ton métier ?

— Bien sûr que non ! Il me déshéritera. Non, sérieusement. J'adore peindre mais j'ai les idées assez claires pour ne pas placer la peinture en premier plan.

My [Un]Happy StoryOù les histoires vivent. Découvrez maintenant