Prologue 💭

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    Vivre pour écrire, écrire pour se sentir vivre. Écrire pour ne pas sombrer. Écrire pour réapprendre à s'aimer. 

    Je me pose beaucoup de questions quant à la société dans laquelle je vis. Je remets en question toute mon existence, mes habitudes, mes pensées, mon tempérament : est-ce vraiment moi ? Qui suis-je finalement ? Celle que j'ai envie d'être ou celle qu'on veut que je sois ? J'en viens à douter de tout, surtout de l'Autre, leurs paroles, leur façon de me regarder, de me juger. Je suis seule face à ces sentiments chaque jour un peu plus nombreux et c'est dans ces moments-là que je me sens sombrer dans l'abîme infinie qu'est mon être, à la merci de mes pensées sans fin qui me poignardent le cœur et l'esprit. M'en sortirai-je un jour ? 

    Me voilà, dix neuf ans, enfant des années deux mille : bonne santé, proches aimants, sans manque apparent. « Je ne comprendrais jamais, tu as tout pour être heureuse. Tu es jeune, belle, pleine de répartie, bien entourée et si gentille. On ne veut que ton bien. Tu sais, ça arrive d'aller mal, de se sentir perdue... » J'ai décidé de ne plus compter. Ne plus compter le nombre de fois où je l'ai entendue, cette phrase, peut être pas mot pour mot mais l'idée est là. Un dimanche matin, un mardi ou un jeudi soir, vacances scolaires, beau jour, jour pluvieux. Cette phrase revenait, accompagnée de tout un tas d'explications dans lesquelles j'essayais de me retrouver. De nombreuses fois j'ai tenté de me rassurer : «c'est juste une phase, ça va passer, dans la vie il y a des hauts et des bas, on n'est pas condamné à rester malheureux, le mauvais sort en à bien marre de nous un jour, il cherche d'autres âmes perdues à ronger ». Et pourtant rien ne change. Et pourtant, je vis toujours. C'est toujours avec le même sourire qu'on admire ensemble le soleil qui se lève le matin, avec le même regard et les mêmes pensées que je pars affronter le monde tous les jours. Je vais m'en sortir. Une forme de Mal du Siècle peut-être.

    J'ai eu ce que les gens aiment qualifier « d'enfance heureuse ». Aimée, choyée, bien nourrie, bien lotie. Pourtant j'ai dix-neuf ans et quelque chose cloche, je crois. Plus le temps avance et plus je constate qu'il est difficile de me replonger dans mon enfance, me replonger dans ces moments passés, ces sensations éprouvées. C'est effrayant de se sentir étrangère à son propre corps. Voilà mes parents, mes frères et sœurs, et moi. Comme si je m'étais réveillée un matin et que la vie m'avait poussée du lit en me disant : «Rends-moi service, oublie qui tu es. Laisse-toi te faire modeler par tous, parla société et les autres selon leurs critères de normalité. Tais-toi et inspire à pleins poumons et jusqu'au plus profond de toi tous les diktats dans lesquels tu nages chaque jour. Encore, vas-y. Encore. Toujours un peu plus. Paie pour les autres, sers-leur de bouc émissaire, laisse-les se vider de leur haine et de leur mal-être. Laisse-les te bouffer, jusqu'à la moelle, sinon il y aurait une chance que tu t'en sortes, minimise-les, ces chances. Et maintenant essaye de vivre. T'en fais pas je suis là, eux aussi, c'est amusant tu verras. »

    Commencer une histoire est compliquée. Commencer mon histoire, ou peut-être devrais-je dire la notre, l'est d'autant plus. Tout à commencer... A quel moment cela a bien t-il pu commencer ?Nous sommes le 04 février 2019 et encore une fois tu as craqué. Seule chez toi avec une vie entre les mains que tu ne reconnais plus. Est-ce toujours la tienne ? Tu l'ignores et ça te fait peur, Esor. Réfléchir à une perspective d'avenir te terrifie. Toi, petit être humain parmi tant d'autre, tu es censée choisir la vie que tu aimerais mener ? Dans une société où tu te sens contrainte de faire certains choix et en mettre d'autres de côté ? Je te sens déjà perdue. La seule perspective d'écrire un tant soit peu de choses sur toi te crée un blocage. Je le sais Esor. Mais ne t'inquiète pas, je suis là, je vais le faire pour toi, pour nous.

Esor e(s)t moi 🥀Où les histoires vivent. Découvrez maintenant