Chapitre 22 : Tête à Tête

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NDA : Oui, vous ne rêvez pas une note d'auteur de Lira ! Je vous écris ici juste pour vous prévenir que dans ce chapitre un cas de comportement autodestructeur est évoqué. Je préfère préciser que je n'écris pas ce passage juste pour ajouter un côté sombre à l'histoire mais que pour l'intrigue cet élément est plutôt important ^^. Sur ce je vous souhaite une bonne lecture :)

Immobile tel un rapace focalisé sur sa proie, Lucien ne m'a pas une seule fois lâché du regard. Je suis la source de toute son attention, il m'observe, me jauge comme si tout d'un coup par ma connaissance de ce monstre, je suis devenue quelqu'un de dangereux. J'incline la tête pour l'inciter à me répondre. Mon mouvement a pour effet de le sortir de sa transe de prédateur. Son visage se contracte soudainement et j'ai l'impression qu'il fait tous les efforts du monde pour arriver à desserrer ses lèvres charnues.

– On doit y aller, si on reste là, ils vont nous retrouver plus vite que prévu, observe-t-il.

Lucien se détourne de moi et commence à marcher doucement. Déterminée à avoir des réponses, je cours à sa suite.

– Tu le connais n'est-ce pas ? l'interrogé-je.

Il ne me répond pas et cette fois-ci, il garde le regard résolument fixé droit devant lui. Je soupire et alors que je tends ma main valide pour lui attraper l'avant-bras, il s'écarte brusquement de moi.

– Ne me touche pas, m'avertit Lucien.

Je garde mon bras suspendu dans le vide. Encore une fois, il me semble que je fais face à une bête sauvage. Lucien est imprévisible, méfiant, et surtout, je suis incapable de deviner ce qui lui passe par la tête. Il transpire le mystère et la souffrance, que lui est-il arrivé ?

Je retiens de justesse un soupir de peur de l'énerver et je le suis alors à travers la forêt. Pendant notre trajet dans un silence de plomb, je suis incapable de ne pas être sur mes gardes de peur de subir une soudaine attaque de mon compagnon de fuite.

Bientôt, à force de nous enfoncer dans les bois, nous tombons sur un terrain beaucoup plus escarpé. Prudemment, je le suis en regardant où je pose les pieds pour ne pas glisser ou ne pas trébucher sur les multiples racines qui jonchent le sol. Nous descendons doucement pour arriver à l'orée d'un véritable puits de lumière. Devant nous s'étend une clairière où les herbes folles sont balayées au rythme des bourrasques du vent d'hiver.

Je retiens un frisson de peur, cet endroit me fait furieusement penser à mon rêve où j'ai vu le corps de mon voisin. Je déglutis incapable de faire un pas de plus, mes muscles sont complètement paralysés pendant que mon esprit rejoue le film de ma chute sur le corps sans vie de Monsieur Bohmi. Dans un flash, je revois ses yeux ternes dont la vie s'est échappée depuis bien longtemps.

Un bruissement de feuille se fait entendre derrière moi et je me retourne avec une crainte non dissimulée de tomber nez à nez avec l'Uxoricide. Je sais que je respire de plus en plus fort et pourtant, je n'entends aucun son être émis de mon corps. Je suis comme prisonnière d'une bulle insonorisée. Je n'entends plus rien et je vois Lucien qui s'éloigne de plus en plus de moi.

Un cri que je sais étranglé arrive à s'échapper comme par miracle de mes lèvres et je vois comme dans un songe Lucien se retourner vers moi. Il me regarde et une lueur d'étonnement passe dans ses yeux. Avec une lenteur extrême, je tends ma main tremblante vers lui, j'ai besoin de sentir quelqu'un contre moi, de me sentir protégée.

Comme dans un songe, il revient vers moi, et quand il n'est plus qu'à quelques centimètres de moi, il m'attrape ma main d'un geste brusque et serre ma paume avec force. Le contact de sa peau contre la mienne me rassure instantanément et je sens alors sa chaleur envahir mon corps qui est glacé jusqu'aux pieds. Je ferme les yeux, j'inspire profondément et je fais alors un pas dans cet écrin de verdure.

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