Le grognement sourd de mon estomac me réveille doucement d'un cocon chaud et moelleux. J'entrouvre un œil, mais je suis bien vite obligée de le refermer, car une puissante lumière blanche vient m'aveugler. Tout en essayant de m'habituer à la clarté de la pièce où je me trouve, je m'étire longuement. Mes articulations craquent et je ne peux m'empêcher de gémir de satisfaction.
Cela fait tellement longtemps que je n'ai pas aussi bien dormi. Doucement, je me redresse sur mon lit ou plutôt sur le nuage sur lequel je câlinais, quelques secondes plus tôt, Morphée. Je regarde alors tout autour de moi et je remarque que je suis à nouveau dans une chambre d'hôpital et non pas celle du dortoir.
Je n'ai même pas le temps de faire le point sur ma situation que mon regard est automatiquement attiré vers la table de chevet à ma gauche. Je retiens de justesse des larmes de joie lorsque je découvre posé sur une assiette en carton et accompagné de petits couverts une immense part de gâteau au chocolat.
Instantanément, des litres de salives viennent envahir ma bouche. À la vitesse de l'éclair, je me jette sur le dessert. Le goût si particulier du cacao titille mes papilles. Je me sens rosir de plaisir. Tout mon être accueille avec joie ce délice d'une douceur exceptionnelle. Lorsque je finis ma part, bien trop rapidement à mon goût, je soupire de contentement. C'est à ce moment que j'aperçois une petite feuille qui était placée juste à côté de l'assiette. Je l'attrape et je peux lire « de la part d'Éléonore, j'espère qu'il te plaira ».
Un sourire que je ne peux retenir étire mes lèvres. Depuis mon arrivée, Éléonore m'a toujours soutenue. Lorsque je lui ai dit que j'avais vu des monstres, elle m'a crue sans hésiter. Et même si parfois ses comportements changent brutalement, je sais qu'elle sera toujours là pour moi. Après tout, nous sommes dans une clinique psychiatrique ce qui explique des changements subits de personnalité. Mon séjour à l'hôpital serait agréable si je n'avais pas toujours une ou plusieurs ombres noircissant le tableau de notre amitié.
Je m'adosse à nouveau contre mon oreiller, même si j'ai encore faim cette pause sucrée m'a permis d'éclaircir mes pensées. Tout en regardant le plafond, je me rappelle de ma nouvelle rencontre avec Tim et Tom et surtout, je me souviens du terrible mal-être qui avait terrassé mon esprit et mon corps lorsque j'avais posé des mots sur leur nature. C'était comme si à la fois tout mon organisme et ma conscience refusaient de croire cette réalité. Pourtant, mes yeux eux ne pouvaient pas mentir, ils avaient vu les deux ambulanciers sous leur forme de monstre. Oui, ils avaient bel et bien vu cette effrayante scène mais n'était-ce pas mon cerveau qui leur avait fait voir ce qu'il souhaitait leur montrer ?
Mais alors comment expliquer que d'autres personnes ont vu les mêmes monstres que moi ? Est-ce seulement possible que des schizophrènes aient les mêmes hallucinations ? Comment en avoir la certitude ? Dois-je interroger l'Ange ou encore le Docteur Buile, tous les deux m'ont agréablement surprise à me protéger vis-à-vis de l'attitude de Tom.
Je n'y comprends plus rien. D'un autre côté, si les deux brancardiers étaient des Uxoricides pourquoi m'avaient-ils épargnée tout ce temps ? Mais surtout pourquoi le tueur de mon voisin ne semble se contenter que de me suivre et ne pas se décider à me tuer alors que j'ai dévoilé son existence ? Et d'ailleurs avais-je même été témoin de son meurtre si des douilles avaient véritablement été retrouvée devant chez lui ? Et Lucie ? J'ai failli l'oublier, Éléonore et moi avons retrouvé sa paire de lunettes couverte de sang. Son monstre, l'a-t-elle enlevée ? Je secoue la tête, je n'arrive pas un seul instant à croire à la réalité du monstre de Lucie. Mais si le sien n'est pas réel comment ceux que j'ai vus puissent l'être ?
Trop de questions sans réponses valsent dans ma tête, plus mon hospitalisation dure, plus j'apprends de nouvelles choses, mais toutes ces informations ont pour seul effet de m'embrouiller. Je n'en peux plus. Pourquoi est-ce que je me bats déjà ? Oui, c'est vrai. Vivre. Je veux vivre normalement. C'est tout ce que je demande. Mais est-ce que je pourrais un jour être à nouveau normale ? Est-ce que je pourrais enfin être débarrassée du fardeau qui me pèse et qui est bien trop lourd pour mes épaules ?
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Imaginaire
AdventureLe 15 octobre 1967, Gabrielle Girardin, âgée de 16 ans et issue d'une prestigieuse famille est témoin du meurtre de son voisin par un monstre tout droit sorti de ses pires cauchemars. Quelques jours plus tard, la jeune fille est diagnostiquée schizo...