Chapitre 25 : Paul

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Je vois la porte s'ouvrir avec une lenteur insupportable et dans un silence de mort. Incontrôlables, les battements de mon cœur résonnent en longs et puissants échos dans mes tympans. Mes doigts s'agrippent à ma couverture comme si, à tout moment, quelque chose pouvait surgir de l'ouverture, et pourtant, rien ne se passe. Un puits noir, d'où aucune lumière ne s'échappe, se trouve devant moi. À l'intérieur, je ne distingue aucun mouvement, aucune silhouette.

Je ne sais pas combien de temps je reste face à ce trou, aussi sombre que les abysses les plus profonds. Petit à petit, ma confiance revient et j'arrive à me calmer. Si celui qui m'a libéré de l'isolement avait l'intention de me faire du mal, il aurait eu plusieurs occasions de le faire.

Doucement, je me lève en écartant délicatement mes draps. La fraîcheur de la pièce me saisit brusquement et de puissants frissons parcourent mon dos. Je ne quitte pas des yeux les méandres sans fond qui s'ouvrent devant moi. Je n'ai aucune envie de plonger à l'intérieur, une peur irrationnelle de m'enliser et de l'inconnu qui s'y trouve m'empêche de quitter ma cellule, qui est devenue pour moi un petit nid douillet.

Alors que je ferme la porte, quelque chose de lourd vient s'écraser contre elle. Surprise et déséquilibrée par l'impact, je recule de quelques pas. Bouche bée, je vois un garçon de mon âge complètement essoufflé fermer la porte avec une peur non dissimulée.

Je m'éloigne de la porte à la vitesse de l'éclair et je retourne en position défensive sur le lit, où les ressorts s'enfoncent dans mes pieds nus à travers le matelas. Soudain, ma gorge se dessèche tel un désert aride et il m'est impossible de déglutir lorsque j'inhale une odeur âcre. Une répulsion innommable m'envahit alors que je dévisage l'inconnu, ne pouvant retenir un hoquet de dégoût.

Le garçon en face de moi dégage une forte odeur de saleté. Je n'ai jamais vu quelqu'un d'aussi sale de toute ma vie. Sur sa tête se trouve un amas de cheveux bouclés et emmêlés d'une couleur douteuse, qui je pense étaient blonds à l'origine. Même sa peau, qui devrait être aussi blanche que la mienne, a une teinte grisâtre. Ses yeux enfoncés dans leurs orbites ne reflètent aucune lumière, aussi éteints que l'obscurité qui me faisait face il y a quelques secondes. Son nez rond pourrait lui donner un air adorable, mais je suis incapable de voir la moindre once de beauté chez lui, tant l'air qui l'entoure est infect. J'espère secrètement que mes vêtements ne seront pas imprégnés de cette odeur abominable.

Je m'éloigne de quelques pas pour mieux supporter sa présence et comme il ne se décide pas à rompre le silence, je prends les devants.

- T'es qui toi ? l'interrogé-je avec dédain.

À ma grande surprise, mon interlocuteur éclate d'un rire franc. Ses fines lèvres gercées, pendant qu'il rigole, s'ouvrent légèrement laissant apparaître quelques gouttelettes de sang. Un frisson de malaise me happe soudainement et j'ai alors du mal à soutenir son regard. Pourtant, je n'abandonne pas. Je veux savoir qui il est pour le faire partir le plus vite possible.

- Comment t'as fait pour venir jusqu'ici ? Tu es un patient ? Pourquoi es-tu si sale ?

Désormais, je n'arrive plus à cacher mon agacement et mon écœurement, et je le pointe avec ma fourchette que j'ai attrapée pour le menacer.

- T'as intérêt de vite partir sinon j'appelle les infirmières, le menacé-je

- Tu veux vraiment que je parte ? Tu m'appelles pourtant depuis si longtemps, rétorque-t-il d'un ton énigmatique.

 - Impossible, je n'ai appelé qu'une personne..., murmuré-je.

Je dois être en train de rêver. Ce garçon ne peut pas être le Paul dont m'a parlé Lucien. De deux doigts, je me masse les tempes. Tous ces efforts, pour ça ? Comment un être si négligé peut-il m'aider ? Je m'assois alors doucement et lâche le couvert me faisant office d'arme. Je lui indique d'un signe de tête de faire la même chose, mais sur le sol, le plus loin de moi possible.

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